Massive Attack : Attaque en règle
Massive Attack ne quittera pas Montréal sans laisser de traces le 11 septembre. Rencontre avec Daddy G, qui nous parle de politique, du monde moderne et de musique.
Massive Attack, le 11 septembre: il serait vain de chercher une formule plus apte à traduire l’impact de ladite formation. Non seulement doit-on le trip-hop au duo bristolois formé de Grant Marshall et Robert Del Naja, mais ceux-ci ont aussi donné naissance à une scène britannique qui s’est répandue à travers le monde, créé un style unique de blues urbain, un rock épique, mélancolique et progressif basé sur le dub, qui échappe aux étiquettes et aux définitions nettes depuis maintenant 15 ans.
Collaborant avec toute une pléiade de musiciens et de chanteurs, allant de Tricky à Madonna, en passant par Tracey Horn du groupe Everything But the Girl et le légendaire chanteur reggae Horace Andy, Massive Attack a su transposer le triste état du monde dans un univers sonore d’une angoisse palpable et incomparable.
"Vous appelez de Montréal? C’est super, on adore le Canada. Nous voyons les choses du même oeil que vous, s’exclame Grant Marshall, alias Daddy G, dans un studio d’enregistrement à Paris. Les Américains sont censés être les gardiens de la paix, mais voyez ce que les gardiens de la paix sont en train de faire. Il y a plus de guerres que jamais. C’est terrible de voir Tony Blair qui s’est rallié à George Bush, de voir ces deux forces politiques pourtant aux antipodes se retrouver dans le même lit."
Il suffit d’écouter Collected, sur l’album best of qui vient de paraître cet été, pour comprendre ce que les fans savent déjà: Massive Attack est un collectif de créateurs engagés. Ils ont contesté, sur le plan politique, directement (False Flags) et indirectement (Karmacoma), et ce, depuis le premier jour. Même le nom du groupe s’est vu confronté à la guerre: "À cause de la guerre du Golfe, ils interdisaient tous les noms de groupes qui évoquaient la guerre", explique Daddy G. Pour éviter d’être rayés de la radio, au début de leur carrière, ils ont dû changer temporairement leur nom pour Massive tout court, chose que regrette encore Del Naja. Par la suite, il a dénoncé ce qu’il perçoit comme une agression américaine du tiers-monde au nom de la démocratie. "Chaque fois qu’on lance un disque, une guerre sévit", soupire Daddy G.
Les toutes premières origines du groupe remontent à la fin des années 70.
C’est à cette époque que Del Naja, Marshall et l’autre membre fondateur, Andrew Vowles (alias Mushroom), ont éclos dans une communauté artistique de Bristol qui s’appelait The Wild Bunch. À les entendre, il s’agissait d’un véritable âge d’or culturel. "Nous sommes en quelque sorte issus du punk. Vivre en Angleterre vers la fin des années 70, début années 80, c’était magnifique, parce que nous découvrions toutes sortes de musiques. Nous sommes passés au new wave, à la musique à deux tons, à toutes sortes de choses. On a toujours tripé sur le reggae; la fièvre du hip-hop est arrivée, et on l’a attrapée."
Le son si caractéristique de Massive Attack habite chacune des chansons de l’album Collected, malgré le fait qu’il soit représentatif de plus d’une décennie d’expérimentations et de phases différentes. C’est un problème épineux pour les amateurs d’étiquettes: ces racines se retrouvent indubitablement dans le dub (surtout à l’époque de Protection, quand Tricky y ajoutait ses parties vocales uniques), mais c’est à peu près la seule référence musicale solide que l’on puisse trouver. Le reste est novateur, et en moins de deux, cette nouveauté fut baptisée "trip-hop".
"Qu’est-ce qu’on a détesté ce nom, dit G en riant. Vous savez, pour nous, la musique de Massive Attack était tout à fait unique, alors lui coller une étiquette, c’était vouloir la caser. On a vraiment opposé une résistance à cette étiquette, mais peu à peu, on a réalisé que les gens avaient besoin d’un cap, d’une direction pour les guider. On a créé une musique lente, ambiante, pour faire danser la tête, et non les pieds. Il n’y avait rien de tel alors. Il n’y avait rien de lent ou d’intelligent."
Pour Grant Marshall, père de deux enfants et d’un troisième en route, le monde est en crise, et son pays suit une très mauvaise pente. "Depuis la sortie de Blue Lines il y a 15 ans et jusqu’à aujourd’hui, les conflits règnent dans le monde, les désastres majeurs abondent. Alors au final, on ne peut pas s’empêcher d’en assimiler une partie. Dans ce sens-là, la politique nous inspire énormément."
Le 11 septembre
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Malheureusement, le 7 septembre dernier, Groupe Spectacles Gillett a annoncé que, pour des raisons de délai de livraison de visas, la tournée nord-américaine de Massive Attack a été reportée d’un mois.
Massive Attack sera à Montréal le 8 octobre prochain et ils donneront un deuxième concert le 9 octobre.