Anodajay : Destination nord-ouest
Anodajay, armé de sa reprise du classique de Raôul Duguay rebaptisé Le Beat à ti-bi, a orchestré une invasion musicale à l’échelle du Québec à partir de Rouyn-Noranda! Autopsie d’une stratégie audacieuse.
À Rouyn-Noranda, il y a deux hebdos d’information. Une question comme ça: qui pensez-vous a été la personnalité régionale la plus photographiée dans ces deux hebdos depuis un an? Le maire? Les députés? Lappy, la mascotte des Huskies (équipe de la LHJMQ)? Pas du tout! En fait, si mon estimation est bonne, la face qu’on a vue le plus souvent dans La Frontière et Le Citoyen, c’est celle du rappeur Anodajay!
Et cette exposition médiatique, il ne l’a pas volée. Avec son deuxième album Septentrion, mais surtout grâce à sa reprise du classique de Raôul Duguay La Bittt à tibi, il a réussi une opération audacieuse, compte tenu du montréalocentrisme qui règne habituellement sur le plan culturel. Une opération de colonisation inversée qui a explosé sur les ondes de MusiquePlus (40 premières positions sur un total de 66 jours au Top 5 de la station), et qui a culminé par la diffusion d’un extrait du clip à Tout le monde en parle, justifiée par la présence de Raôul Duguay comme invité.
Steve Jolin, l’homme derrière le pseudonyme (qui, en passant, est aussi prof d’éducation physique au secondaire), fait le bilan de l’impact de cette chanson empruntée qui est devenue sa carte de visite: "Moi, j’ai toujours eu beaucoup d’ambition pour cette chanson même si je savais que ça allait être tough de l’imposer, autant dans le milieu hip-hop que dans les médias de masse. Ça aurait pu être perçu comme un move opportuniste, et ça n’aurait pas été bon, ni pour moi ni pour Raôul. Mais je pense que c’est Raôul qui a été le plus surpris du succès de la toune. Il m’a déjà dit qu’après être sorti du studio d’enregistrement, il pensait qu’il n’en entendrait plus parler…"
Mais le vrai test reste à venir pour Anodajay. Et il n’a pas l’intention, pour l’instant du moins, de mettre de côté ses racines régionales pour séduire les "headz" du quartier Saint-Michel: "Le hip-hop, à la base, c’est très territorial. Et je pense que c’est important de parler des choses qui se passent chez nous. C’est la seule façon de me démarquer des autres. Là, j’ai l’image du gars de bois, du rappeur de région, mais c’est ça que je suis aussi. Et mon deuxième extrait, L’Homme de bois (ndlr: charge poétique contre l’exploitation irresponsable de la forêt, couchée sur un échantillonnage de la pièce Les Yankees de son compatriote Richard Desjardins), vient renforcer mon identité propre et souligne le fait que je suis aussi capable de profondeur. Je ne veux pas que les gens pensent que je ne suis qu’un rappeur parmi tant d’autres."
Pour son premier grand rendez-vous montréalais, baptisé "Le Rassemblement hip-hop dépendant", il sera entouré d’une brochette d’artistes soigneusement sélectionnés qui enchaîneront les performances selon un concept "non-stop" inédit. Et il y a dans ce rassemblement un symbole de l’acharnement d’Anodajay pour le développement et l’unité de la scène hip-hop au Québec. "Je veux faire comprendre aux artistes que tant qu’on ne démontrera pas au public, aux médias et à notre communauté qu’on est capables de s’unir, il ne se passera rien! Parce que je pense que les gens sont tannés de l’attitude de mauvaise compétition et de chacun pour soi qui règne au sein du mouvement. C’est ça que j’essaie de combattre."
Avec Imposs, Dramatik, Sans Pression, Loco Locass, Accrophone, Boogat, Taktika, DJ Horg et plusieurs autres
Le 7 avril
Au Club Soda
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À voir/écouter si vous aimez
– Accrophone
– Manu Militari
– Sans Pression