Kent Nagano : Aimer à mort
Kent Nagano dirige Tristan et Isolde (1859), de Richard Wagner, l’une des oeuvres les plus fortes du compositeur, et aussi du répertoire. On lui en parle.
Depuis le début de l’année, il ne se passe pas une semaine sans que le directeur musical de l’OSM fasse la manchette. Il y a d’abord eu, le 10 janvier, la première édition du Prix international de composition de l’OSM, une idée du maestro à laquelle ont adhéré quelque 243 compositeurs de 45 nationalités. Lors de la finale, cinq candidats se disputaient le Prix international Olivier-Messiaen (remis à l’Espagnol Ramon Humet), le Prix international Espoir (remis au Français Raphaël Cendo) et le Prix national Claude-Vivier (remis au seul Canadien en lice, Paul Frehner).
Puis, le 18 janvier, le maire Gérald Tremblay remettait à Kent Nagano un certificat de citoyen d’honneur de Montréal. Visiblement très ému, le chef n’a pu lire immédiatement le discours qu’il avait préparé, se lançant plutôt dans une improvisation et commençant par faire connaître sa grande joie d’être accueilli dans une ville "plus audacieuse que moi!"
Le 19 janvier, on apprenait que Nagano quittera le Berkeley Symphony Orchestra à la fin de la saison 2008-2009; ce sera pour le chef sa 30e saison à la barre de l’orchestre!
Enfin, l’OSM annonçait le 29 janvier qu’il entreprendra avec son directeur musical une première tournée pancanadienne en avril prochain. Cette tournée mènera l’orchestre à Yellowknife, Vancouver, Calgary, Toronto, Kitchener, Ottawa, Québec et St-Jean, Terre-Neuve. L’orchestre voyagera pour quelques-uns de ces concerts avec la contralto Marie-Nicole Lemieux (récipiendaire le 29 janvier dernier du prix Opus du "Rayonnement à l’étranger") et apportera dans ses bagages le Concerto pour orchestre qu’il a commandé à Ana Sokolovic (récipiendaire du prix Opus du "Compositeur de l’année") et qui sera créé à Montréal les 11 et 12 avril. Bref, le dynamisme de son directeur artistique nous ramène vraiment l’OSM des beaux jours!
J’ai rejoint Kent Nagano par téléphone à Munich, quelques minutes avant une répétition de l’Opéra d’État de Bavière (dont il est aussi directeur musical depuis septembre 2006). Ça tombe bien, c’est justement à Munich qu’était créé, le 10 juin 1865, l’opéra en trois actes Tristan und Isolde, que nombre de mélomanes considèrent comme le sommet de l’art musical occidental et que l’OSM nous offrira en version concert.
"Il faut considérer le contexte de l’époque lorsque l’on pense à Wagner, explique le maestro, afin de réaliser l’importance et le niveau vraiment révolutionnaire de ses apports au développement de la musique européenne. Il faut aussi réaliser l’importance que Beethoven a eue avant lui, et dont Wagner poursuit le travail, comme Berlioz, et Liszt aussi. Ils ont amené de nouvelles façons de concevoir la structure de l’oeuvre, qui ont permis des avancées esthétiques cruciales dont nous ressentons toujours les impacts aujourd’hui, et dans toutes les formes d’art."
Tristan est le seul des opéras de Wagner qui se donne en version concert, ce qui en dit long sur ses qualités strictement musicales. "J’ai souvent dirigé Tristan et Isolde, précise le chef, et aussi ses interludes musicaux; je pense que c’est en effet l’un des sommets de l’art de Wagner, et la musique y atteint une qualité symphonique qui n’a plus rien à voir avec ce que l’opéra était avant. C’est Tristan qui a ouvert la porte à une nouvelle esthétique pour le 20e siècle."
À propos des deux principaux solistes qu’il a invités, Kent Nagano commente: "Nous sommes très heureux d’avoir avec nous Ben Heppner (Tristan) et Christine Brewer (Isolde). Ils sont reconnus internationalement comme deux des meilleurs interprètes de Wagner, alors nous sommes vraiment chanceux de pouvoir les avoir tous les deux au même moment! De plus, Ben Heppner est canadien, alors c’est encore mieux! Et ce n’est pas une oeuvre que l’on a la chance d’entendre très souvent en concert, alors nous sommes très fiers de pouvoir la présenter dans ces conditions."
OSM/Nagano: Tristan et Isolde (version concert)
Le 15 février (19h) et le 18 février (14h)
www.osm.ca