FIMAV : Détournement majeur
Trey Gunn n’a pas quitté les expérimentations débridées de King Crimson pour s’assagir, bien au contraire, et il le prouve au FIMAV avec un nouveau projet d’enfer.
Le Festival international de musique actuelle de Victoriaville nous offre chaque année l’occasion de découvrir de nouveaux musiciens ou des artistes que l’on connaît déjà, mais qui se présentent dans un contexte inédit. C’est le cas avec Trey Gunn, un guitariste d’un type assez particulier (il joue d’une Warr Guitar digitale à 10 cordes), que l’on a connu avec le groupe de rock exponentiel King Crimson, mais que l’on retrouvera à Victo au sein de KTU. Avec lui, le batteur Pat Mastelotto (avec qui il forme le duo TU), l’accordéoniste extraordinaire Kimmo Pohjonen et le comparse de ce dernier au sein du duo Kluster, le percussionniste électronique Samuli Kosminen. Un beau coup pour le FIMAV.
Arrivé au sein de King Crimson en 1994, à l’époque du double trio de l’album THRAK, Trey Gunn a choisi de s’en retirer en 2003. "C’est un groupe qui fonctionne par phases, explique Gunn, et il me semblait que l’on arrivait à la fin d’une de ces phases; j’avais l’impression d’avoir fait tout ce que j’avais à y faire…" C’est à la suite d’un concert de ProjeKCt Three (une division "recherche et développement" de King Crimson), alors que le groupe avait partagé la scène avec Pohjonen, que l’idée d’une collaboration a commencé à germer.
"C’est Pat, une véritable force de la nature en matière d’accumulation de projets, qui voulait que je me joigne à lui et à Kimmo pour faire quelque chose; avec toutes nos diverses occupations, finalement, ça a pris cinq ans avant qu’il se passe quelque chose. Au début, nous faisions surtout de l’improvisation, ce qui nous sauvait quand même d’avoir à longuement répéter… Mais nous avons commencé à composer de plus en plus. C’est un groupe qui a un son très spécial!" En effet, l’électronique a une place importante dans l’attirail de ces quatre mousquetaires… qui sont cinq! Il y a effectivement un cinquième joueur au milieu de la salle, à la console, Heikki Iso-Ahola, qui manipule le son manière surround. "Malheureusement, je ne l’entend jamais celui-là, puisque je suis sur la scène! Mais j’ai quand même pu entendre un peu ce qu’il fait durant les prises de son et ça ajoute certainement une dimension intéressante."
Ceux qui ont déjà vu ou entendu Kimmo Pohjonen savent qu’il ne s’agit pas vraiment d’accordéon musette, mais plutôt d’un véritable feu d’artifice high-tech. Avec Kosminen, qui échantillonne l’instrument et la voix de Pohjonen et les utilise pour fabriquer des rythmes que Mastelotto malaxe à son tour, et Gunn qui joue de sa drôle de guitare comme d’un piano (la basse d’une main, le solo de l’autre) le résultat est pour le moins étonnant! "Pour nous c’est assez amusant, parce qu’il n’est pas toujours facile pour le public de savoir qui fait quoi… Je sais que ça peut frustrer une partie des gens, mais bon, c’est un peu le futur de la musique…" Et une fois de plus, le futur passe par Victo…
Le19 mai, 22 h
Au Colisée des Bois-Francs
FIMAV: MENU VARIÉ!
Du trio vocal a cappella des Charming Hostess, en ouverture, au tour du chapeau de Mike Patton (Mr. Bungle, Fantômas), avec trois duos très différents, le 23e FIMAV réserve une place spéciale à la voix, mais garde aussi de l’espace pour le rock (Étage 34, de France), le noise (Borbetomagus, des États-Unis, avec les Japonais de Hijokaidan; Fe-Mail, de Norvège) et, bien sûr, un brin de jazz (Fieldwork de NY; Huntsville de Norvège, le quatuor de la pianiste japonaise Satoko Fujii), tout ça traversé par l’improvisation (le trio du Montréalais Antoine Berthiaume, avec Quentin Sirjacq et Norman Teale; les États-Uniens de Mandarin Movie). En tout, 26 concerts qui forment apparemment l’une des programmations les plus variées depuis longtemps. Ça vaut le détour. Du 18 au 22 mai, www.fimav.qc.ca.