Vincent Vallières : L’esprit tranquille
Vincent Vallières, après avoir trouvé sa place avec Chacun dans son espace, nous revient avec un nouveau disque, Le Repère tranquille, qui confirme que le meilleur était à venir.
Vincent Vallières
avoue se sentir fébrile au moment de notre rencontre au Café Lézard, un petit établissement du quartier Rosemont – où il habite – qui lui a inspiré l’une des plus belles chansons de l’album Le Repère tranquille. Comme il n’a pas encore fait écouter son nouvel opus à ses proches, la confiance et le doute se chamaillent en lui, mais la première tend à gagner la bataille. "Je suis content des choix que j’ai faits. Je les assume et j’ai envie de porter ce disque-là. De lui donner toutes les chances d’être entendu."
Vincent Vallières peut en effet dormir tranquille. Son nouvel album contient des chansons encore plus fortes, plus entraînantes et plus touchantes que sur Chacun dans son espace. À 28 ans, sa place semble désormais confirmée au rang des auteurs-compositeurs-interprètes déterminants de la jeune génération québécoise. Tantôt teinté de rock pesant (Tôt ou tard), tantôt de country (Le Bord de l’eau), l’univers folk du Repère tranquille est constitué de plusieurs pièces qui accrochent dès la première écoute et ne perdent pas de leur lustre au fil des auditions. On pense ici à Un quart de piasse, Café Lézard, Envie de rien faire, Je n’attends plus rien et la jolie pièce éponyme, une douce chanson d’amour inspirée par sa blonde, mais à laquelle s’identifieront sans doute bien des couples s’aimant encore après avoir traversé des moments difficiles.
L’album est habillé d’une jolie pochette aux tons de terre, où des silhouettes de cow-girls entourent l’insigne VALLIÈRES sur fond de tapisserie. Le CD en tant que tel prend l’allure d’un vinyle; une sorte d’hommage à la musique des années 60 et 70, qui a forgé l’univers musical de Vallières. "L’idée du vinyle est brûlée, je le sais, mais je m’en crissais. Je voulais le faire pareil", rigole-t-il. Dans les chansons, quelques-unes de ses références se glissent clairement, comme Bob Dylan et Johnny Cash. "Ce sont des artistes qui m’habitent pour vrai, depuis un bout de temps. Jusqu’à un certain point, c’est du monde qui font partie de ma vie."
LES ALLIÉS
Comme pour les deux précédents, la réalisation du CD a été confiée aux bons soins d’Éric Goulet, que Vincent Vallières décrit comme une véritable encyclopédie du rock. "Il est un allié de tous les instants dans le cheminement de la création d’un disque." À la première étape, Vallières lui joue ses chansons dans sa cuisine, et Goulet lui donne un coup de main pour les peaufiner et les arranger.
Un autre partenaire de Vallières, c’est Michel-Olivier Gasse, son bassiste et compagnon des premiers balbutiements musicaux. Une chanson, La Toune à Gasse, est même inspirée de lui. Malgré son titre, Vincent Vallières considère qu’elle brosse plutôt le portrait de sa gang de chums et de beaucoup d’autres jeunes dans la fin vingtaine. "Ils se laissent un peu aller dans le courant et profitent à fond des derniers relents de la vie post-adolescente, remarque-t-il. Si le personnage de la toune est encore là dans 15 ans, il va me décevoir."
Des personnages, l’album en regorge: Rachelle – la fille de la Côte-Nord -, l’amie Laura, les habitués des bars… Chacun tente de composer avec une réalité pas toujours joyeuse, mais souvent embellie par l’amitié, les rêves et l’espoir. "Je ne sais plus jusqu’à quel point c’est biographique, et pour moi, ce n’est plus important, estime Vincent Vallières. Ce qui est important, c’est que les chansons prennent leur envol, touchent les gens et soient significatives pour ceux qui vont les écouter, comme elles l’ont été pour moi quand je les ai écrites. C’est ça que j’espère le plus."
Une petite bonne femme, nouvellement entrée dans la vie de Vincent Vallières, ne fait pas partie de l’univers du Repère tranquille. La paternité, le jeune homme n’en parle pas sur cet album. "Quand ma fille est née, je me suis retrouvé dans différentes revues et affaires et je n’ai pas aimé ça. […] Je me disais que ça ne se pouvait pas parce que je n’ai jamais pensé que j’étais ce genre de personnalité-là. Je n’aime pas l’idée d’étaler ma vie privée. Je ne me sens pas bien là-dedans. Mais le fait qu’il n’y ait pas de chanson là-dessus, ce n’est pas en lien avec ça comme tel. Ça a adonné comme ça."
Comme sur les précédents albums, l’écriture de Vallières est relevée de mots empruntés à l’anglais: luck, poffe, truck-stop, waitress, draffe… Le chanteur est passé maître dans l’art de raconter le quotidien avec des mots du quotidien. "Je privilégie l’écriture du coeur, plutôt que l’exercice de style. Je ne veux pas me perdre dans ma tête à écrire des chansons."
S’il ne se prend pas la tête avec l’écriture, il avoue toutefois y mettre beaucoup de coeur et se fier à son instinct pour le reste du travail. "Je suis content de cet album. J’ai mis le meilleur de moi-même là-dedans."
Vincent Vallières
Le Repère tranquille
Les Productions BYC