Karen Young : Condition libre
Musique

Karen Young : Condition libre

Karen Young présente son Quasi Acoustique Trio pour la dernière fois. Elle souligne avec ce spectacle une amitié indéfectible envers le contrebassiste Normand Lachapelle, rétrospective en prime.

Rencontrer Karen Young, c’est se soumettre à un univers particulier, complètement coupé de la réalité environnante qui parfois nous aliène un peu trop. "Ça doit faire depuis 1972 que je n’ai pas écouté la radio", indique-t-elle en riant. C’est une artiste à part entière, et cette attitude stricte souligne l’originalité de l’interprète. Le temps passe et la voix qui se distingue d’entre toutes continue d’explorer avec une sagesse acquise. Pour l’instant, avant la parution prochaine d’un nouveau disque au mois de mai, elle réunit autour d’elle le guitariste Sylvain Provost et le contrebassiste Normand Lachapelle. Ensemble, ils forment le Quasi Acoustique Trio pour revisiter un répertoire vaste et sans frontières. "Je ne sais pas si je dois m’attarder là-dessus, mais c’est le dernier spectacle de Normand avant sa sabbatique. Il veut s’arrêter pour pouvoir faire autre chose et mettre de côté les engagements successifs. Des choses très simples même en musique. Tu sais, les poum, poum, poum, note à note, du très concret. L’improvisation exige beaucoup et c’est bien de revenir à l’essentiel." Elle envisage aussi de retenir un piano sur scène pour le contrebassiste, elle qui se remémore encore le plaisir immense de composer avec lui dans cette formule.

Pour sa part, elle se défend bien de vouloir s’accorder ce type de repos. Son dernier projet avec le bassiste Éric Auclair en témoigne. Formé à Montréal, pour quelques chanceux, ce duo amenait la compositrice dans un habillement musical comblé d’échantillonnage. "Je suis complètement étrangère à ce type de musique, avoue-t-elle. Avec Éric, j’ai exploré un peu plus cet univers. C’est bien aussi de travailler avec des personnes d’une autre génération. J’ai de plus en plus cette attitude résignée face au travail. On se frappe à un obstacle majeur, la fatigue nous gagne et puis on se dit: "Bah! Passons à autre chose." Avec lui, il n’en était pas question. Il trouvait toujours une façon de rendre les choses faciles et pas trop compliquées. C’est ça que la jeunesse apporte, on se laisse embarquer et ça donne un nouveau souffle."

Le succès du Cantique des cantiques est resté dans le coeur de Karen Young, qui fera paraître une suite dans la même veine avec un choix de chansons et de mélodies du Moyen Âge. "Ça fait suite aux recherches que j’ai faites à l’époque", dit-elle en parlant de ses années passées à l’Université McGill. "Le monde me prenait pour une étudiante. J’étais enterrée sous les partitions, un vrai rat de bibliothèque. L’avantage, c’est que c’était des études intensives, mais sans professeur!" Un cycle passionnant et précis, qui met de côté toute forme d’exploration élargie. "Je n’ai pas le vibrato pour me soumettre aux autres répertoires classiques. Dans la musique vocale du XIVe siècle, l’écriture est modale. J’ai la possibilité de travailler les arrangements avec liberté et la mélodie porte ma voix, ainsi que la polyphonie. C’est pour ça que je suis très attirée par certaines musiques world qui ont le même procédé d’écriture, très mélodique, comme les mélodies écossaises." Un voyage musical qui nous envoûte déjà.

Le 28 avril à 20h
Au Théâtre Petit Champlain
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