Philippe Flahaut : No Land's Man
Musique

Philippe Flahaut : No Land’s Man

Difficile à cerner, ce Philippe Flahaut. Bluesman ou chansonnier, Français ou Torontois, à vous de choisir. Portrait de cet intrigant artisan de la chanson au parcours singulier et à la plume dégourdie.

Au cours des années 80, Philippe Flahaut jouait les guitaristes blues en toute quiétude au sein de Shakin’ Blues, une formation anglophone de la région parisienne. Mais son coeur bascula pour celle qui allait devenir sa femme, originaire de Kitchener en Ontario. Peu après, le voilà qui débarque à Toronto, où il fait désormais le chien dans un jeu de quilles depuis une quinzaine d’années. "En fin de compte, je suis une espèce de personne bizarre. Je ne suis plus vraiment un Français; ça fait si longtemps que je n’habite plus en France. Je suis donc un homme sans pays, sans le vouloir. Ou encore un homme avec deux pays…" me raconte-t-il en rigolant, tout en précisant qu’il "ne s’en rend plus compte". C’est pourtant en se retrouvant en terrain inconnu qu’il s’est découvert, il y a de cela plusieurs années, la vocation d’auteur-compositeur. "En me retrouvant tout seul, comme un étranger, je me suis demandé: "Qu’est-ce que je fais? Qu’est-ce que je suis capable de faire? Je ne connais personne." Alors je me suis dit qu’il fallait que j’écrive des chansons et que je les présente aux gens."

Trop jazzy pour être un nouveau Brassens, trop fin raconteur pour être jazzman, Flahaut s’est taillé un style d’écriture bien particulier. Et une passion pour sa langue dont il ne soupçonnait pas l’ampleur avant son arrivée en terre anglophone s’est révélée à lui. "Il y a beaucoup de Français qui se ramassent ici, à Toronto. C’est pour le boulot, alors l’identité francophone est moins importante pour eux. Ils ont du mal à s’intégrer à la francophonie canadienne. Mais moi, comme artiste, c’est quand j’ai commencé à maîtriser l’anglais que je me suis rendu compte que le français, c’était ma langue."

D’abord récompensé en 1997 par un prix de la SOCAN pour sa chanson Du café dans ma tasse, il poursuit en 1999 avec son premier album, Le Chien – inspiré par sa chienne, qui interrompt d’ailleurs l’entrevue à trois reprises et que Flahaut lui-même qualifie de "dictatrice" -, qui lui vaut un Prix Trille Or. Sept ans plus tard, il nous présente un troisième album, empreint d’une loquacité captivante et surtout, d’une curiosité sans borne. Flahaut se questionne sur tout et son contraire: des astres aux objets perdus, en passant par les sportifs et les dragueurs de mines. "Je suis en effet d’un naturel curieux. C’est important d’aller voir plus loin, de chercher les causes", m’explique-t-il tout en prenant conscience de ce qu’il avance. "Et en fait, je trouve des réponses que j’invente, au fond, pour créer des histoires."

Le 12 mai, ce soi-disant "travailleur autonome de la chanson" lance officiellement sa troisième galette à la Quatrième Salle du CNA, un endroit qu’il affectionne particulièrement. "C’est superbe pour le genre de spectacle que l’on fait parce que les gens sont à portée de main. La barre est haute. La dernière fois qu’on a joué dans cette salle, c’était très intime, les gens étaient très réceptifs. J’étais bouleversé." Voyons si l’expérience sera à la hauteur des attentes, d’un côté comme de l’autre.

Le 12 mai à 20h
À la Quatrième Salle du CNA

Philippe Flahaut
Philippe Flahaut
Indépendant