Charlemagne Palestine : Sacré Charlemagne!
Charlemagne Palestine, précurseur avec LaMonte Young, Terry Riley et autres Steve Reich d’une musique dite "minimaliste", repasse par Montréal. Il y a 20 ans qu’on l’avait vu…
Compositeur méconnu de la branche underground du milieu de la musique contemporaine américaine des années 70 (les Glass, Riley, Reich, Young, etc.), Charlemagne Palestine peut sans contredit être considéré comme un précurseur du phénomène de transe que l’on associe aux soirées raves, bien que sa musique se passe complètement du décervelant boum-boum de celles-ci. Le compositeur explore depuis les années 60 les drones, ou bourdons, répétant inlassablement certaines figures rythmiques sur un piano, par exemple, tout en tenant enfoncée la pédale forte afin de faire naître un bourdonnement harmonique (Palestine joue sur un piano Bösendorfer, choisi pour son octave supplémentaire dans les basses). Cette fois-ci, c’est à l’orgue que nous l’entendrons, et ce sera sur l’Opus 902 que les frères Casavant ont installé à l’église Saint-Jean-Baptiste en 1921 (et qui fut heureusement restauré en 1976).
Le compositeur a l’habitude des lieux sacrés, d’abord parce que c’est surtout là que l’on trouve les orgues, mais aussi pour avoir chanté durant plusieurs années, enfant, dans une synagogue de son Brooklyn natal, avant d’occuper le poste de carillonneur à l’église Saint-Thomas, à deux pas du Musée d’art moderne de New York. Joint en Belgique, où il réside dorénavant, et s’exprimant d’ailleurs dans un français très correct, le compositeur espère que les amateurs ne se retiendront pas de devoir pénétrer dans une église pour l’entendre: "On sait bien que c’est pour des raisons sociologiques et politiques que les meilleures orgues sont dans des églises… Ma performance durera approximativement deux heures et se déroulera dans une atmosphère sacrée, mais sans aucun rapport à quelque secte que ce soit!"
Palestine, qui est aussi un artiste visuel, a réglé le problème religieux il y a longtemps en adoptant une religion animiste dont les dieux sont des animaux… en peluche! Il éclate de rire: "Oui, j’ai ma propre tribu, et c’est très intégré dans toute ma vie quotidienne, avec ma femme et mes amis, depuis plus de 40 ans! Ça fait partie d’une oeuvre d’art total. J’arrive à ne présenter qu’un aspect à la fois, mais je préfère garder ensemble l’audio, le visuel et le rituel; c’est une façon de faire qui est millénaire!"
Rendu "célèbre", à une certaine échelle, par des performances au piano desquelles il sortait après plusieurs heures avec les mains ensanglantées, Palestine fait-il vraiment de la musique minimaliste? "C’est un peu le verre à moitié plein et le verre à moitié vide… Certains parlent de musique maximaliste!" L’oeuvre qu’il interprétera ici, Schlingen Blängen: Une ascension pour Shirley Lipschitz 1912-2006, est dédiée à sa mère, décédée tout récemment. "Nous étions venus ensemble à Montréal il y a 20 ans, alors que je participais au 20e anniversaire de la Galerie Graff. C’était une femme solide, féministe, qui défendait les droits des ouvriers, et c’est bien que je puisse lui rendre hommage chez vous à cette occasion."
Le 12 juin
À l’église Saint-Jean-Baptiste
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