Youssou N’Dour : L’Homme phare
Youssou N’Dour visite le Québec avec des prestations éclatantes et une démarche musicale toujours applaudie depuis bientôt 20 ans. La star africaine n’a pas pris une ride et son objectif est toujours le même.
Notre Sénégalais préféré a débarqué hier à Dorval et gageons qu’il n’y a pas eu le moindre incident diplomatique. Contrairement à son illustre compatriote Abou Diouf, ex-président de la république ouest-africaine, le chanteur originaire de Saint-Louis est un visage presque familier ici. Pourtant, il ne joue pas à la radio et Youssou n’a pas eu un hit depuis 7 Seconds, son célèbre duo avec Neneh Cherry, il y a 12 ans. N’empêche qu’il nous rend visite à intervalles réguliers, seul ou avec ses fidèles musiciens du Super Étoile de Dakar menés par l’éternel et sublime Habib Faye.
Après les FrancoFolies et le Festival de Jazz, une tournée québécoise sous l’égide de la francophonie et une prestation télévisée avec le Cirque du Soleil, il y a deux ans, il revient cette fois prêter main-forte à Nuits d’Afrique, à double titre de "performeur" et de parrain de la vingtième édition du festival. Cinq ans après son formidable concert grâce auquel l’organisation avait enfin rempli les trois mille places du Métropolis, l’homme n’a rien perdu de ses convictions. "Des actions comme celle-ci doivent continuer et prendre de l’ampleur, explique-t-il. Et les médias doivent absolument continuer à encourager les festivals spécialisés, car tant que des festivals de musique africaine auront lieu, l’Afrique sera représentée dans sa richesse musicale et sa diversité."
N’Dour est comme un phare. On entend moins parler de lui depuis quelque temps mais quand il n’est pas en tournée mondiale, Youssou vit à Dakar où il développe et enregistre de nouveaux talents dans son studio Xippi. Et quand il n’est pas en train de regarder les matchs de la Coupe du monde, vous pouvez être sûrs qu’il est en tournée locale ou bien en plein travail de création avec son équipe qui comprend aussi Michèle Lahanna, surnommée "la gazelle", une autre collaboratrice de longue date: "Je suis en train de terminer les maquettes de mon prochain album. En fait, j’ai écrit deux disques complets. L’un est très blues, avec une musique épurée, l’autre a une tendance reggae. Il est encore trop tôt pour décider lequel des deux j’enregistrerai en premier mais, en tout cas, j’espère une sortie pour mars prochain. Et je sortirai peut-être quelque chose à la rentrée pour faire la passerelle entre mon album Egypt et le prochain. On verra…"
Parlons-en d’Egypt! Un autre disque fabuleux qu’il a enregistré au Caire en 2004 avec le grand orchestre de Fathy Salama et qui met en lumière toute la beauté des traditions musulmanes et soufies. Rien à voir avec Eyes Open, Wommatt, Joko et Coono du Reer, ses formidables réussites précédentes, toutes tellement différentes. On dirait que chaque album de Youssou a son esthétique propre et englobe un concept, une nouvelle démarche musicale. Rien n’échappe à cet artiste qui repousse chaque fois ses limites avec de nouveaux défis. Parallèlement aux cassettes qu’il fait paraître exclusivement pour ses compatriotes, voici un artiste généreux et toujours ouvert qui semble particulièrement attentif et enthousiaste quand il s’agit des musiques de son pays.
"À Dakar, au niveau hip-hop, ça bouge vraiment beaucoup. Doug E Tee, ex-membre de Positive Black Soul, est numéro un chez les jeunes. La chanteuse TiTi marche aussi très bien, et la carrière de Viviane N’Dour a véritablement décollé maintenant. Il y a aussi la chanteuse malienne Rokia Traoré qui reste pour moi l’une des grandes valeurs sûres du continent. L’Ivoirien Tiken Jah Fakoly aussi. Ce sont des artistes que j’apprécie énormément car leur message humain est très, très fort… À surveiller aussi, l’arrivée du chanteur somalien K’Nann…"
Bien que doté d’une voix vraiment exceptionnelle, Youssou est beaucoup plus qu’un chanteur. Un créateur, un rassembleur, un ambassadeur de la culture africaine, un homme politique aussi, dans la mesure où il use de sa réputation pour s’engager dans des causes vitales sur le terrain comme cette opération "Roll Back Malaria", une immense organisation basée sur un concept d’entraide et de partenariat global pour enrayer le paludisme. L’année dernière au Sénégal, un méga-concert rassemblait autour de N’Dour toute une liste de vedettes internationales parmi lesquelles Corneille et Rokia Traoré, entre autres. Un superbe plateau d’artistes qu’on aimerait tellement voir se déplacer en Occident comme à l’époque de Human Rights Now, la tournée d’Amnistie Internationale défendue par Peter Gabriel, Sting, Tracy Chapman et Youssou, évidemment.
Le 13 juillet
Avec Dibondoko
Au Métropolis
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