A Chair in Love : Scènes de ménage
A Chair in Love, ou l’opéra mené en des zones fort étranges par Larry Tremblay et John Metcalf.
Le public doit être prêt à tout lorsqu’il accepte de croire à l’histoire de personnages qui évoluent en chantant dans des décors de carton-pâte. Alors, pourquoi ne pas étirer au maximum cette convention? On peut certainement se demander où Larry Tremblay est allé puiser son inspiration pour écrire l’histoire d’un cinéaste qui tombe amoureux d’une chaise et dont le fidèle compagnon doit recourir à un "médechien" pour atténuer ses angoisses liées à la jalousie… Quoi qu’il en soit, l’auteur a eu la chance d’être accompagné dans son délire par un compositeur complice, un metteur en scène inventif, des musiciens aventuriers et des chanteurs qui n’ont pas froid aux yeux!
Le compositeur, John Metcalf, devait écrire pour une formation assez particulière, soit l’ensemble Pentaèdre, un quintette d’instruments à vent. Sa partition, vive et enjouée, colle parfaitement à ce texte qui se moque gentiment de l’opéra traditionnel en exploitant une situation parfaitement absurde sur un mode tout à fait sérieux. Les membres de Pentaèdre, qui interprètent ce qui est sans doute l’une des oeuvres les plus longues écrites pour ce type de formation, participent également à l’action en se déplaçant sur scène, mobilité qui confère à la musique un relief intéressant.
Le baryton Pierre-Étienne Bergeron est brillant dans le rôle de Truman (le cinéaste), un personnage pour lequel le librettiste a écrit quelques-unes de ses meilleures lignes ("Je me sens comme un avion prêt à lâcher des tonnes de bombes de joie!"). Le personnage d’Isabelle (… la chaise) est un peu plus effacé, mais Charlotte Ellett réussit à le rendre attachant. N’empêche, on aurait aimé voir l’expression de la soprano, le jour où on lui a offert le rôle! La mezzo Fides Krucker, que l’on connaissait pour certains rôles dramatiques (voire très dramatiques, comme dans L’Archange, de Louis Dufort et Alexis Nouss), est particulièrement amusante dans le rôle du médechien. La basse Michael Douglas Jones campe quant à lui un chien (!) tout à fait sympathique. En bref, A Chair in Love est un opéra léger, une mécanique bien huilée dont toutes les pièces sont à leur place, et on ressort de la représentation avec le sourire. Et puis, à la fin, personne ne meurt et l’amour triomphe!
Au théâtre Espace Go
Jusqu’au 18 juin
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