Émilie Simon : Nature intuitive
Musique

Émilie Simon : Nature intuitive

Émilie Simon conjugue la scène à la création. L’artiste semble conquise par cette tournée qu’elle habille de son univers électro-idyllique. Avec une nouvelle mouture de son spectacle, elle se présente pour une toute première fois à Québec.

Végétal l’habite encore. Pour l’instant, l’auteure-compositrice-interprète ne se lasse pas de vivre avec le répertoire de son dernier disque, ce corpus enchanteur et intrigant. Elle s’adonne maintenant au plaisir de la scène en complicité avec ses musiciens, depuis un an et demi. À peine revenue d’Australie, elle s’apprête à reprendre le fil conducteur de cette tournée et elle s’y applique avec tout le génie créateur qu’on lui connaît. Au bout du fil, Émilie Simon savoure un bref moment de répit en France. La voix est douce (comment peut-on l’imaginer autrement?) et témoigne de sa nature introvertie. "La composition ne me manque pas, affirme-t-elle. J’y retourne (au studio) de temps à autre, mais je ne fais que des choses simples. Je développe certaines idées en parallèle, sans souscrire à un processus de création. C’est le processus qui ne me manque pas. Je travaille toujours un peu au développement de certaines musiques, mais je ne me sens pas apte à me lancer pour l’instant dans cette entreprise. En ce moment, je suis dans un état d’ouverture. J’écoute et je me montre curieuse. Je regarde ce qui m’entoure, je butine." Elle trouve néanmoins le temps de se prêter, après La Marche de l’Empereur de Luc Jacquet, à la réalisation musicale d’une nouvelle trame sonore. "L’expérience de La Marche fut intense et le travail pour cette création s’est échelonné sur une très longue période. Il n’y a qu’un seul projet sur lequel j’ai décidé de travailler, c’est le film de Vera Belmon (Survivre avec les loups). C’est très différent et ce n’est pas un documentaire. C’est une fiction… réalité? Je ne sais pas trop comment on dit. Un film inspiré d’un fait vécu qui devrait sortir au courant de l’année prochaine."

La voici donc attentive à ce qui l’entoure tout en incarnant cet univers si singulier qu’elle a su transposer sur scène dans les moindres détails. Une condition qui habite en grande partie ses pensées et qui l’interpelle toujours avec autant de passion. "Au départ, je ne pensais pas être aussi longtemps sur la route, indique-t-elle. Ce n’était pas prévu ainsi. Je savais que j’allais aller au bout des choses avec Végétal. Je voulais en profiter, voyager avec cet album." Ce spectacle, elle a pris le temps de le peaufiner, de le forger avec précision avec ses musiciens, pour ensuite l’assimiler à une intuition clairvoyante. L’électronique y a une place prépondérante et l’acoustique enveloppe cette masse sonore avec parcimonie. "Le spectacle a beaucoup évolué depuis l’année dernière, admet-elle. Nous avons élaboré une nouvelle distribution autour de l’électronique et des percussions. Un spectacle à trois qui s’est construit son propre univers. On a pu y intégrer quelques nouvelles chansons que je n’avais pas chantées depuis longtemps. Je ne dirais pas qu’il s’agit d’une version intime, c’est plutôt difficile pour moi d’y mettre des mots." C’est donc en compagnie de Cyrille Brissot (électronique) et Nicolas Gorge (en remplacement de Cyril Hernandez aux percussions) qu’elle présentera cette nouvelle lecture qui fait la synthèse de ses trois albums. "Les trois disques se sont enchaînés et je constate qu’il s’agit d’une longue évolution, relate-t-elle. Ils ont chacun leur caractère. Surtout le premier album, avec toute l’attention que j’avais portée sur les voix. Par contre, je n’ai pas l’impression qu’il y a eu une longue période ou des pauses entre leur création. Le style s’est transformé mais l’ensemble se marie très bien."

Elle compose avec l’électronique comme on joue avec les éléments, à l’état brut. Elle seule semble détenir le secret pour les apprivoiser. Les images sont déterminantes et doivent s’incarner dans une définition musicale juste. Munie d’un bras électronique, qui lui permet de modifier sa voix en temps réel sur la scène, accompagnée de percussions aquatiques, elle nage dans une atmosphère où les procédés d’imitation sont teintés d’un caractère baroque. "Les sonorités sont très importantes, elles sont intimement liées à mon imaginaire. C’est la même chose avec les arrangements pour instruments à cordes. Il y a une profondeur qui se dégage d’un ensemble ou d’un orchestre, les thèmes prennent vie dans l’interprétation qu’on leur donne. Ce sont des thèmes que je ne pourrais pas modifier. Lorsque nous avons enregistré et échantillonné les sons de l’eau, comme la source rythmique que j’utilise au début de la pièce Swimming, je ne transforme pas la nature du son. Ce sont des composantes que je ne pourrais pas trafiquer. Je les place et je compose avec elles, comme elles sont."

Le 4 août à 20h
À la salle Jean-Paul-Tardif
du collège Saint-Charles-Garnier