Chloé Sainte-Marie : Vers à soi
Musique

Chloé Sainte-Marie : Vers à soi

Chloé Sainte-Marie se donnera chair et âme pour faire vivre les mots de ses poètes chéris, à la salle Anaïs-Allard-Rousseau, à l’occasion du Festival international de poésie.

Une entrevue avec Chloé Sainte-Marie est sans nul doute des plus mémorables. Généreuse, elle s’épanche en verbe, les mots de l’un ou de l’autre se métissant à son propre phrasé. La poésie qui l’habite, et qu’elle récite comme si ça allait de soi, couvre le derme comme un frisson. Elle est l’une des rares qui réussit vraiment à faire éclater la bulle de la poésie, éclaboussant avec succès un public qui ne serait pas spontanément tourné vers le culte du mot. À preuve le Prix coup de coeur de la chanson 2006 de l’Académie Charles Cros et ses cinq nominations pour le prochain gala de l’ADISQ (interprète féminine, spectacle de l’année – interprète, album folk contemporain, scripteurs de spectacles, sonorisateur de l’année).

D’aucuns pourraient croire qu’elle a choisi de s’effacer derrière les mots des autres, mais elle prend au sérieux son rôle d’interprète, s’appropriant les vers de Gaston Miron, de Roland Giguère, de Patrice Desbiens, d’Alexis Lapointe. C’est avec beaucoup de modestie et d’aplomb qu’elle aborde le sujet; chacun ses talents: elle sait chanter ce que d’autres savent écrire.

Lorsque vient le temps d’élire les vers qu’elle caressera de la langue, le premier contact est toujours celui des tripes. Pour celle qui leur donne une voix, les poèmes doivent d’abord lui traverser le corps, et c’est ensuite que sa lecture s’intellectualise.

Si pour Roland Giguère "il n’y a pas de place pour le poète dans le monde d’aujourd’hui. Le cri du poète est perdu", Chloé Sainte-Marie affirme que ce n’est qu’une question de volonté. Loin de poser le poète comme maudit ou incompris, elle croit que Giguère voulait plutôt faire référence à la place accordée à la poésie dans notre société, particulièrement dans les médias et dans nos institutions scolaires. Et sur ce point, force nous est d’admettre qu’elle n’a pas tort. Est-ce que la poésie peut s’inscrire dans la vie de tous les jours, ailleurs que dans les catalogues de parfumerie et les échantillons de couleur des compagnies de peinture? Extrémiste en son genre, elle croit que les grands poètes québécois devraient être lus dès les premières années de la petite école. Leurs vers nous appartiennent déjà. Il suffit de se les mettre en tête, de se les mettre en bouche. Des vers pour soi.

Questionnée sur la métamorphose du poème en chanson, elle refuse de parler de transposition, de traduction ou d’adaptation de poèmes. C’est avec un incommensurable respect qu’elle les exploite, qu’elle leur insuffle son haleine. Il lui semble primordial que les poèmes restent les mêmes, qu’ils ne soient pas oblitérés, outre quelques rares exceptions – chaque infime modification étant nécessairement approuvée par le poète lui-même ou par un proche responsable de son oeuvre. Respect oblige.

C’est aussi une question de respect qui a suscité chez elle le désir de chanter en innu et en montagnais. Elle affirme même, entre deux vers de Rateriioskowa (guerrier), qu’il est aberrant qu’au Québec nous apprenions à parler en anglais avant d’apprendre les langues amérindiennes. Farfelu? Elle est pourtant convaincante. Il suffit de prendre un vers avec elle.

Le 4 octobre à 20h
À la salle Anaïs-Allard-Rousseau
Voir calendrier Chanson