René Richard Cyr : Les fantômes de l'opéra
Musique

René Richard Cyr : Les fantômes de l’opéra

René Richard Cyr met en scène des fantômes dans la nouvelle production de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal: The Turn of the Screw, de Benjamin Britten.

Équipe jeune, look urbain, bonne franquette: l’opéra redescend sur terre dans les locaux qu’occupe l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, rue Clark. Pourtant, c’est une histoire de fantômes qu’on y répète: The Turn of the Screw (Le Tour d’écrou) de Benjamin Britten (1954), l’histoire d’une vis sans fin qui n’a rien d’un casse-noisette…

L’Opéra de Montréal a vu juste en confiant la mise en scène de cette coproduction de l’Atelier lyrique et de l’École nationale de théâtre du Canada à René Richard Cyr. Homme à tout faire extraordinaire qui a déjà réglé des mises en scène pour l’OSM ou les FrancoFolies, mais aussi pour des comédies musicales comme Les Parapluies de Cherbourg ou L’Homme de la Mancha, sans compter de très nombreux succès au théâtre, Cyr a une expérience indéniable, mais il aborde pourtant l’opéra avec la fraîcheur de la première fois. "Ça fait plusieurs années que l’Opéra me faisait signe, explique-t-il. Il y a d’abord eu un contact avec Bernard Uzan, mais c’était resté assez informel. Puis Bernard Labadie est revenu à la charge. Cependant, ne connaissant pas les modalités de production de l’opéra, qui est un milieu très différent de tout ce que j’ai pu faire avant, j’ai demandé de commencer par quelque chose qui ne serait pas une superproduction avec des choeurs et des trucs énormes… Pour apprendre à connaître le fonctionnement de la chose. La collaboration entre l’OdM, l’Atelier lyrique et l’École nationale était toute désignée."

Si The Turn of the Screw n’est pas un opéra gonflable du genre d’Aïda (dont les mises en scène atteignent parfois des proportions gargantuesques), ce n’en est pas moins une oeuvre d’une grande qualité. "C’est une oeuvre assez redoutable pour de jeunes professionnels, vocalement, mais aussi théâtralement. Ça pourra leur donner des outils pour parfaire leur jeu, c’est une oeuvre tellement riche. Je ne sais pas si je retrouverai une oeuvre aussi troublante, avec une telle multiplicité de sens, exigeante musicalement et avec une théâtralité aussi forte. Celle-ci est déjà présente dans la nouvelle d’Henry James; il ne faut pas attendre le dénouement, il faut être attentif à la beauté du déroulement. Sur ce plan-là, c’est extrêmement moderne, et le spectateur a un travail de réflexion à faire."

Dans la salle de répétition de l’Atelier lyrique, je ne peux m’empêcher de penser qu’il doit quand même y avoir une sacrée différence avec les moyens qu’avait René Richard Cyr en 2003, lorsqu’il concoctait Zumanity à Las Vegas pour le Cirque du Soleil… Mais pour le créateur, ce n’est pas un problème: "L’argent ne donne pas des idées… Ou du plaisir. Je retrouve justement ici, comme au théâtre, le plaisir d’être un artisan. Le Cirque du Soleil est unique; il n’y a rien de comparable. Dans les réunions de production, on ne parle même pas de chiffres! Mais j’ai un très grand plaisir actuellement, justement parce que je nage dans des eaux qui me sont un peu inconnues. C’est très enthousiasmant de travailler avec de jeunes professionnels et j’ai aussi une très bonne collaboration avec le chef Jean-Marie Zeitouni."

Les différentes contraintes de mise en scène ont offert à René Richard Cyr un terrain de jeu des plus stimulants. "Par exemple, explique-t-il, malgré les recherches qu’ont faites les gens de l’Atelier, nous n’avons pas trouvé d’enfants pour les rôles, très importants, de Flora et Miles; il nous a donc fallu trouver une convention pour faire passer le fait que le petit garçon et la petite fille seront joués par deux chanteuses… adultes. Je crois que nous y sommes parvenus!" Le metteur en scène est tellement heureux de sa collaboration avec le jeune scénographe Pierre-Étienne Locas, tout juste diplômé de l’École nationale, qu’il retravaillera avec lui l’année prochaine pour Don Giovanni. Mais ça, c’est une autre histoire!

Les 1er, 3, 5, 7 et 9 avril
À la Salle Ludger-Duvernay du Monument-National
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