Bob Walsh : Le coeur sur la main
Musique

Bob Walsh : Le coeur sur la main

Hors norme et hors mode, le très attachant Bob Walsh reprend les routes du blues et du folk avec une belle grosse poignée de chansons originales.

"Québec? Je fais plus que m’en ennuyer. Richard et Jean-Claude du Chantauteuil… La gang s’est éparpillée, ça fait de la peine… Toutte disparaît. Peut-être que je n’aurais jamais dû en partir! Kevin Parent, il vit dans la Gaspésie sans que ça nuise à sa carrière", dit Bob Walsh depuis Montréal à l’évocation de ses origines.

Né au Jeffery Hale en 1947, mère de Portneuf, père irlandais de Sillery, Bob grandit entre deux cultures, rue Saint-Laurent, puis Crémazie, Candiac, fréquente l’école Saint-Patrick, pitche des mottes de neige dans la gueule des élèves de Perreault et, avec quelques copains anglos, qui portent le look banane et cuir noir des Beatles période Hambourg, fonde son band de covers en 1963 à 14 ans. L’Élite, la Chapelle, l’Harmonique… de bord en bars de la rue Saint-Jean, bientôt la nuit du quartier latin lui appartient, et sa musique passablement folk prend les couleurs naturelles de sa voix solidement gargarisée au Johnny Walker: "Bob Dylan, Joni Mitchell, James Taylor, tout ce que je chantais prenait des tons plaintifs. On m’a vite baptisé "Le bluesman de la rue Saint-Jean"." Il galère pendant 20 ans: abus, excès… "On se croyait surhomme… on foirait… on buvait comme des cochons! Heureusement que je n’habitais pas en campagne, je serais mort sur la route à faire des allers-retours, parce qu’avec ce que ça payait, fallait en faire en crisse des bars pour gagner sa vie."

Sa véritable carrière démarre tard; 1996, le circuit des boîtes de Montréal, un gérant sérieux et surtout, un premier disque correctement distribué. Pas de regrets: "Dans ce genre de musique, quand tu sors tes affaires trop vite, tu te fais oublier rapidement. Souvent, les bluesmans, on les connaît qu’après leur mort! J’ai fait "une belle chemin"… plein de rencontres, et j’en suis emballé!" rigole-t-il doucement avec son ineffaçable accent.

Pour The Only Soul, son huitième album en 10 ans et probablement le mieux produit, Bob ratisse fermement dans son genre de prédilection: blues traditionnel, son de Chicago, jazz gras et souple et une grosse touche de folk… Des originaux offerts pour la plupart par des Québécois: Richard Séguin, Rob Lutes, Michel Jérôme Brown, Jamil et Fredric Gary Comeau, qui lui a donné Kind of Man, chanson où le vieux Bob affiche une douceur franchement inouïe… "Le jazz, le folk, ça vient du blues. Le rap, ça vient du jazz… Tout vient du vieux blues. Mais c’est difficile de les marier sans que ça ne fasse des goûts étranges."

Il a pour The Only Soul des ambitions et des espoirs à la mesure de son humilité légendaire: "On se monte une tournée tranquillement. L’été est booké jusqu’à Alma en septembre. On voudrait aussi mettre ça sur les ondes. Je ne sais plus sur quel pied prendre les radios commerciales… Heureusement, y’a Radio-Canada et les communautaires."

Entre les albums de grands classiques, les expériences de quatuor à cordes, l’album de Noël, Monsieur Bob s’avoue assez fier de ce qu’il a écrit en français, la sublime Ma toune de 2001 et quelques autres… Toutes d’humbles chansons d’amour et d’absence: "Je sais pas pourquoi… J’écris des poèmes quand je suis bouleversé, et je mets de la musique dessus. Des ballades qui correspondent à mes émotions", dit le géant de 120 kilos qui garde des frayeurs de débutant et des étonnements d’enfant. "Depuis 10 ans, depuis que je fais des salles où on vient expressément pour m’entendre, je pogne des gros papillons. Plus ça va, plus j’ai peur! Ça devrait pourtant être le contraire! Il y a quelques années, mon premier concert avec l’Orchestre symphonique de Québec… je ne me souviens même pas du premier soir tellement j’étais terrifié… Peut-être que j’y crois pas encore!"

Bob Walsh
The Only Soul
Disques Bros

Le 12 mai
Au Cabaret du Capitole
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