The Dears : Chérie, j'ai conquis la planète
Musique

The Dears : Chérie, j’ai conquis la planète

Les Dears effectuent un retour au bercail pour une première fois depuis la parution de l’album Gang of Losers à la fin de l’été dernier. Le groupe a changé, mais à quel point?

Alors qu’à Montréal, le mercure était étrangement élevé pour le mois de novembre qui s’achevait, une vilaine vague de froid sévissait sur la Côte-Ouest: "À Saskatoon, le système de suspension de notre autobus a gelé et nous avons dû prendre l’avion pour arriver à temps à Calgary, puis nous avons dû annuler un concert à Vancouver", relate le bassiste Martin Pelland alors que les Dears venaient tout juste de fouler le sol de Portland.

Cette virée dans l’Ouest fait suite à une tournée européenne qui les aura amenés dans des pays comme l’Angleterre, les Pays-Bas et la Belgique, où bon nombre de fans les attendaient, mais aussi dans d’autres contrées, comme l’Allemagne, la Suisse ou l’Italie, où un plus grand travail de défrichage reste à faire. "Nous avons joué un peu partout dans le monde, et en cours de route, il y a eu de super bons spectacles… alors en revenant à la maison, on aimerait tellement recréer cette magie du spectacle quasiment parfait pour ceux qui nous suivent depuis le début", avoue-t-il à propos de leur rentrée montréalaise.

Si leur récent opus, Gang of Losers, en aura d’abord dérouté plus d’un, la raison en est simple: on avait identifié le groupe montréalais à des mélodies accrocheuses enrobées d’arrangements orchestraux grandioses, à un raffinement presque maniaque et à une beauté mélancolique, mais les attentes ne se sont pas vues tout à fait comblées. Au lieu de s’avancer dans les mêmes territoires somptueux, le sextette a choisi de demeurer dans le sillage dans lequel il s’était engagé ces dernières années: "Après No Cities Left, nous avons été en tournée sans arrêt pendant deux ans et demi, sans sections de cuivres ou de violons, ni de choeurs comme sur l’album", explique le musicien.

Gang of Losers déploie donc une énergie plus crue et plus directe, la production s’avère moins polie et l’aspect orchestral a fait place à des guitares plus incisives qui se positionnent à l’avant-plan avec les claviers. Même la voix de Murray Lightburn et ses textes apparaissent plus lumineux. "Il vient d’avoir un enfant et je crois qu’en tant qu’écrivain, cela l’a transformé", souligne Pelland. "Pour cet album, on s’était fixé de nouveaux buts, poursuit-il. D’abord, de le faire à notre manière, soit d’une façon plus old school, en enregistrant à la maison et sur du ruban. C’était peut-être risqué, mais les groupes finissent par se blaser lorsqu’ils répètent la même formule depuis longtemps et qu’ils évacuent le facteur risque."

LES TEMPS CHANGENT

Au moment où les Dears ont vu le jour, ils ne pouvaient pas s’attendre à l’envol qu’ils ont connu: "Il y a une dizaine d’années, j’étais en voyage en Europe et je constatais comment, dans certains pays, les structures musicales étaient mieux établies qu’au Québec. Je voyais, par exemple, la scène trip-hop de Bristol envahir littéralement la planète. Je ne comprenais pas pourquoi les bands émergents d’ici n’avaient pas la même chance de se faire entendre."

Puis, la hype qu’on connaît s’est déposée sur la Métropole: le monde entier s’est éveillé au son d’artistes indépendants d’ici, Arcade Fire en tête du peloton. "Je me souviens de l’instant précis où nous avons réalisé ce qui arrivait; on était à New York quand le magazine Spin a fait paraître son gros dossier sur la scène montréalaise… c’était spécial de se rendre compte qu’enfin quelque chose se passait. Faire partie de ce mouvement nous a fait un petit velours, mais ce dont je suis encore plus fier, c’est de voir que la scène continue aujourd’hui de se développer et que les journalistes ne sont pas parvenus à mettre une étiquette sur le son de Montréal."

Et comment se sent-on de ne plus être considéré comme un groupe émergent ou comme une "saveur du mois", mais plutôt comme une formation maintenant bien établie? "Sans qu’on s’en soit vraiment rendu compte, les gens ont décidé qu’on était passé dans une autre gang… On réalise qu’on vieillit… et je t’avoue qu’on ne l’avait pas vue venir, celle-là!"

ooo

L’ASCENSION

C’est en 1995 que s’ébauche la première version des Dears alors que Murray Lightburn, avec des musiciens aujourd’hui disparus du tableau, enregistre quelques pièces jamais parues officiellement. La claviériste Natalia Yanchak se joint à lui en 1998, puis le batteur George Donoso III et Martin Pelland un an plus tard. Consolidée, la formation produit un premier album (End of a Hollywood Bedtime Story), suivi en 2001 et 2002 de deux EP, Orchestral Pop Noir Romantique et Summer of Protest. La flûtiste et claviériste Valerie Jodoin-Keaton et le guitariste Patrick Krief viennent compléter la formation telle qu’on la connaît aujourd’hui. Avec l’album No Cities Left (2003) qui se vendra à plus de 100 000 exemplaires, le groupe remporte moult éloges dont une nomination aux prix Juno de 2004 dans la catégorie Meilleur nouveau groupe. En Angleterre, le New Musical Express déclarait qu’il s’agissait de rien de moins que le "Meilleur nouveau groupe au monde". Son de cloche similaire du côté du Rolling Stone et du Spin. Ils sont alors invités à jouer en première partie de Morrissey à Toronto et à Los Angeles ainsi qu’au prestigieux Festival de Glastonbury en Angleterre. On connaît la suite.

Le 14 décembre avec Harvee
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