Les Têtes à Papineau et La Tuque Bleue : Le passé recomposé
Musique

Les Têtes à Papineau et La Tuque Bleue : Le passé recomposé

La musique trad fait de plus en plus d’adeptes et se compose et se décompose désormais à toutes les sauces… Rencontre avec deux groupes qui conjuguent le trad dans leur patelin de la Petite-Nation…

LES TÊTES À PAPINEAU: LES BOLLÉS DU FOLKLORE!

Formé il y a tout juste deux ans, Les Têtes à Papineau est un trio hétéroclite qui évolue au pays du grand seigneur Louis-Joseph, la Petite-Nation. Les Têtes à Papineau, c’est aussi la rencontre d’"un fromager à la recherche du chèvre perdu" (Jonathan Lafontaine, mandoline et guitare), d’"un ingénieur chimiste très vert mais déjà à la retraite" (Patrick Mailloux, guitare et basse) et d’"un réviseur-correcteur qui ne fait pas de traduction!" (Paul Lafrance, violon, dulcimer). Ce dernier avait pris pour résolution, en 2005, de rappeler deux musiciens qui avaient signifié leur intérêt de former un groupe, mais qui ne s’étaient jamais rencontrés. "Je les connaissais très peu, mais j’ai décidé d’essayer, de provoquer la rencontre, et ça a cliqué rapidement. Depuis ce temps-là, on se voit chaque semaine!" s’exclame au bout du fil le violoniste passionné. "On est tous dans une dizaine différente; je suis l’aîné dans le début de la quarantaine; Patrick est au milieu de la trentaine et Jonathan de la vingtaine, alors ça montre que la musique traditionnelle, ça rejoint tout le monde. On avait un bagage musical assez différent, Patrick n’avait jamais fait de musique traditionnelle mais s’y intéressait et Jonathan y avait touché, mais avait commencé avec du heavy metal… Pour ma part, la musique traditionnelle a en quelque sorte été mon école. J’ai fait beaucoup d’autres choses, mais j’ai appris en jouant de la musique celtique ou traditionnelle québécoise."

C’est ainsi qu’ils ont mis leurs têtes et leurs instruments en synergie pour former Les Têtes à Papineau, un clin d’oeil au roman de Jacques Godbout du même titre, qui traite de la dualité anglophone-francophone des Québécois, mais aussi et surtout à ce seigneur de la Petite-Nation "connu pour son franc-parler et son élocution". Les membres s’amusent même à vêtir des habits d’époque du XIXe siècle afin d’évoquer cet héritage.

Cherchant à se distinguer dans la marre des nouveaux groupes qui s’inscrivent sous le vocable trad, les Têtes ont trouvé en l’intello-trad l’expression tout indiquée pour définir leur approche de la musique. "On est Les Têtes à Papineau, donc on est supposés être des bollés. C’était un peu une boutade au départ, mais finalement, on s’est rendu compte que c’est un peu ça! Du fait qu’on est juste trois, que c’est une approche plus intimiste, moins grosse locomotive à party, qu’on a envie que les gens écoutent ce qu’on a à dire, qu’ils apprécient la recherche que l’on a faite. Je pense qu’on peut dire que c’est une approche quelque peu intellectuelle. Ça ne veut pas dire que notre musique n’a pas de rythme, mais nos chansons ne sont pas que du "tape la galette", on s’en permet des douces et même des chansons d’amour et un tas de choses plus inhabituelles en trad", explique celui qui se décrit comme un "alter-traditionnaliste". "Je ne suis pas un puriste. Je m’intéresse à tout ce qui se fait aujourd’hui en musique trad. Certaines approches me touchent moins que d’autres. Et ça a bien évolué depuis les années 80, où il y avait plus de puristes. Les jeunes ne sont pas de cette même école. Mais il y a aussi le fait qu’il y a certains textes de musique traditionnelle qui ne m’intéressent pas: plusieurs sont sexistes, dénigrent la femme ou sont grivois-cochons…"

Les Têtes se démarquent également par la grande variété d’instruments acoustiques qu’ils grattent allègrement en spectacle: "C’est pas pour rien que l’on dit qu’on a plus de cent cordes à notre arc!" s’exclame Paul, qui collectionne des instruments tels le dulcimer, l’eukaline, l’autoharpe et qui était bien enchanté de dépoussiérer pour de bon!

