Marc Béland : L’illusion comique
Marc Béland dirige les chanteurs de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal dans Le Monde de la Lune, une oeuvre de Haydn et Goldoni.
Après Didon et Énée (Purcell) et The Turn of the Screw (Britten), les chanteurs de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal défendront cette année Le Monde de la Lune, une oeuvre de Joseph Haydn rarement présentée au pays. Aux côtés de Jean-Marie Zeitouni, directeur musical, le comédien Marc Béland, de plus en plus metteur en scène, préside à son premier opéra. Aux conceptions, comme le veut la coutume, trois diplômées de l’École nationale de théâtre: Marianne Forand (scénographie), Jessica Poirier Chang (costumes) et Maude Labonté (éclairages).
Compositeur autrichien plus connu pour ses symphonies et ses quatuors à cordes que pour ses opéras – selon les experts, ils auraient été injustement occultés par ceux de Mozart -, Haydn a créé Il Mondo della Luna en 1777, d’après un livret du dramaturge vénitien Carlo Goldoni, dont on célèbre cette année le tricentenaire de naissance. L’intrigue de cet opéra bouffe, typique de la commedia dell’arte du 18e siècle, s’appuie sur une histoire d’amours contrariées: Ecclitico (Thomas Macleay ou Antonio Figueroa) est amoureux de Clarice (Julie Daoust ou Marianne Fiset), Ernesto (Sébastien Ouellet ou Pierre-Étienne Bergeron) de Flaminia (Pascale Beaudin ou Charlotte Corwin) et Cecco (Antoine Bélanger ou Michael Merraw) de Lisetta (Mireille Lebel ou Leticia Brewer), mais le détestable baron Buonafede (Alexandre Sylvestre ou Chad Louwerse), le père des deux premières et maître de la troisième, ne l’entend pas ainsi. Quand Ecclitico décide, pour arriver à ses fins, d’entraîner le père acariâtre sur la Lune, l’aventure prend une réjouissante tournure fantastique.
Selon Marc Béland, l’oeuvre est d’un dynamisme contagieux: "C’est un opéra très musclé, de la commedia dell’arte à son meilleur, où l’on retrouve tous les archétypes, du père avare, qui veut réserver ses filles à des nobles, jusqu’au filou qui va le berner. Pour moi, Ecclitico, c’est Arlequin, c’est l’acteur déguisé, le metteur en scène qui va faire surgir la vérité par le truchement du théâtre, par l’illusion." Puis, le metteur en scène insiste pour pourfendre quelques idées préconçues: "On dit souvent que les chanteurs d’opéra ne savent pas bouger, qu’ils sont pris dans leurs corps. Je pense que c’est de plus en plus faux. Ceux avec lesquels je travaille en ce moment sont des acteurs, ils sont avides de jouer. Comme ils arrivent en salle de répétition en sachant leur partition par coeur, en ayant déjà travaillé leurs récitatifs, on a tout de suite accès à une émotion, une émotion portée par la musique."
Le créateur explique comment le temps, ici crucial, intransigeant, est à la fois une contrainte et une permission: "Au théâtre, on peut étirer le temps, le relire ou encore l’arrêter. C’est bien, mais il arrive aussi qu’on s’engouffre à tort dans les méandres psychologiques d’un personnage ou que l’ego du comédien interfère. À l’opéra, la musique impose un cadre, mais un cadre stimulant, un cadre qui évite de tomber dans le psychologisme. La musique élève, elle transcende, magnifiquement."
Les 27, 28, 30 et 31 mars et les 1er, 2 et 4 avril
À la salle Ludger-Duvernay du Monument-National
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