Lofofora : Les mots qui cognent
Lofofora attire depuis quelques années un nouveau public, plus jeune. Il est loin de s’en plaindre, car ce sont eux qui mettent de l’ambiance dans un concert, et puis, ça veut dire qu’ils n’ont pas tous succombé à la musique préfabriquée.
"On a remarqué en France qu’un nouveau public rock s’est formé au cours des dernières années. Vers la fin des années 90, les jeunes semblaient davantage attirés par le hip-hop et l’électro. Certains groupes dénigrent le fait de jouer devant des adolescents, alors que moi, mon premier concert, je l’ai vu à 12 ans. Je suis plutôt fier d’attirer des jeunes, car ils sont plus vivants dans le "pit". C’est pas les mecs de 40 ans qui mettent l’ambiance dans une salle!" constate Reuno, le chanteur et cofondateur du quatuor punk-hardcore-métal français.
Selon lui, la popularité des émissions comme Star Académie, avec ses stars préfabriquées, a eu un immense impact sur l’industrie de la musique. C’est donc un plaisir pour le groupe à l’esprit revendicateur de constater que toute la jeunesse française n’a pas été happée par la vague.
Depuis sa formation en 1989, Lofofora dénonce avec vigueur la bêtise sociale. Même s’il n’est pas sur le point de raccrocher son micro et de cesser de remettre en question ce qui lui déplaît, Reuno avoue que même revendicatrice, la musique du groupe reste du rock: "Je ne me leurre pas. Si j’avais voulu changer les choses de manière signifiante, je me serais engagé dans une carrière politique. N’empêche qu’en quelques années de route, j’ai reçu des messages encourageants. Comme celui d’un jeune qui voulait devenir un skinhead fasciste, et qui, en lisant mes textes, a compris qu’il allait faire une belle connerie. Internet permet d’entretenir un bel échange avec les fans, et c’est ainsi qu’on constate que ce qu’on écrit a un impact", affirme le chanteur.
Il tient cependant à préciser que le but premier de Lofofora est de divertir: "Le vrai truc, c’est quand le public ressort de la salle le sourire aux lèvres. Je n’ai pas la prétention de changer la politique française, qui, de toute façon, ne fait qu’empirer en calquant le modèle américain. Brandir des épouvantails pour rendre les gens paranoïaques et ainsi mieux les contenir, ça marche très bien ici aussi", déplore-t-il. Selon lui, même les politiciens bien intentionnés ne parviennent pas à changer le monde: "Alors, tu vois, ce n’est pas moi qui pourrait y parvenir avec mon petit groupe", s’exclame le chanteur de la formation, complétée par Phil, bassiste et second membre fondateur, Daniel, guitariste, et Pierre, batteur.
Comme le disait Reuno, le groupe Lofofora n’a pas pour seul objectif de dénoncer ce qui le dérange. Il souhaite aussi se payer du bon temps, notamment par l’intermédiaire de chansons comme Rock’n’Roll Class Affair, un morceau rap-rock qui détonne sur Les choses qui nous dérangent et qui n’a pas manqué de choquer les fans du groupe: "Avec cette chanson, on renoue avec les pulsions premières qui ont fait de nous des rockeurs. Elle traduit une sorte de fougue adolescente, pas toujours très réfléchie, mais toujours très sincère. Rock’n’Roll Class Affair, c’est un clin d’oeil au rock super calibré qu’on entend à la radio", soutient Reuno. Et que les fans se rassurent, Lofofora ne la joue pas en concert.
Le 3 mai
Au Café du Palais
avec Arseniq 33 et Wolfunkind
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