Dans leur spectacle Trois têtes valent mieux qu’une, les membres du groupe présentent des pièces du répertoire et quelques compositions de leur cru, s’inspirant habituellement de leur cher coin de pays. Les Têtes y vont aussi d’adaptations de morceaux d’artistes de la francophonie tels Raoul Duguay, Yves Montand et Donald Lautrec.

Toujours sans disque en bonne et due forme, le trio a produit un démo sur lequel se trouvent quelques reprises et compositions. L’album devrait voir le jour en 2007…

Le 1er décembre à 20h
À la Basoche
Voir calendrier Folk

ooo

LA TUQUE BLEUE: CHRONIQUE FAMILIALE

Mathieu Renaud: «On fait du folklore actuel; on essaie de le rendre plus professionnel en faisant de nouveaux arrangements plus rigoureux, plus poussés.»

Ils sont six. Tous des p’tits gars de la Petite-Nation. Tous des amis d’enfance, mais aussi, dans le lot, deux frères et trois cousins. La musique a toujours été au coeur de leur train-train quotidien. Ils sont "des jeunesses", mais le groupe existe déjà depuis 13 ans. Un premier album, 5 Habitants, était réalisé en 2003, alors que l’an dernier, Temps d’agrément leur attirait un bel accueil critique et public. Ils se sont depuis produits un peu partout en province et ont même fait trois tournées européennes. "On avait 13-14 ans quand on a commencé", dit Mathieu Renaud, frère de Michaël et grand pote des autres membres: Stéphane Malette, Christian Lavergne, Benoît Massie et Marc-Antoine Otis. "Dans la famille des trois cousins, les Massie, il y en a un qui jouait dans Arc en Son et tous les oncles jouaient un instrument et ça se ramassait à Ripon à jouer de la musique et les jeunes regardaient ça. Et ils ont choisi leur instrument et ont évolué là-dedans. Chez les Renaud, c’était un peu moins musical, mais comme on était amis, on a vite fait de pogner nos instruments nous aussi!" relate Mathieu Renaud pour retracer l’origine du groupe.

Pigeant à même le répertoire de musique traditionnelle dans ses recherches actives, La Tuque Bleue compte aussi sur les musiciens de la famille élargie pour trouver des bijoux de chansons. "On fait du folklore actuel; on essaie de le rendre plus professionnel en faisant de nouveaux arrangements plus rigoureux, plus poussés." Les musiciens ont aussi ramené des parcelles de folklore de leurs voyages, notamment de Normandie et de Bretagne.

"C’est pas mal familial, notre truc, et on s’est développé une réelle passion pour la Petite-Nation; quand on va en Europe, on leur en parle beaucoup, du charme de ses villages… Et comme c’est un peu coupé du reste du Québec, il y a des versions de chansons traditionnelles qui sont propres à la Petite-Nation. Alors on les rajeunit, on les met à la mode!" formule Mathieu, qui en apprenait plus sur le nom de son groupe tout récemment. "On avait choisi le mot tuque parce que, dans la francophonie, ce mot n’est utilisé qu’au Québec; en France ils disent bonnet ou capine. La couleur bleue fait référence au drapeau, bien évidemment. Mais on a appris que l’auteur de la région Jacques Lamarche avait trouvé que c’était un des patois de Louis-Joseph Papineau", se surprend encore celui qui habite juste en face du lieu historique du Manoir-Papineau de Montebello.

Avec le spectacle Temps d’agrément à Gatineau le 7 décembre, le sextuor souhaite donner un dernier souffle à cet album, qui a trouvé près de 5000 preneurs et qui a solidifié encore plus un jeune public fidèle. Les Tuques souhaitent retourner en studio l’été prochain avec des trouvailles et quelques compositions aussi. "On se retient de ne pas jouer les nouvelles chansons en spectacle pour garder des surprises!" conclut Mathieu.

Le 7 décembre à 20h
À la salle Jean-Despréz