Les Roturiers : Country club
Les Roturiers s’amènent dans le but non dissimulé de nous faire grincer des dents. Entrevue avec Alexandre IV.
Si le country reprend du service depuis quelque temps, il présente maintenant de multiples formes… À mille lieues du country vénéré par Isabelle Boulay, et au moins aussi loin des élans cathos des albums de feu Édouard Castonguay, Les Roturiers font sonner un country au travestissement presque sérieux. Parias du genre, ils ont tiré leur inspiration musicale du country américain des années 1950 et 1960 pour jouer de contrastes et envoyer en pleine gueule l’absurdité de certaines situations sociales.
Si quelques chansons ne pèchent pas par profondeur – la démystification du pénis et les déboires du pauvre type qui subit le syndrome prémenstruel de sa bien-aimée ne visent clairement pas à faire un quelconque constat sur notre société -, d’autres auront tôt fait de surprendre, voire de choquer. Car il y a une véritable volonté d’être mauvais garnement, de déranger – ce qu’admet volontiers le chanteur, Alexandre IV. "Je me suis rendu compte que les textes satiriques, ça marchait super bien avec cette musique-là. Tu peux avoir des sujets vraiment difficiles, mais comme la musique country, c’est gentil, le contraste fait en sorte que tu peux désamorcer des textes vraiment heavy."
Avec un discours de droite qui semble assumé comme tel, Alexandre IV est à cheval sur ses principes et l’assume. Aucun détour pour faire passer ses messages. À travers l’histoire des différents personnages mis en scène dans les chansons de l’album La République, on dresse un tableau peu reluisant de notre société. Le principal intéressé n’a pas tort de souligner l’importance du rapport contrasté entre la naïveté légendaire du country et son propos parfois on ne peut plus sérieux. C’est le cas de Marcel m’harcèle, qui raconte un drame conjugal d’une rare violence. "Ce qui est l’fun, en fait, c’est de pouvoir pousser des textes comme ça pour qu’il y ait une réaction. C’est très drôle de voir la réaction des gens en show. Il y en a qui sont morts de rire, et d’autres qui sont vraiment surpris… "Y a-t-y vraiment dit ça?""
S’il y a tout un monde entre le rire et le grincement de dents, quelques-uns se rabattront sur l’adage qui dit que c’est l’intention qui compte. "C’est l’fun de faire rire, mais des fois tu peux rire jaune, aussi. Mon but c’est pas autant d’être drôle que de faire réfléchir en pointant certaines absurdités…" En cela, Les Roturiers ratissent large, touchant la situation des personnes âgées et l’euthanasie, le totalitarisme, la pédophilie, le star-system, jusqu’à la qualité des viandes issues de l’abattage industriel… "En show, il y a beaucoup de monologues aussi, je parle de différents trucs que j’ai remarqués dans les médias, des réflexions que j’ai eues… Les monologues servent à mettre les pièces en contexte, à faire des transitions entre tout ça."
Les multiples (et désastreux) constats que posent les Roturiers par le biais de leurs personnages ne cherchent toutefois pas à proposer des pistes de solution. "Pour moi, l’important, c’est que la première étape est de poser les bonnes questions. Ensuite on peut chercher des pistes de solution, mais déjà, si on pose pas les bonnes questions, ça va être bien difficile d’arriver à une réponse qui a de l’allure. Je ne cherche pas de coupables. J’ai essayé de dresser un portrait en incluant tout le monde, y compris moi-même. On a tous quelque chose de bancal." On est tous des roturiers.
Le 14 juillet
À l’Auberge Île-du-Repos
Le 20 juillet
Au Côté-Cour
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À voir/écouter si vous aimez
Mononc’ Serge
Hank Williams
Johnny Cash