Nicolas Landré : L’esprit du nord
Nicolas Landré, après un détour par le droit, a finalement glissé vers la chanson. Élevé en tournée – son père était l’humoriste Claude Landré -, le Latuquois d’origine ne pouvait fermer les yeux sur son besoin de la scène.
"Chez nous, on ne se levait pas le matin et on se couchait tard le soir. À un moment donné, ça m’a rattrapé!" raconte Nicolas Landré. Baigné dès son tout jeune âge dans l’univers précaire mais grisant du show-business, l’auteur-compositeur-interprète en a toujours conservé un souvenir agréable. C’est donc pour rassurer sa mère comédienne, qui rêve d’un avenir plus sûr pour ses enfants, qu’il devient avocat. Mais son franc-parler et ses vieux désirs enfouis lui indiquent une tout autre route… "Je composais des chansons, c’est juste que je n’avais pas le guts de me lancer", avoue-t-il.
Il tente d’abord sa chance à Toulouse comme humoriste en parodiant des chansons. La réaction est bonne, mais les comparaisons avec son père pleuvent. Cela l’embête un peu. Curieusement, c’est une fois le rideau tombé que l’âme artistique de Nicolas Landré s’envole vraiment. Souvent, après une représentation, l’homme se met à gratter sa guitare et chante ses propres textes. "On me disait: "Là, tu tiens quelque chose!"" se rappelle-t-il.
De retour au Québec, il accouche de Windigo, un premier opus folk-rock où la poésie s’entortille aux grands espaces de la Haute-Mauricie et à son passé. Le musicien s’explique: "Le Québec est peu enraciné en ce moment. Les préoccupations sont plutôt américaines. On est très influencés par la grande Amérique. C’est pour ça que tout l’album est axé sur la quête des racines françaises en Amérique, mais plus particulièrement de mes propres racines. Il n’y en a plus beaucoup qui le font, et je le fais à la manière d’un chansonnier, mais entouré de jazzmans."
Sans tomber dans la dénonciation ni la morale, Nicolas Landré parle de ce qui le préoccupe. Manchester est sans doute l’une de ses pièces les plus réussies en ce sens. "On oublie parfois que le tiers du Québec est parti vivre aux États-Unis parce qu’il n’y avait pas de travail. Ce sont donc des milliers, voire des millions, de personnes qui sont allées au New Hampshire, au Massachusetts et dans le Maine travailler et qui ne sont jamais revenues. Et dans l’espace de deux générations, elles ont été complètement assimilées par la grande Amérique. Nous, on n’est pas loin de ça. On ne voit pas trop le danger. Mais si on néglige trop notre français, si on n’a pas un système éducationnel adéquat, si on favorise pas la famille, si on n’aide pas nos jeunes Québécois à s’enraciner…" avertit-il.
Sa chanson Regard vers l’avenir, qui aborde la question d’un modèle de culture unique, s’avère aussi une petite mise en garde. "La grande Amérique est en train de bouffer le monde. Il y en a qui s’inquiètent moins de ça ou qui se disent: "Tant mieux, tout le monde va être pareil." Mais je ne suis pas d’accord. Il faut maintenir sa différence et surtout sa liberté de penser." Il discourt, puis conclut: "Je trouve qu’il y a trop d’instances qui essayent de penser pour nous autres. Le modèle de pensée unique, non, ce n’est pas pour moi!"
Le 20 octobre à 20h
Au Théâtre Belcourt
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