Stéphanie Lapointe : Le sablier
Stéphanie Lapointe, petit papillon de verre, voltige avec plus de confiance pour la suite de la tournée Sur le fil. Entretien.
Si l’on ne se fie qu’à sa voix enfantine et délicate, Stéphanie Lapointe semble fragile comme le verre. La grande gagnante de la deuxième saison de Star Académie cache pourtant une dimension beaucoup plus solide; certains la qualifient de vieille âme, d’autres de roseau pensant. Une chose est certaine, ce petit brin de femme à l’aube de la vingtaine aborde sa carrière avec intelligence. Et de retour d’un voyage au Vietnam, elle se replonge dans sa tournée Sur le fil avec une énergie nouvelle.
"Je t’avoue qu’avant de partir, on a travaillé super fort. Avec Noël, c’était vraiment la folie. Et là, je suis partie; ça a été le plus grand contraste, le plus grand choc culturel de ma vie. Je suis revenue ici la tête vide, mais au sens positif, ricane-t-elle. Je suis revenue ici avec le goût de présenter ce show-là."
Sur le fil a énormément évolué depuis ses premières représentations en juillet. "Ça a changé du tout au tout. Mais je pense que ça a changé pour le mieux", précise-t-elle. Un an après la parution de son album, Stéphanie Lapointe raconte qu’elle ne voyait plus ses chansons de la même manière. Ainsi, elle a eu envie de les réarranger, de leur donner un souffle un peu plus folk. "Je voulais mettre un peu de lumière dans tout ça!" Le spectacle, mis en scène par Dominique Laurence, la réalisatrice de son clip La Mer, profite également des gains que l’interprète a réalisés en matière de confiance. "Au début, ce que je voulais, c’est faire un court métrage pour le show. Et ça s’est avéré super difficile. Quand tu montes un show avec un album comme le mien, il y a plein de sujets, plein de trucs que tu as envie d’aborder. Mais je n’arrivais pas à mettre ça dans une histoire. J’ai vraiment cherché. Avec Dominique, on a vraiment essayé. Finalement, on a décidé d’illustrer les chansons par des petits thèmes, ce qui est déjà assez ambitieux, parce que c’est comme faire des petites fractions de vidéoclip pour chaque chanson. […] Je pense que j’avais peut-être un petit peu peur de faire ce show-là il y a un an. J’ai fait beaucoup de studio, j’ai fait Aurore… J’étais toujours devant la caméra ou dans un studio, je n’étais jamais devant les gens. Et quand tu fais un show, il n’y a pas de montage. Alors, je me dis: "Je vais mettre des films; comme ça, je n’aurai pas à porter ça toute seule!" Je pense que c’était ça, le but, inconsciemment. Et je suis super contente de l’avoir fait. Sauf que finalement, c’est devenu un show de musique avant tout, et c’est une belle chose."
LE TEMPS QUI PASSE….
À l’écoute du disque Sur le fil, certains journalistes ont senti qu’elle entretenait une relation trouble avec le temps. Est-elle d’accord avec cette affirmation? "Oui. Je m’en suis rendu compte après avoir fait l’album. Quand j’étais en train d’écrire les textes de remerciements à la fin de mon album, j’essayais de faire le point sur tout ça. Je regardais les chansons et je me disais: "C’est fou comme chaque fois que j’ai parlé à un auteur, chaque fois que j’ai eu à choisir une chanson, j’ai eu cette espèce de questionnement-là sur le temps, sur l’enfance…" Je pense que c’est un peu dû au fait que ma vie a été un peu bouleversée quand j’ai fait Star Académie. Tout s’est enchaîné… Oui, j’ai peut-être vécu un moment de transition entre l’enfance, l’adolescence et le monde adulte", répond-elle.
Justement, son passage à Star Académie, qui jongle avec le concept de la célébrité instantanée, a-t-il accéléré certains processus qu’elle aurait préférés plus lents? "Ça m’a obsédée pendant beaucoup de temps, cette question-là, même pendant Star Académie. Est-ce que j’aurais dû faire ça? Je pense que c’est la même chose pour tout le monde qui passe par là. On ne passe pas par le même chemin que les autres, je m’en rends compte… Je regarde le cheminement de tout le monde autour et j’ai l’impression qu’on avait tous cette espèce de sentiment de l’imposteur. Au bout du compte, je réalise qu’il n’y a personne qui a le même cheminement. Qu’on pense à Richard Desjardins – je sais qu’il a joué avant dans un autre groupe – qui a commencé sa carrière plus tard que la plupart des gens, mais qui a pourtant un super beau succès, ou à Marie-Jo Thério, qui a commencé comme comédienne dans Chambres en ville et qui fait maintenant son petit bout de chemin en France… Je réalise juste que ce qui est important ce n’est pas par où on passe, mais ce qu’on fait avec ce qui nous est donné. J’ai fait le choix d’arrêter d’être gênée de ça parce que je crois qu’il n’y a pas de raison."
En raison de son jeune âge, on s’étonne de tant de maturité. Elle paraît si "groundée". Cette pensée se transforme du coup en paroles qui se rendent aux oreilles de la chanteuse. Elle sourit. "Je me sens tout le temps entre deux eaux. J’ai de la misère à prendre des décisions. J’ai un ami qui me dit toujours: "Quand on fait un choix, on refuse un autre choix automatiquement." Et je pense que c’est ça que j’ai de la misère à accepter, refuser de faire des choses. J’ai peur de manquer quelque chose, mais c’est peut-être ça, vieillir…" conclut celle qui pense s’attaquer à l’écriture d’un deuxième disque après sa rentrée montréalaise.
Les 8 et 9 février à 20h
Au Théâtre Petit Champlain
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