IAM : Nouvelle saison
IAM rebondit après quatre années d’absence avec une nouvelle livraison percutante, aux textes sages finement ciselés et aux rythmes béton.
Ceux que l’on surnomme les grands frères du hip-hop sont de retour et ils frappent fort. Constellé de savants scratchs, d’une basse grondante, de refrains chantés signés Shurik’N et du flow assassin d’Akhénaton, Saison 5 réunit le clan marseillais IAM au complet. Conçu comme une suite d’épisodes, ce cinquième recueil se veut, en quelque sorte, un hommage aux séries télé. "On aime se servir de l’imagerie cinématographique, mais la planète entière est à l’heure des séries. C’est une véritable folie et, au sein d’IAM, chacun a ses préférées. Même dans nos discussions les plus sérieuses, il arrive que nous fassions référence aux séries télé. De plus en plus, la télé se rapproche de faits d’actualité et historiques, et pour ce disque, on a remplacé l’influence du cinéma par celle de la télé. On a voulu mettre de l’avant, de manière authentique, cette culture hip-hop qui nous a donné goût à la musique et qui nous a fait grandir. Pour nous, c’est un retour aux sources en quelque sorte", raconte Shurik’N de sa voix grave et posée.
Conçu au Maroc et enregistré dans un studio mobile de l’endroit, l’opus poursuit l’exploration des musiques ethniques et demeure empreint d’une jolie touche mélancolique. Alors que la période de gestation pour Revoir un printemps avait été de deux années complètes, Saison 5 fut créé en un peu plus de trois mois. Pas surprenant de constater l’angle beaucoup plus urgent et instinctif de l’affaire. "Étant un groupe qui bosse beaucoup mieux sous la pression, on voulait à tout prix travailler dans un format différent. Voilà pourquoi on s’est imposé des dates butoirs très serrées. À l’époque, on se séparait d’avec une maison de disques (Virgin), on négociait avec une nouvelle (Polydor). On devait s’éloigner du confort de la création de longue haleine. Ce qui a donné un produit très alambiqué et fourni", avance le M.C. âgé de 41 ans.
Point culminant du compact, Rap de droite dessine le portrait d’une société malade. La bande établit un parallèle saisissant entre celle-ci et l’univers hip-hop actuel, au contenu particulièrement abyssal. "On se rend compte, après toutes ces années, que le hip-hop est beaucoup plus intégré à la société qu’on ne le croyait. La musique est un reflet de notre entourage, avec de la violence, de la richesse, des femmes. Depuis plusieurs années, le rap américain procure cette image et, malheureusement, la France emboîte le pas. On tient un discours qu’on n’avait pas l’habitude d’entendre avec de la discrimination raciale, des armes. Nous nous permettons de critiquer cette idée du rap, car elle fournit des munitions à des partis de droite comme celui de Le Pen. Cependant, nous ne tentons pas de nous exclure de ce phénomène. L’idée est de voir plus clair et de ne pas l’ignorer. Malgré tout, je considère que l’album est très positif, moins grave que le précédent." Pas de doute possible, les empereurs du rap français prouvent qu’ils sont là pour rester.
IAM
Saison 5
(Polydor / Universal)
À voir/écouter si vous aimez
– Akhénaton
– La Fonky Family
– Les Psy4 de la rime