Snoop Dogg : Hot-Dogg
Snoop Dogg, parrain du gangsta rap, s’amène en ville pour interpréter son nouvel album: Tha Blue Carpet Treatment. Avertissement parental: le texte qui suit contient des passages pouvant ne pas convenir à de jeunes enfants.
On ne prépare pas une entrevue avec Snoop Dogg comme on fignole tout entretien avec ces vedettes internationales typiques. D’ailleurs, juste avant d’établir la communication par téléphone avec le rappeur, sa relationniste nous met en garde pour une troisième fois: "Aucune question sur sa récente arrestation (voir encadré), Snoop est en instance de jugement et ne peut pas commenter l’affaire. Vous avez 15 minutes."
Si ce mince 15 minutes est devenu la norme quant à la durée d’un rendez-vous téléphonique avec un artiste multimillionnaire, on sait d’avance qu’avec Snoop, Calvin Broadus de son vrai nom, la discussion pourrait s’avérer plus courte. L’emblème du gangsta rap de la côte ouest américaine a la fâcheuse manie d’écourter ses entrevues sans prévenir, sans saluer son interlocuteur. Une réputation qui, comme les armes à feu, la drogue, les putes, les partouzes (gangbang) et la rue, lui colle au cul. Et comme il franchira bientôt le cap des 20 millions de disques vendus en carrière avec son neuvième album, Tha Blue Carpet Treatment, le rappeur acquitté de complicité de meurtre en 1996 peut facilement se passer de la promotion perdue d’une entrevue trop courte.
HIT POP
Lancé en novembre dernier, le récent compact a tout d’une galette typée Snoop Dogg. Si bien que plusieurs chroniqueurs ont reproché au chanteur d’être sur le pilote automatique. Reprenant son débit vocal (flow) nonchalant sur des rythmes décontractés, plus R&B qu’intenses, le rappeur a une fois de plus fait appel aux producteurs Timbaland, Dr Dré (qui découvrit Snoop en 1991) et Neptunes, des collaborateurs de longue date tout aussi prisés aujourd’hui par le milieu de la pop, où ils signent des tubes pour Justin Timberlake, Britney Spears et Madonna. Bien assis dans son studio de Hollywood, l’homme de 34 ans ne s’en formalise pas. "Je me fous un peu des projets auxquels participent mes collaborateurs. Ils peuvent bien faire du rock, de la pop ou du rap, tant qu’ils le font bien, ça m’est égal", explique Snoop avant de se défendre d’être un artiste pop malgré son succès commercial. "Je ne sais pas si j’ai influencé la pop. Tout est une question de bonne musique. Si tu composes bien, les gens vont s’inspirer de toi. C’est classique. Les succès de mes albums ont peut-être traversé la ligne en devenant des succès populaires, mais de mon côté, je n’ai jamais changé ma musique. Elle reste vraie, elle représente ce que j’ai vécu, ce que je vis et ce que je veux vivre. Sans nécessairement être fausse, la musique pop est plus ensoleillée. Elle rend les gens heureux. C’est pas mon but."
DU RACISME ET DU SEXE
Influence du son pop du XXIe siècle ou non, Snoop a toutefois contribué à l’image négative associée au mouvement rap. Ses textes tantôt violents, tantôt misogynes ont vite amené les bien-pensants d’Amérique à laisser les rockeurs, anciens apôtres de Satan dans les années 50 et 60, tranquilles pour maintenant fustiger les rappeurs. D’après la moralité actuelle, l’hypersexualisation des ados et la prolifération des gangs de rue découlerait directement du courant rap. "Le hip-hop rend les gens nerveux car il appartient à la jeunesse noire, contrairement au rock, qui appartient essentiellement à la jeunesse blanche. C’est une question de racisme. Les gens nous accusent de mener les jeunes à la violence, mais ce n’est pas la musique qui tue, ce sont les gens. Avec le rap, nous, les Noirs, on se fait un max de blé, et les médias détestent voir les Noirs réussir."
Mais n’empêche, Snoop (que le magazine Rolling Stone présentait en bon père de famille dans son édition du 28 novembre dernier), t’as trois enfants, dont une fille de sept ans. Une pièce de ton dernier disque se nomme Gangbangn 101, où tu décris la vie dans la rue, t’es pas inquiet de savoir qu’une bande d’ados pourrait un jour forcer ta fille à participer à une partouze? "…clic…"
Et hop, on venait de nous raccrocher au nez. Au moment même où nous venions de confronter le père de famille à sa réalité de gangsta rapper, deux rôles visiblement durs à conjuguer. Durée totale de l’entretien: 6 minutes 48 secondes.
Avec Ice Cube, le 28 janvier à 19h30
Au Colisée Pepsi
Voir calendrier Hip-hop/Funk
SNOOP DOGG ET LES AÉROPORTS
Décidément, Snoop Dogg ne l’a pas eue facile dans les aéroports au cours de la dernière année. En avril, le rappeur et cinq membres de son entourage se font coffrer à Heathrow (Londres) après une échauffourée avec la police. Même si seulement quelques membres du clan étaient autorisés à voler en première, Snoop et ses copains souhaitaient tous patienter dans la salle réservée à la classe supérieure. Les autorités n’ont pas aimé, Snoop non plus. En septembre, il se fait intercepter à l’aire d’embarquement de John Wayne (Californie), alors qu’il dissimule une matraque télescopique dans ses bagages à main. Un mois plus tard, la police de Burbank (Californie) l’appréhende à l’aéroport Bob Hope après qu’il eut garé sa voiture dans une zone interdite. Pas si grave comme délit, mais les flics trouvent sur lui de la marijuana et une arme à feu. Après cette découverte, les autorités se munissent d’un mandat de perquisition leur permettant de fouiller la demeure et le bar de Snoop. Faste récolte, la star est à nouveau arrêtée le 28 novembre pour les mêmes motifs alors qu’il quitte les studios du Tonight Show with Jay Leno. Au moment de mettre sous presse, notre ami champion de l’ordre public est toujours en instance de jugement dans cette affaire. Souhaitons qu’il entre au Canada sans problème…