Black Taboo : Le diable au corps
Musique

Black Taboo : Le diable au corps

Black Taboo, qui lance un deuxième album hip-hop à la sauce club, ne fait pas dans la dentelle. Pourtant, le collectif, qui récidive de virulence dans ce nouvel opus, pourrait s’être affiné, aussi surprenant que ça puisse paraître.

Difficile de considérer la musique des membres de Black Taboo comme une forme d’art. Leur esprit mal tourné ajoute constamment le cynisme à l’insulte pour accoucher de textes vulgaires et décadents. Le nouvel album de Black Taboo, Crosse-toé ça rend sourd, ne fait pas exception. Pourtant, c’en est. Et la diversité des arrangements et des collaborations convainc assez vite d’un certain souci esthétique présent chez le collectif.

Une des dimensions de cette diversité, ce sont les genres musicaux abordés. Tantôt jazz, rock, techno ou hip-hop, l’étendue des genres musicaux se fait large, et on ne compte plus les canevas empruntés aux chansons commerciales de tout type. "On a commencé un travail avec un nouveau réalisateur, VIPete. C’est carrément une prise en main de notre propre production, car pour le premier album, on restait étiquetés encore au punk et au hardcore. Alors que cette fois, on sent qu’on avance plus de façon autonome vers quelque chose qui nous est propre", nous dit Richard Mangemarais en entrevue.

S’il est un genre qui se distingue malgré tout, c’est celui du club, où sévissent déjà maints rappeurs du même acabit. Mais le rap de Black Taboo ici ressemble autant à une forme de heavy metal tourné hip-hop, sans les guitares. "C’est vrai que les basses sont plutôt club. Ça me ravit en fait, maintenant que j’y pense, parce que notre réalisateur a vraiment fait un bon travail. C’est vraiment une discographie ambulante ce gars-là, lui qui pourtant s’est mis assez récemment à la réalisation hip-hop."

Il faut compter aussi sur des collaborations pour renouveler les sonorités du groupe. À ce compte, soulignons la réunion plutôt improbable (notamment sur Hey, une des pièces phares de l’album avec un sample des Dales Hawerchuk) d’un groupe hip-hop plutôt commercial de la rive-sud, Taktika, avec les anglophones Common Unity, au flux sophistiqué et aux arrangements savants.

Arrivent les paroles. Si Black Taboo canalise dans ses chansons ce qui incarne la vulgarité sous toutes ses formes, surtout par son attitude gangsta, cet univers surtout autoréférentiel rend leurs paroles redondantes sur compact, mais assurément festives, disons-le, sur scène. "On arrive à évoluer pas mal dans ce registre. Je crois que Black Taboo, musicalement, saura toujours aller là où se trouvent les défis. Nos chansons parlent de guns, de filles, de chars, mais on essayera toujours d’aller chercher un niveau au-dessus. Contrairement à ce qu’on dit de nous, contrairement à ce que d’autres groupes font, on n’est pas trash juste pour être trash. On sait construire tout de même des histoires, quoi", soutient Richard Mangemarais.

La vulgarité, ça a été et c’est toujours la marque de commerce du groupe. Rappelons que Black Taboo a été à l’été 2006 à l’origine d’un tollé médiatique contre le rap misogyne avec la chanson God Bless the Topless, tirée du premier album. "Cette chanson, ça a 10 ans! Aujourd’hui, jamais plus on composera une toune comme ça. On est rendus ailleurs, c’est tout." Tout de même, sur le premier titre de ce nouvel album, éponyme, on peut réentendre des extraits de nouvelles télévisées évoquant la polémique…

Vouloir les condamner pour atteinte à la morale serait leur allouer une crédibilité dont eux-mêmes ne se réclament pas. Pour Black Taboo, avant tout un collectif de vidéastes trash, vedettes s’il en est d’un genre musical qui décape les bars et autres boîtes de nuit, un seul mot d’ordre: rester les ennemis du bon goût.

Le 1er mars, en première partie de TTC
Au Velvet

Le 3 mars
Au cégep de Limoilou

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