Tiken Jah Fakoly : Jah combat
Tiken Jah Fakoly, star du reggae africain, est la tête d’affiche de la 21e édition du Festival International Nuits d’Afrique.
Fils de griot ivoirien, Tiken Jah Fakoly est passé en cinq albums de critique politique national à star reggae internationale. Ses deux plus récents disques, Francafrique (2002) et Coup de gueule (2004), furent enregistrés au mythique studio Tuff Gong avec un dream team jamaïcain. "J’ai enregistré ces deux albums là-bas puisque je crois que, tout d’abord, il est important de construire un pont musical entre l’Afrique et la Jamaïque. Bob Marley a déjà dit avant sa mort qu’un jour, cette musique retournerait à sa source, alors j’essaie de faire ma part dans ce sens", nous expliquait-il de sa chambre d’hôtel à Paris, la semaine dernière.
Depuis les tout débuts de sa carrière vers 1987 avec le groupe Djelys, sa motivation a toujours été d’éveiller les consciences avec des textes incisifs sur la situation politique de sa Côte d’Ivoire natale. "En 1994-95, j’étais plutôt préoccupé par les problèmes locaux, de la région et de la société dans lesquelles je vivais. Maintenant que je peux faire des tournées internationales, mes chansons concernent le monde entier, affirme Tiken. Même que parfois, je dois analyser mes textes et m’assurer que le message rejoigne tout le monde." À ce sujet, sa langue lui coupe probablement l’accès à un marché anglophone non négligeable. "C’est sûr que certains territoires ne me seront accessibles qu’à partir du moment où j’enregistrerai en anglais. Je suis à perfectionner mon anglais et, Inch Allah, je devrais enregistrer dans cette langue mon prochain album, vers 2010 si tout va bien."
En attendant, d’ici quelques semaines même, un nouvel album intitulé L’Africain verra le jour, celui-là enregistré à son studio de Bamako avec ses propres musiciens. "J’avais envie d’y inclure différents styles, c’est-à-dire de revenir à des sonorités plus traditionnelles, comme par exemple avec l’utilisation de la kora de Toumani Diabaté, pour parler de problèmes africains concrets, comme l’excision, par exemple." Et au moment où il semble reconsidérer la situation politique et sociale de la Côte d’Ivoire, de persistantes rumeurs à l’effet qu’il y retournerait bientôt (à la suite de menaces de mort et de l’assassinat de plusieurs de ses amis, Tiken Jah vit au Mali depuis 2003) sont même venues jusqu’à nos oreilles. "C’est vrai, avoue-t-il. Tout le monde veut la réconciliation, tous veulent la fin de la guerre chez moi. On peut même dire que la solution est maintenant dans les mains des hommes politiques, puisqu’il s’agit en fait d’une guerre identitaire, d’une guerre politique. C’est à eux de trouver les solutions et nous, les artistes et les footballeurs, on sera là pour les appuyer!"
Le 12 juillet à 20 h avec Zal Idrissa Sissokho et Buntalo
Au Métropolis
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C.V.
Doumbia Moussa Fakoly naît le 23 juin 1968 à Odienné, dans le Nord-Ouest de la Côte d’Ivoire. Suivant les traces d’un autre grand du reggae ivoirien, l’unique Alpha Blondy, il se fait remarquer en 1993 avec la parution de textes mordants, à la suite de la disparition du président Houphouët Boigny. C’est en 1998 qu’il monte sur une première scène européenne, à Paris. Ses positions sociopolitiques l’ont forcé à s’exiler au Mali, où il vit depuis 2003. Ne ménageant ni les gouvernements africains corrompus ni ceux des grandes puissances mondiales, notamment la France, Tiken Jah Fakoly est en faveur de l’annulation de la dette des pays africains, s’est rapproché du mouvement altermondialiste et s’est impliqué dans les manifestations anti-G8.
À écouter si vous aimez
Alpha Blondy
Majek Fashek
Bob Marley & The Wailers