Les Charbonniers de l'enfer : Ça parle au diable!
Musique

Les Charbonniers de l’enfer : Ça parle au diable!

Les Charbonniers de l’enfer, rare groupe a capella de musique traditionnelle, racontent ce qu’en 2007 la tradition peut inspirer aux âmes sensibles et curieuses.

Comme beaucoup de musiques traditionnelles, les chansons du folklore québécois, issues d’époques rigoureuses mais aussi essentiellement de la tradition orale populaire, sont colorées, excessives, vertueuses, cyniques et moralistes comme jadis les petites gens d’ici. Le bien, le mal, la victoire, la défaite de l’amour et de la vertu y sont omniprésents, particulièrement dans la complainte. C’est donc sans surprise qu’y apparaît parfois un personnage surréaliste aux sabots fourchus prénommé Satan.

Dans ce contexte, si Les Charbonnier de l’enfer n’ont pas vendu leur âme au diable, malgré des chansons comme Le diable dans la ville de Poitiers ou Au diable les avocats, le nom choisi par Michel Faubert en 1993 pour l’ensemble vocal était fort approprié: "Concours de circonstance, dit André Marchand, ancien de la Bottine Souriante et membre fondateur des Charbonniers. Un soir, les musiciens du groupe de Michel Faubert baptisé Locomotive étaient absents, on était quatre à faire déjà des back vocals avec eux, alors on s’est assis autour de la table et on a eu beaucoup de plaisir à chanter sans accompagnement. Il fallait un nom, celui-là était de circonstance. C’est resté. On a commencé modestement, à temps partiel. On faisait tous autre chose."

Une devise? Une mission? Remonter aux sources de la tradition? Traquer les chansons perdues au fond des mémoires québécoises? Treize ans et deux disques plus tard, Marchand revient sur le parcours des Charbonniers: "Franchement, au départ c’était plutôt épicurien… le pur plaisir de chanter a capella. Et puis évidemment, en explorant le répertoire traditionnel, on s’est rendu compte qu’un groupe vocal permettait de rendre des couleurs, des tons, des rythmes inouïs avec beaucoup de liberté."

Au détour des années quatre-vingt, universitaires et ethnologues opposent au populisme des Soirées canadiennes un purisme rigoureux dans la quête et le rendu de la musique traditionnelle qu’on ne retrouve guère que chez les ensembles de musique ancienne privilégiant le répertoire issu de Nouvelle-France. Quoique Michel Faubert se soit livré à une véritable quête du répertoire traditionnel pur, chez les Charbonniers l’affaire est plus instinctive: "Eh oui! Il y a même des missionnaires là-dedans. Leurs recherches sont intéressantes. Nous, je crois qu’on fonctionne plutôt par instinct depuis le temps qu’on baigne dans cette musique. On n’est pas des puristes. On fait des spectacles qui sont loin de la théorie. Nous sommes tous des musiciens qui marchent à l’oreille. On ne sonne pas très scolaire. On y va selon nos envies. Quand quelque chose nous intéresse, on s’essaie. On rentre dedans sans trop réfléchir. Mais disons que ce n’est pas non plus un simple party de cuisine."

Beaucoup s’en faut, car la sophistication des ces cinq harmonies vocales est parfois complexe et le répertoire bien trop étendu pour se déguster entre la tourtière et le jambon à l’érable: "Il y a des palettes de couleurs et de styles qui sont assez impressionnantes dans le spectacle que nous élaborons. Des choses parfois très, très vieilles, d’autres plus récentes, des chants à saveur religieuse, des héritages directs de la Nouvelle-France dont l’influence est immense. Il y a dans le spectacle une petite section – Clergé – assez moqueuse. Ça fait terriblement partie de nous, tout ça. Impossible de passer ce passé sous silence", dit André Marchand sur un ton savoureux.

Le 10 mars
Au théâtre Palace Arvida
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Gilles Vigneault