Ladytron : Je t'aime, mélancolie
Musique

Ladytron : Je t’aime, mélancolie

Ladytron fait preuve d’un regain de vie insoupçonné et prouve qu’il n’était pas qu’un one-hit wonder de la vague électro-clash. De passage dans la Métropole, le quatuor défendra les titres de Witching Hour.

Pour l’amateur, l’attente fut longue. Trois ans après la parution de l’inégal mais ludique Light and Magic, le quatuor mixte de Liverpool publie l’une des belles surprises musicales de l’année 2005 avec Witching Hour, un troisième opus studio métissé et ténébreux, moins attaché à l’électro-pop eighties de ses prédécesseurs et mariant avec efficacité guitares féroces et nappes de synthés voluptueuses. "J’ai l’impression que plus on vieillit, plus on devient misérable!", raconte Mira Aroyo, guitariste et chanteuse, à l’autre bout du fil. À la base, adopter cette tangente était loin d’être évident. On désirait lancer un disque plus luxuriant et mordant, mais pas nécessairement plus rock. À mon avis, c’est un album varié et complet, en plus d’être notre favori à nous tous", poursuit-elle fièrement.

C’est en partie un fâcheux problème contractuel avec l’ancien label du groupe en Angleterre (Telstar) qui explique l’arrivée tardive de Witching Hour dans les bacs des disquaires l’automne dernier. "Essentiellement, l’album était prêt depuis l’été 2004 et beaucoup de trucs étaient écrits bien avant ça. Par exemple, Destroy Everything You Touch est née en 93! Nous étions à la recherche d’une compagnie de disques et nous avons dû attendre une rentrée d’argent pour terminer le mixage", explique Aroyo.

Moins délibérément trafiquées, les voix sur Witching Hour laissent enfin respirer les textes (parfois sibyllins) du groupe, même si la participation d’Aroyo semble éclipsée par celle de sa consoeur Helena Marnie. "La façon dont ma voix est traitée sur cet album laisse croire que je suis moins présente mais en réalité, il n’en est rien. Il s’agissait de combiner efficacement le contraste des deux voix féminines et on désirait donner un aspect plus serein et naturel à l’ensemble", précise-t-elle.

Avec un nom qui fait référence aux légendaires Roxy Music (même la pochette de leur album de mix Softcore Jukebox se voulait un clin d’oeil à Country Life de Roxy), Ladytron n’a jamais renié ses origines glam. Surfant sur la précaire et très "hypée" vague électro-clash (terme créé de toutes pièces par le célébrissime Larry Tee lors d’un festival new-yorkais), Ladytron n’a pourtant pas désiré être affilié au mouvement. "C’est tout simplement la mode qui est entrée en ligne de compte et on a choisi d’apposer une étiquette sur un courant, mais en réalité, on s’est servi du terme électro-clash comme d’un fourre-tout. Aujourd’hui encore, il y a beaucoup de groupes, comme les Killers, qui rêvent de faire partie de ce mouvement, mais ce n’est que de la poudre aux yeux", explique-t-elle.

Ayant recruté un batteur et un bassiste (comme lors de sa tournée précédente pour l’album Light and Magic) et délaissant la naïveté de ses débuts pour gagner des points en matière de sophistication, Ladytron promet de surprendre ses fans lors de sa prochaine série de spectacles. "Ce sera plus corrosif et cru. La plupart des spectacles que je vois m’ennuient terriblement. Regarder jouer trois ou quatre musiciens immobiles pendant une heure sans qu’il ne se passe rien de spécial, ce n’est vraiment pas mon truc. On veut accrocher l’oeil avec des effets visuels même si notre show ressemble davantage à celui d’un groupe indie qu’à un spectacle multimédia ou de danse. De plus, tout est joué en direct. On s’éloigne donc des sillons tracés par la plupart des artistes électro de masse", raconte la Londonienne, fan finie de gros rock.

Disc-jockeys à leurs heures, tous les membres de Ladytron continuent de trimbaler leurs vinyles à travers le globe à la recherche de nouveaux mandats. De passage dans la métropole en octobre dernier, Maya et son acolyte Reuben Wu firent tourner les platines (et quelques têtes) lors d’une visite éclair au Club Soda pour un set de D.J. dynamique et éclaté, basé sur les chansons plutôt que sur les beats. Mira raconte: "Tu sais, j’aime autant The Presets que Vitalic ou Cababet Voltaire, mais il n’y a rien comme I Was Made For Loving You de Kiss pour mettre le feu au plancher de danse! J’avoue qu’il m’arrive parfois d’être mélancolique." Avouons-le sans ambages, sur Witching Hour la mélancolie n’a jamais aussi bien sonné pour Ladytron.

Le 19 avril
Au Club Soda
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