Claire Diterzi : Boucler la boucle
Claire Diterzi goûte enfin au plaisir solitaire après 15 années de riches aventures en groupe sur la scène alternative française. Histoires de sueur.
Active dans les années 90 au sein des formations Forguette Mi Note et Dit Terzi, l’auteure, compositrice, chanteuse et guitariste Claire Diterzi caressait depuis maintes lunes ce projet solo. Après quelque mille concerts aux quatre coins de l’Europe, à voyager parfois à 12 musiciens dans un camion 8 places, elle avait senti l’envie de passer à autre chose faire son chemin. Mais le plongeon tant attendu dans la confection d’un album bien à elle allait être momentanément retardé par d’alléchantes offres de travail sur des trames sonores au cinéma, au théâtre et en danse contemporaine. Cinq années de nouvelles expériences qui nourriront substantiellement ce premier recueil intitulé Boucle, tout en permettant à l’artiste de constater le nombre d’interdits quasi exclusifs au monde de la chanson.
"Ce qui me touche dans la danse ou au théâtre, c’est l’absence de tabous. Et c’est là que la chanson se situe au Moyen Âge pour moi, car on en retrouve plein", déplore-t-elle, citant en exemple la sexualité, thème récurrent dans son oeuvre. "Il y a des mots qu’on ne peut pas dire dans une chanson parce qu’on est censuré à la radio, parce que ça fait peur à la maison de disques", expose-t-elle, dénonçant les élans de surconformisme en cette ère de Star Académie. "Il ne faut surtout pas froisser l’auditeur; on le brosse dans le sens du poil, on le conforte dans ce qu’il connaît, on l’enduit de références ultrarabâchées. Au théâtre ou au cinéma, par contre, on peut se mettre à poil sur un plateau, se jeter par terre, crier… Dans un film, ça ne choque pas ou peu, mais dans une chanson, c’est un langage auquel on n’a pas droit. Et moi, c’est ce qui m’a intéressée sur Boucle", confie-t-elle, soulignant l’importance du corps et de la respiration sur ce disque. "C’est un album qui sent la sueur, je trouve…"
Un disque aux effluves de fluides corporels certes, également porteur d’amour et d’une grande sensualité, le tout livré avec un singulier abandon, laissant copuler une panoplie d’influences allant du classique à l’électronique en passant par les airs arabisants. "J’aime les choses à la fois viriles et fragiles", explique celle dont l’enfance fut bercée par les disques de sa mère, grande fan de Bob Marley, Marianne Faithfull et autres Linda Ronstadt. "J’aime ce qui est sensible, courageux et audacieux, et je ne fais absolument aucun clivage entre les styles musicaux; un morceau de jazz peut me faire hérisser les poils autant qu’un morceau de techno, une pièce de Rage Against the Machine ou un lieder de Schubert…"
Accompagnée par Étienne Bonhomme à la batterie et aux commandes des "machines", Diterzi, qui en sera à sa première visite au Québec, a bien hâte de rencontrer son public. "Je peux vous dire qu’à deux, on fait un sacré bordel et on s’éclate! lance-t-elle. Il n’y a jamais deux concerts pareils. Le moindre accident est source de rires, de recherche et de découvertes. Gaufrer un morceau, au début, ça me désespérait, mais maintenant, on s’en sert chaque fois pour inventer quelque chose de différent; c’est ça qui m’intéresse."
Le 8 novembre à 20h
Au Théâtre Petit Champlain
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