Robert Charlebois : Plus doux mais encore sauvage
Pour ses 60 ans, Robert Charlebois s’offre un gros trip rock, en attendant son prochain album.
Les attachés de presse de Robert Charlebois disent de son spectacle qu’il est "le plus rock de sa vie". "C’est vrai, mais le monde pleure à la fin quand même!" lance le sexagénaire, expliquant que c’est l’absence de piano sur scène et les deux batteries qui donnent cette texture rock. "Je ne veux pas te dévoiler tous mes trucs, mais ce show-là marche vraiment, il est bien construit. Et mes nouveaux musiciens (Dominique Lanoie et Danie Lacoste [guitares], Alexandre Dumas [basse], Alexis Martin et Steve Gagné [batteries]) sont aussi très bons. Je suis content, parce que lancer un nouveau spectacle, c’est aussi risqué que de déménager." Et Charlebois n’aime pas beaucoup déménager: sa Maudite Tournée, il l’a habitée pendant huit ans…
"Les Beatles sont morts, vive Charlebois!" a dit un jour Louise Forestier. Celui qui a fait entrer la chanson francophone dans la modernité exerça ici durant 20 ans une influence incommensurable. Jusqu’à… ce que, un peu comme Dylan, il rejette les épithètes et les clichés.
"Si je n’avais pas fondé une famille avec Laurence, j’aurais fait le même disque toute ma vie." Donc, fin des années 70, Charlebois adopte un nouveau son, un nouveau look, de nouvelles thématiques, et ses fans de la première heure le prennent mal. La pochette de l’album Swing Charlebois Swing, où on le voit sur un terrain de golf, en choque plusieurs… Loin des projecteurs et du glamour, avec sa compagne et ses deux enfants, Charlebois cherche à profiter d’une vie de famille paisible à Westmount…
Puis, pendant l’enregistrement d’un album en Belgique, il tombe amoureux de la bonne bière. Et, de retour au pays, loin de la musique, il s’associe à un brasseur de Chambly. Il sera actionnaire d’Unibroue pendant 13 ans. "J’ai travaillé très sérieusement au développement de cette compagnie. Mais à la fin, ce n’était plus possible de continuer comme ça. D’abord, ça m’enlevait du temps pour écrire et jouer de la musique. Et c’est très féroce dans ce milieu, il faut se battre avec chaque dépanneur pour qu’il offre notre marque." Unibroue est ensuite vendue à une entreprise ontarienne, Sleeman, geste qui, une fois de plus, fait grincer des dents plusieurs Québécois. "C’est une décision d’affaires: non seulement on a vendu au plus offrant, mais le père de John Sleeman, l’actuel propriétaire, était un brasseur, c’est donc dire que Sleeman connaît bien la bière; de plus, il s’était engagé à garder les produits intacts, ce qu’il a fait."
L’homme est aujourd’hui en pleine possession de tous ses moyens, "la grande forme que seuls les solides alcooliques qui ont arrêté de boire peuvent connaître". Le sujet n’est pas tabou et prête même à la blague: "Avant Unibroue, j’étais un alcoolique léger; mais avec tous les tests de bières…" Hilare, il poursuit: "Je suis pratiquement sobre depuis un an. J’ai trouvé ça très difficile d’arrêter, mais je m’en porte mieux. On n’en parle jamais, mais boire prend un temps fou."
Libre, Charlebois a écrit 12 nouvelles chansons, "très personnelles, presque trop belles", qu’il gravera bientôt, lorsqu’il les sentira prêtes. Avant de devenir trop vieux, il désire s’offrir ce gros trip rock. Il fait à sa tête, carbure à l’instinct. Comme lorsqu’il avait 19 ans et qu’il sortit de sa chambre en criant, après avoir composé La Boulée(Prix de la chanson 1965): "Maman! j’ai écrit une chanson géniale!"
Le 28 mars à 20 h
À la Salle Maurice-O’Bready
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