Karkwa : Le Coup d'éclat
Musique

Karkwa : Le Coup d’éclat

Karkwa vient présenter la version scénique des Tremblements s’immobilisent, un deuxième album venu confirmer l’immense potentiel du groupe qui s’est mérité le prix Félix-Leclerc de la chanson 2006. Rencontre avec des musiciens qui ont décoché quelques flèches avant de viser dans le mille.

Lancé à l’automne 2005, l’album Les tremblements s’immobilisent a rallié les critiques, séduits par sa poésie efficace et ébahis par la richesse de son rock atmosphérique. Le disque représente une surprenante évolution par rapport au Pensionnat des établis, un premier album disparate créé par de jeunes musiciens de talent, mais visiblement en quête d’un son.

Que s’est-il donc passé entre les deux albums pour que la formation parcoure autant de chemin? "On a appris à se connaître", observent le batteur, Stéphane Bergeron, 26 ans, et le chanteur et guitariste Louis-Jean Cormier, 25 ans. Depuis le premier album, le groupe a donné beaucoup de spectacles. À force de jouer ensemble, d’explorer et d’écouter toujours plus de musique, les musiciens en sont venus à trouver un style. "On est tous des mélomanes, observe Stéphane. Tu découvres toujours des nouvelles affaires. Tes goûts changent."

À travers des sujets sombres comme la fuite d’un homme qui vient d’assassiner un président ou le mal de vivre d’un adolescent ayant commis une tuerie dans une école, Karkwa s’est décidé à parler d’amour. Un sujet qu’il avait soigneusement contourné dans son premier essai. "En vieillissant, tu te rends compte que tu peux pas passer à côté de cette patente-là", lance Stéphane. Le défi que les gars s’étaient donné: parler d’amour sans tomber dans la facilité et le sirupeux. "Éviter le quétaine, c’est un défi de tous les jours", observe Stéphane, qui avoue une paranoïa envers la chose.

"Avec le deuxième album, Karkwa s’est découvert une personnalité", poursuit Louis-Jean. Personnalité qu’on a beaucoup comparée à celle de Radiohead, flatteuse comparaison s’il en est. Pourtant, à la création des Tremblements s’immobilisent, les CD du band britannique ne jouaient plus dans le lecteur depuis un moment. "Quand t’es un fan de Radiohead, tu sais que ça ressemble pas tant que ça", considère Louis-Jean, dont les inflexions de voix s’apparentent pourtant bien à celles de Thom Yorke. Les gars déballent alors un paquet d’influences, citant au passage Neil Young et Eleni Mandell. Le rock planant de Karkwa s’est défini à partir de tous ces artistes admirés.

Principal parolier du groupe, Louis-Jean Cormier avoue baigner dans la chanson francophone depuis son tout jeune âge. Ses textes sont souvent influencés par la plume du percussionniste Julien Sagot, qui signe la drolatique Pili-pili. "On tord un peu nos images", illustre Louis-Jean, le regard d’un vert perçant planté droit dans les yeux de son interlocutrice.

Devant un résultat si abouti, on s’étonne d’avoir affaire à de si jeunes hommes. Musiciens accomplis, âgés dans la mi-vingtaine, les membres de Karkwa participent presque tous à d’autres projets de musique. Louis-Jean est guitariste pour Vincent Vallières, avec qui il s’apprête à entrer en studio. Il a aussi accompagné Chloé Sainte-Marie et Dumas. Julien Sagot fait partie de Pawa Up First… Mais avec le succès qui se dessine pour Karkwa, ils ont de moins en moins de temps à consacrer aux autres projets.

ÇA PLANE POUR EUX

Porté par une rumeur favorable, le disque Les tremblements s’immobilisent se laisse découvrir par des fans de plus en plus nombreux. "On en a déjà vendu plus que du premier en deux ans! fait remarquer Louis-Jean. On est choyés. On a reçu une belle couverture. De se faire encenser comme ça, on est vraiment contents." Le deuxième extrait, Le Coup d’État, puissante pièce où une relation amoureuse orageuse est décrite à travers un champ lexical s’apparentant à un champ de mines, présente un argument de taille pour conquérir d’autres oreilles. La chanson se fait d’ailleurs entendre sur les ondes de radios commerciales et a inspiré un clip, tourné dans une mine d’or abitibienne, 350 mètres sous terre.

