Mélissa Laveaux : De camphre et de cuivre
Rares sont ceux qui, comme Mélissa Laveaux, parviennent à trouver un son si particulier et personnel à un si jeune âge. Résultat d’une entrevue colorée avec la "poético-diva" haïtienne aux multiples facettes.
"Je ne suis pas poète. J’écris des trucs par rapport aux gens qui m’inspirent. Mais je considère mes chansons comme de la mauvaise poésie. Je n’arriverais pas à lire mes paroles sous une forme poétique." D’emblée, que ce soit à la farce ou non, on peut s’imaginer que Mélissa Laveaux est une autocritique plutôt crue et sévère. Pourtant, à 21 ans, Mélissa faisait paraître, en juin dernier, Camphor & Copper, un album folk blues trilingue, gratté à la guitare par l’artiste elle-même avec sa technique trépidante bien à elle, nappé de percussions africaines, pataugeant dans un jazz world beat à la sauce latine. Une oeuvre empreinte d’une maturité et d’une originalité impressionnantes, entrecoupée de lectures poétiques intrigantes.
Autodidacte, Mélissa emprunte une approche qui fait transparaître son authenticité. "Je n’aime pas devoir me prouver aux gens. C’est improductif. J’essaie plutôt de me prouver à moi-même", dit-elle, du débit effréné d’une fille habitée par mille idées à la seconde. "Mon père m’a acheté une guitare quand j’avais 13 ans. Je ne faisais que des covers et on me disait "ton cover de Lionel Richie sonne terrible!" Pour ne pas fatiguer les oreilles des autres, j’ai décidé de créer mon propre son. Comme ça, les gens seraient moins offensés que si je reprenais des chansons qu’ils connaissaient", explique-t-elle en riant à peine.
Née Québécoise d’une famille haïtienne, activiste pour les droits des femmes et ceux des gens de couleur, radio-journaliste pour CHUO et ancienne étudiante en biologie, réorientée en philosophie, Mélissa a un vécu chargé qui ne fait pourtant pas d’elle une artiste politisée. "J’arrive pas à parler d’un thème social. Mes paroles sont toujours à propos de ma vision personnelle. It’s individual social activism, je dirais", ajoute-t-elle en y réfléchissant. Certes, si ses textes s’étalent sous forme d’histoires personnelles, souvent de dialogues avec elle-même, il n’en demeure pas moins qu’il y passe une dose importante de ses valeurs, dans un chevauchement de français, d’anglais et de créole.
Le titre de son premier album en dit long sur l’artiste. Le camphre et le cuivre. La douce substance aromatique et le conducteur électrique brut. "Le camphre, c’est la partie agitée en moi. C’est toute l’énergie mais en même temps, c’est l’apaisant", décrit-elle. "Le cuivre est fascinant. C’est un métal non précieux, mais il est utile. Mais on en fait rarement des bijoux. Moi, j’en porte constamment, assure-t-elle. On pense que c’est un métal sale. C’est pour ça qu’il me convient, je crois. Toute ma vie, on m’a dit des trucs racistes, par exemple que j’étais sale justement. Mais je mise sur mon utilité, sur ce que je peux faire. C’est un métal qui est vrai, quoi."
Mélissa Laveaux
Camphor & Copper
Malleable Records
Le 15 septembre
Au Café Nostalgica
Voir calendrier World
Le 27 septembre
En première partie de Marie-Josée Houle
Le Petit Chicago