Les Maîtres Musiciens de Jajouka : Le partage de la richesse
Musique

Les Maîtres Musiciens de Jajouka : Le partage de la richesse

Les Maîtres Musiciens de Jajouka partagent leur musique avec le monde entier depuis plus de 40 ans.

Né au coeur des montagnes du Rif, dans le Nord du Maroc, l’héritage musical des Maîtres Musiciens de Jajouka se perpétue depuis 1982 sous la direction de Bachir Attar, qui l’avait reçu de son père Hadj Abdesalam Attar à qui son propre père l’avait légué et ainsi de suite. En fait, l’origine de cette musique rattachée au soufisme remonterait à la nuit des temps. Quand on lui demande si ce legs n’est pas trop lourd à porter, Bachir Attar, un sourire dans la voix, nie avec véhémence: "Pas du tout. Mon père était un musicien génial et je me sens honoré de poursuivre dans son sillage avec la musique qu’il a fait connaître au reste du monde."

"À quoi sert une richesse qui n’est pas partagée avec une agréable compagnie?" demande un proverbe arabe. C’est d’abord le peintre Mohamed Hamri qui a amené son confrère peintre et écrivain Brion Gysin, représentant britannique de la beat generation, à la découverte de la musique de Jajouka. Sur ses traces, n’allaient pas tarder à suivre les Paul Bowles, Timothy Leary, et William S. Burroughs qui fera beaucoup pour la réputation de ce "rock band quatre fois millénaire". C’est cependant feu Brian Jones, guitariste des Rolling Stones, qui, dès 1968, réalisera les premiers enregistrements de Hadj Abdesalam Attar et de ses compagnons et contribuera du coup à faire rayonner cette musique propice à la transe mystique au-delà des bornes du village. "Ces gens ont été les amis de mon père et, en quelque sorte, les ambassadeurs de notre musique en Occident."

Comme en témoignent ses collaborations avec divers musiciens modernes – des Rolling Stones à Peter Gabriel, en passant par les Sex Pistols, Sonic Youth et même le père du free jazz, Ornette Coleman -, la formation ne croit pas que la préservation de sa tradition passe par sa stagnation. "Nous voulons conserver notre musique, la garder vivante, mais ça ne nous empêche pas de nous ouvrir à d’autres influences", dit Bachir, né en 1964, qui, en marge de son travail de paladin du legs ancestral, a gravé quelques disques en solo dans les années 90 (The Next Dream puis In New York).

Le Maîtres Musiciens de Jajouka n’en seront pas à leur première visite chez nous, eux qui ont joué au Festival International de Jazz de Montréal aux côtés de Debbie Harry il y a si longtemps que Bachir Attar ne se souvient pas exactement de l’année. Le leader du groupe ne redoute pas la ghettoïsation à l’idée de se produire dans le cadre du Festival du monde arabe, au contraire. "Nous avons souvent joué à l’Institut du monde arabe de Paris, dans d’autres institutions du même genre un peu partout en Europe. En fait, il n’y a que dans les pays arabes proprement dits que nous ne tournons pas beaucoup", de déplorer Attar avant d’ajouter, en rigolant de bon coeur: "Mon seul regret, c’est de ne donner qu’un concert à Montréal, alors que nous aurions volontiers joué 20, 25 soirs d’affilée."

Le 10 novembre à 20 h
Au Théâtre Maisonneuve
Voir calendrier World/Reggae

À écouter si vous aimez /
L’Orchestre national de Barbès, Tinariwen, Bachir Attar