En spectacle, Karkwa a fait appel à l’éclairagiste Mathieu Roy, que Louis-Jean et Stéphane décrivent comme un jeune homme très créatif. Sous ses projecteurs, la musique de Karkwa s’illumine et se laisse accompagner de projections vidéo, dont la présence discrète vient sans doute ajouter ce petit quelque chose qui a fait dire à Sylvain Cormier, critique au Devoir, que d’assister à un show de Karkwa s’apparentait à "un trip d’acide sans drogue".

POUR LA SUITE

Quelques spectacles sont prévus cet été pour Karkwa, et des festivals ainsi qu’une tournée en Europe sont à l’agenda. À la mi-juillet, les membres du groupe sauteront dans l’avion pour se rendre aux FrancoFolies de Spa en Belgique et aux Vieilles Charrues, un festival breton attirant des milliers de spectateurs. Le groupe en sera à sa deuxième incursion en sol européen puisqu’en 1999, il s’était fait offrir une tournée en France grâce à Cégeps en spectacle. La véritable tournée de salles au Québec est prévue pour l’automne. C’est qu’Audiogram, la maison de disques qui a pris Karkwa sous son aile, voit à long terme pour ses protégés. Eux aussi.

À travers les spectacles, de nouvelles chansons sont déjà en chantier. Le défi qu’a le goût de relever Cormier cette fois-ci, c’est celui d’arriver à se laisser inspirer par la joie. "Quand c’est deep, on dirait que c’est plus facile de ne pas être quétaine." Encore cette crainte et ces doutes, tellement injustifiés. N’empêche qu’avec une telle réception de son deuxième album, le band se sent plus libre de créer. "On dirait qu’il y a moins de fardeau sur nos épaules. L’album a été bien reçu. Ça nous soulage. Ça nous donne une confiance."

Le 30 juin à 22h
Sous le chapiteau Desjardins –
À Saint-André-Avellin
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MUSIQU’EN NOUS: TOUR DE PISTE

Ève Cournoyer
photo: Sylvain Dumais

Du 28 juin au 2 juillet, la jolie municipalité de Saint-André-Avellin dans la Petite-Nation s’animera au rythme du festival Musiqu’en nous, qui propose une programmation musclée! Le Franco-Ontarien bizarroïde Damien Robitaille brise la glace le mercredi à 22h, précédé à 19h30 de la Soirée Coups d’coeur MEN, consacrée à la relève musicale. Le jeudi, Philippe B se met à l’avant-scène dès 17h30, suivi du blues des Guy Bélanger et Paul Deslauriers à 18h30. Suivront, sous les chapiteaux, la grandiose Chloé Sainte-Marie à 20h et la rockeuse tendre Ève Cournoyer à 22h. Le vendredi sera amorcé par la musique gitane d’Oztara à 18h30, le duo féminin DobaCaracol poursuit à 20h, alors que la soirée sera couronnée par Karkwa à 22h. Philippe B se redonnera ensuite en spectacle sur la scène du Bar La Licorne à 23h. La journée de samedi débute dès 11h avec le spectacle Boum Tchi-Ka de CréaSon et de ses instruments à percussion inventés. À 17h30, les chansons joyeuses de Sylvie Laliberté égayeront les festivaliers, suivies de celles de Guy-Philippe Wells à 18h30, alors que les chapiteaux seront occupés en soirée par le fidèle Pierre Lapointe à 20h30 et le chanteur franco-texan Thomas Hellman à 22h. Finalement, la journée de dimanche débute par un brunch dès 11h avec la musique swing gitane du Hot Club de ma rue. À 13h30, c’est au tour des musiciens locaux des Têtes à Papineau avec leur intello-trad. En soirée, dès 20h, le coloré Jamil livrera son parlé-chanté à la poésie mordante, lui qui est aussi coiffé du titre de porte-parole de l’événement cette année. Tous les spectacles présentés en après-midi à l’Agora Loto-Québec et à 22h sous le Chapiteau Desjardins sont gratuits. Renseignements: www.musiquenous.com. (M.Proulx)