Pawa Up First : Cinéma muet
Pawa Up First, à cheval entre les grands espaces post-rock et l’agilité électro-jazz, revient hanter Montréal deux soirs plutôt qu’un. Rencontre au beau milieu des arbres et des mouettes.
Le jour de l’entrevue, Serge Nakauchi Pelletier, meneur de Pawa Up First, filmait des arbres sur le mont Royal et quelques mouettes chialaient autour de lui. "C’est pour notre spectacle du 7 avril au Va-et Vient. On utilise les vidéos davantage comme un éclairage, comme une alternative aux spots rouges, verts, jaunes que pour leur dimension cinématographique, en fait. Ensuite, les images sont traitées et l’on privilégie l’abstraction."
Aperçu notamment en première partie de Malajube en février dernier, Pawa Up First (PUF) a démontré qu’il peut tout aussi bien partager la scène avec des copains d’étiquette (Dare To Care) en général plus sombres que lui qu’avec des acteurs importants de la scène électro-jazz, comme Plaster (dont il assure la première partie ce jeudi 6 avril au Théâtre National), aRTIST oF tHE yEAR, aKido ou encore Kobayashi.
À l’écoute de The Scenario (2005), premier album complet du quintette qui était au départ le projet-studio de Serge Nakauchi Pelletier et de Mathieu Pontbriand (tous deux anciennement du groupe punk rock Men O Steel), le réflexe qui nous vient est, tout d’abord, de s’abandonner à ces paysages sonores invitants, de s’y laisser emmener en n’opposant aucune résistance. Car on peut s’y rendre comme dans une forêt sans prédateurs, comme dans des univers post-rock dépourvus de lourdeur. Si d’autres formations montréalaises oeuvrant dans cette zone aux limites incertaines nous viennent d’abord à l’esprit (Below the Sea, Destroyalldreamers, With All Due Respect), force est d’admettre qu’il y a chez PUF une dimension qui allège l’ensemble, un côté expérimental que l’on retrouve dans le free jazz, une touche plus lumineuse introduite ici et là par la trompette et un intérêt manifeste pour Ennio Morricone et Philippe Glass. "Je suis content que les gens nous perçoivent ainsi. Le côté sombre ne fait pas partie de nos personnalités, on n’essaie pas de jouer les mystérieux."
Et cette ouverture, qualité qui les rend aussi poreux, donne lieu à des associations inattendues, comme la rencontre, parfois, le temps d’une toune, avec le doué rappeur montréalais Séba (MC BrutaLLL, Gatineau). "Ces temps-ci dans mon iPod, j’écoute du rap, et d’ailleurs je fignole des beats pour quelques rappeurs locaux. C’est quelque chose que je perfectionne et que j’aimerais pousser. Notre prochain album, qui risque fort de paraître à l’automne prochain, est en continuité avec The Scenario, mais c’est plus varié au niveau des dynamiques. Il y a d’ailleurs du vocal sur 40 % du disque, mais la voix utilisée comme un instrument, sous la forme de collaborations avec des MC dont je préfère toutefois taire le nom pour l’instant…"
L’aventure Pawa Up est née dans un studio-maison en 2001. "Au moment de l’enregistrement de l’album, il n’était même pas encore question de faire des shows… J’avais un petit échantillonnage sonore qui venait d’un dessin animé japonais et "Pawa Up", c’était le slogan d’un des personnages, précise l’ancien étudiant en dessin animé. Chaque fois qu’il le prononce, ça lui donne un petit boost, c’est un truc positif, un peu comme dire: "Let’s go"."
Le groupe s’est soudé depuis ses débuts, rapatriant officiellement dans ses rangs Joseph Perreault (batterie), présent sur le disque et qu’on a vu aux côtés de Béluga au cours de la dernière année, Julien Sagot (percussionniste inspiré de Karkwa et narrateur de l’intéressante Pili-Pili dudit groupe) et Christian Baang (piano, synthétiseur). "C’est un pianiste de concert qui agit désormais comme deuxième cerveau dans le band, pour l’écriture. On compose à deux, alors ça change un peu la dynamique… On monte les pièces ensemble et ensuite on arrive au local et on les arrange avec les autres. C’est pas toujours facile, on a une relation amour-haine, mais ça fonctionne au plan créatif. Bien sûr, le passage du studio-maison au travail de groupe a été un peu ardu pour moi… Mais j’essaie de m’ouvrir et d’être réceptif et en bout de ligne ça vaut vraiment le coup."
Le 6 avril
En première partie des excellents Plaster
Au Théâtre National
Le 7 avril
Au Va-et-Vient
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