Sinik : La rage de l’ange
Hargneux, rebelle, Sinik est l’un des rappeurs les plus percutants et populaires d’Europe. Il débarque enfin à Sherbrooke pour présenter les pièces de son deuxième album, Sang froid. Rencontre.
Derrière les airs de chérubin de Sinik se cache un homme acerbe ayant connu de nombreux démêlés avec la justice. Un peu plus d’un an après la parution d’un premier opus (La main sur le coeur) écoulé à plus de 250 000 copies au pays de Louise Attaque, il frappait encore plus fort au printemps avec Sang froid, véritable kaléidoscope émotif, empreint de colère mais aussi d’optimisme et échafaudé sur de fortes mélodies, des rythmes béton et des arrangements riches de piano et de violon. "Je voulais que cet album soit supérieur au précédent", lance le jeune rappeur de 25 ans à l’autre bout du fil. La pire chose est de s’asseoir sur un succès passé. Il faut viser encore plus haut!
C’est ma quête artistique que d’essayer des choses nouvelles. Ce n’est pas nécessairement un disque plus personnel que le premier, mais certainement plus ouvert. Autant sur le plan de la production que du choix des thèmes et des textes, l’évolution est manifeste. De plus, on voulait améliorer l’aspect musical", poursuit-il.
Et ça s’entend. En plus de bénéficier d’un travail de studio supérieur (une fois de plus signé Six-O-Nine), l’opus propose un flow plus précis et varié mais, surtout, révèle une plume dure, brute, parfois même agressive et d’une indéniable puissance. Étonnant de la part d’un mec qui n’utilise jamais le dictionnaire et qui détestait ses cours de français au lycée. "L’écriture est devenue un moyen merveilleusement thérapeutique de me libérer de mes monstres. Beaucoup de choses me choquent. Que je parle de n’importe quel sujet, ma manière d’écrire demeure hard. Je suis de nature nerveuse, colérique et plutôt impulsive et écrire m’a aidé à canaliser ma rage. Au lieu de donner des coups et de crier, je me dégage de cette rage avec l’aide des mots, même si transposer cette émotion sur papier n’est pas toujours facile", raconte Thomas Idir, alias Sinik.
Puisant dans le quotidien et s’inspirant des grands titres des journaux, Sinik atteint diablement bien sa cible avec des morceaux tels qu’Autodestruction, Descente aux enfers et Dans le vif (où il mentionne qu’il n’aurait pas aimé être Eminem), même s’il considère que sa vie n’a rien d’exceptionnel. Une vieille âme, ce Sinik? "Je crois que oui. J’ai énormément de vécu pour mon âge. C’est dur de nos jours, mais il faut continuer à se battre et se rappeler qu’il y a toujours de l’espoir. À tout moment, l’être humain doit aspirer à une vie meilleure", explique sagement le rappeur au crâne rasé, ami de Diam’s. Mais le succès fulgurant a-t-il pris par surprise ce fan fini d’Aznavour qui tentait de se tailler une place dans la sphère du rap français depuis dix ans? "Absolument. On l’espère toujours, mais en même temps on reste étonné de voir ces chiffres et de constater la tournure que prennent les choses. Heureusement, à part le fait que les gens me reconnaissent dans la rue, rien n’a vraiment changé."
Le 24 septembre à 19 h
Avec Treizième Étage, L’Assemblée et Manu Militari.
Au Théâtre Granada
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