La rentrée coup-de-poing : Une Neuvième de course!
Musique

La rentrée coup-de-poing : Une Neuvième de course!

La rentrée coup-de-poing de l’OSM et de son chef: quelques bémols.

On s’en donnait à coeur joie l’autre matin à la radio de Radio-Canada pour annoncer le grand événement de la rentrée. L’animateur, la chroniqueuse, les annonces publicitaires et jusqu’au bulletin de nouvelles, au moins 10 fois entre 7 h et 9 h l’a-t-on dit: ce soir-là, Kent Nagano dirigerait la Neuvième de Beethoven.

Le martèlement du nom de Beethoven dans la matinée du 6 sur les ondes de la Première Chaîne de Radio-Canada (au détriment de ceux des autres compositeurs au programme, apparemment frappés d’interdit) perpétue le mythe selon lequel il y a une seule oeuvre intéressante par programme à l’OSM, les autres étant du pur remplissage. Une telle couverture sabote littéralement les efforts de Nagano qui utilise une musique archi-populaire pour, précisément, en promouvoir d’autres, moins connues. Que l’on soit aussi systématiquement incapable de prononcer les noms de Charles Ives (1874-1954) et Galina Ustvolskaya (1919) sur les ondes de la radio d’État donne froid dans le dos. On n’est évidemment pas surpris que les deux oeuvres n’aient été diffusées ni à la télé, ni à la radio… Belle convergence! Cela nous permet de formuler un reproche au directeur musical dans son choix de programme: s’il avait opté pour un compositeur canadien, nos amis de Radio-Canada auraient bien été obligés de le mentionner!

Ces deux oeuvres oubliées par tous ont malgré tout pu montrer au public présent à Wilfrid-Pelletier qu’il s’est quand même passé quelques petites choses en musique depuis 1824. The Unanswered Question, d’Ives, avec le trompettiste Russell Devuyst posant sa mystérieuse question à la ronde, tout autour des musiciens et finalement depuis la coulisse, et l’enchaînement immédiat avec la bruyante Prière d’Ustvolskaya ont offert une entrée en matière passablement moderne à l’oeuvre tant attendue.

Le chef était-il pressé par le timing radio-canadien? Quoi qu’il en soit, après avoir complètement éteint le momentum préparé par les deux pièces d’introduction en attendant que la radio, Internet, la télé et la retransmission à l’extérieur soient sur la même longueur d’onde, c’est au pas de course que Nagano a mené le jeu de ses musiciens… Pas toujours idéal pour la précision de l’ensemble, mais les petites imprécisions ne duraient pas longtemps! Le baryton Alan Held, premier à chanter dans le fameux quatrième mouvement, a semblé aussi surpris que nous… Un choix très étonnant de la part du chef, qui atténuait singulièrement la solennité de l’événement, pourtant bien marquée par le début de la soirée.

On pourra revoir Kent Nagano les 15 et 17 novembre alors qu’il dirigera les Gurrelieder (1901-1911) d’Arnold Schoenberg, une oeuvre monumentale pour un très grand orchestre de 112 musiciens, 5 solistes, récitant et choeur mixte. En principe, ça dure deux heures. Le trompettiste Paul Merkelo, qui a éprouvé quelques difficultés dans l’oeuvre d’Ustvolskaya, pourra se reprendre dès le 4 octobre, alors qu’il sera soliste dans le Concerto pour trompette et orchestre (1949) du compositeur français Henri Tomasi.