Edgar Bori : Les feux de la rampe
Avec en main un disque formidable, Bori revient dans la ville qui l’a soutenu et vu grandir.
"Tu sais quoi? C’est la première fois de ma vie que je suis à l’aise sur une scène. J’allais là comme chez le dentiste", confesse Edgar ou du moins son clone, l’auteur-compositeur-interprète qui dirige les destinées de Bori, depuis Outremont.
Pour ce type qui a choisi d’éviter le vedettariat afin de rendre aux chansons leur pur pouvoir de persuasion sans interférence, mais aussi par malaise viscéral de la scène, le petit mystère de l’anonymat a longtemps posé des dichotomies insolubles quand venait le temps du spectacle. Il dit: "C’est une grosse contradiction stressante de monter sur scène pour s’y cacher. Maintenant, je ne me casse plus la tête, j’accepte mon choix, et puis quand tes salles sont pleines, et que les gens sont là parce qu’ils aiment ton travail, ben, ça porte!"
Certes, l’histoire de cet anonymat semble un peu complexe, mais les centaines d’amateurs de Québec qui suivent l’affaire depuis ses débuts comprendront. Dans la capitale, par ailleurs, Bori connaît depuis ses débuts en 1995 une popularité disproportionnée. "Le premier album a été mis en marche à compte d’auteur à Québec, on en a vendu 1000 copies dans un seul magasin. Les premières demandes de spectacle sont aussi venues de Québec. Je ne voulais pas faire de scène, alors j’ai recruté des comédiens, dont Pierre Potvin de Québec… Alors les gens ont pensé que Bori était de Québec… J’ai laissé faire le mythe, mais, c’est important, c’est quand même au Petit Champlain qu’on est nés."
Les temps sont maintenant au Monde poutt poutt, titre abscons du magnifique septième album dont sont tirées 14 chansons de ce spectacle de deux heures qui, comme d’habitude, mise bien plus qu’à l’ordinaire sur la théâtralité, un brin de cirque et beaucoup, beaucoup de musique: "Y’a une rencontre amoureuse avec les artistes au Québec. On veut les voir en chair et en os. Le chanteur gagne son public avec des anecdotes… On cultive le vedettariat. Alors quand on choisit comme moi de jouer dans l’ombre, il faut évidemment se fendre en quatre pour compenser l’absence par des ficelles, des trucs, des projections, des masques, des voiles, des éclairages particuliers. J’aime bien aussi faire contrepoids aux chansons. Y montrer des histoires connexes…"
Bori grandit. Une autre dizaine de spectacles au printemps, une vingtaine pour l’automne prochain, l’Europe pour 2007, 30 ensuite, et Québec en 2008, en extérieur probablement, pour le 400e anniversaire: "Oui, ça grossit, mais de préférence pas trop vite. […] Je ne veux pas faire des salles de plus de 500 places. Je veux conserver une certaine intimité."
"Au tout premier spectacle de Québec, on était attendus comme les Robert Lepage de la chanson québécoise! C’était toute une pression!" rigole Edgar. "Bourrés de tract, dans la loge du Petit Champlain, devant la photo de Léo Ferré, on a considéré que tous ces ouï-dire étaient ennuyants, et on a fait un show qui ressemblait à une répétition. Dans cet oeuf qui a toujours présidé à nos créations. Et on a été accueillis avec un enthousiasme qui n’a jamais faibli." Et il conclut, pince-sans-rire: "C’est pas n’importe quoi de se sentir important!"
Le 23 novembre à 20h
Au Théâtre Petit Champlain
Le 24 novembre à 20h
À l’Anglicane
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