Spank Rock : On veut du rock!
Le duo Spank Rock donne un second souffle au hip-hop américain sur son premier album en y injectant une bonne dose d’audace et d’ingéniosité. Rencontre.
Attrapé au vol entre deux concerts en terre japonaise, Alex Epton (mieux connu sous le pseudonyme d’Armani XXXchange, producteur et petit whizz de studio du duo de Baltimore Spank Rock) fait la lecture de son agenda. "Tu sais, on court comme des fous, on répond aux questions des journalistes, on mange du sushi et, essentiellement, on profite le plus possible de notre séjour dans l’Est", raconte-t-il avec entrain.
Celui qui prétend n’avoir jamais fait partie de la scène musicale de Baltimore a fréquenté le New England Conservatory de Boston où il échoua lamentablement avant de tenter sa chance dans une réputée université new-yorkaise (le NYU), où il fera ses premières expériences en studio. "C’est là que j’ai tout appris sur la programmation", lance-t-il. Puis, par l’intermédiaire d’amis mutuels, il fait la connaissance de Naeem Juwan, alias MC Spank Rock, inconditionnel de Bowie (!) à la voix nasillarde se situant quelque part entre Flava Flav et Q-Tip: "À l’époque, chacun de nous produisait de la musique, mais l’un se cherchait un MC et l’autre un producteur. Alors, c’était tout naturel de collaborer ensemble et regarde ce que ça a donné!"
Après avoir fait paraître une poignée de mixtapes et de 12 pouces, le duo échafaude de nouveaux morceaux pendant un an et demi et accouche de Yoyoyoyoyo. Véritable vent de fraîcheur dans l’univers placide du hip-hop moderne, ce premier compact sous la houlette de Big Dada amalgame élans grime, funky, dub, hip-hop, électro eighties, doo-wop, quelques inflexions robotico-latines et des textes comiques, libidineux et crus à la 2 Live Crew. "C’est drôle, n’est-ce pas, qu’humour et sexe se marient aussi bien?", rigole le jeune producteur de 23 ans. Musicalement, la scène hip-hop américaine est parfois une énorme inspiration pour nous et d’autres fois, elle devient source de frustration. On dirait qu’elle reste encore trop souvent coincée dans les même idées. Mais on respecte cette musique. Tout ce que l’on souhaite, c’est d’amener quelque chose d’excitant", poursuit-il.
Excitant, l’album l’est. Éclectique et ambitieux, l’opus propose une série de beats nerveux et lascifs, des échos de Paul’s Boutique (l’énigmatique album concept des Beastie Boys) et même de la star du grime Dizzee Rascal. Refusant tout compromis, le duo brise les règles du hip-hop conventionnel pour un résultat la fois old-school et avant-gardiste, traversé par une avalanche d’effets sonores qu’on croirait sortis d’une vieille console Coleco Vision. "J’adore les jeux vidéo et je suis un avide gamer. Lorsque je suis sur la route, mon Nintendo me tient compagnie et me garde en vie! C’est un fait, j’affectionne ces sons à la fois bizarres et diablement cool."
Ayant récemment accompagné la Sri-Lankaise M.I.A. lors du dernier droit de sa tournée à travers l’Amérique du Nord, la bande passera les deux prochains mois sur la route. Alors, pour le néophyte, ça ressemble à quoi un spectacle de Spank Rock? "Tu sais, je crois qu’on se pose nous-mêmes la question! On tente d’allumer la foule, d’amener une vibe de party. Ce que l’on souhaite essentiellement, c’est semer la confusion chez le public lorsqu’on quitte la scène et l’amener à se demander pourquoi il en veut davantage!" Bonbon pour oreilles aventureuses, Spank Rock n’a pas fini d’étonner.
Le 13 avril
Au Main Hall
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