Swing : Chaises musicales

À son arrivée, Michel Bénac de Swing me salue chaleureusement, balaie la salle du regard, puis pose à la jolie serveuse la sempiternelle question: "Parles-tu français?"

"PAS DE CULTURE EN ONTARIO?"

L’album Tradarnac, le troisième du duo favori des jeunes franco-ontariens, s’ouvre sur cette question dans One Day, comme un détour obligé, comme le coup de fusil avant le départ: "Que les jeux commencent!" Le contact avec Swing est électrique, on aime ou on n’aime pas passionnément.

Swing est né alors que 10 000 Franco-Ontariens se rassemblaient pour dénoncer le mépris et sauver l’Hôpital Montfort. La formation était aussi, le 25 septembre dernier, du nombre – 1000 de plus – pour célébrer la Journée du lys et du trille. Toute la magie de Swing est basée sur la rencontre avec son public: "Les gens qui ne nous connaissent pas arrivent aux shows, regardent autour, hésitent un peu. Puis les vrais fans donnent le ton, se laissent aller, et ça part aussitôt!" illustre le chanteur.

Fier des 10 000 copies vendues de La Vie comme ça (2003) en tant qu’artiste indépendant hors Québec, Bénac démontre un attachement de roc à son Ontario: "Je suis désolé, mais j’adore vivre à Ottawa. Je ne veux pas me déraciner pour gagner un marché." Pari osé, mais le temps donne raison au duo. Le violoniste Jean-Philippe Goulet, originaire de Rimouski, renverse la vapeur: "En même temps, en étant associés aux minorités francophones, nos limites sont repoussées à toutes les communautés francophones internationales. Notre deuxième album nous a fait voyager partout en Europe de l’Est, en Amérique latine, on a fait le Canada coast to coast. Finalement, les frontières importent peu, c’est juste une question de contact avec les gens, peu importe la langue."

CHANTER LA POMME

Pour ce troisième album intitulé Tradarnac, le trad a pris un certain recul, les influences récentes sont portées à l’avant-plan et le ton est intimiste. Bénac, ça se voit, aime chanter la pomme. Musicalement, cet album est un mélange des plus improbables. On entend Mes Aïeux, mais aussi Bon Jovi, Omnikrom, I Mother Earth, Raôul Duguay et Postal Service. Autant de références que de pistes, entremêlées sans retenue, pour un son qui surprend sur tout l’album. "On a voulu se renouveler. Quand on a commencé à travailler, on n’était pas satisfaits parce que ça ressemblait trop à nos albums précédents. Ces chansons-là, Un bon matin, Une grande veillée, Ça va brasser, on les fait en show, on les aime toujours, mais on voulait pousser plus loin sans devenir un autre band", détaillent en alternance les complices. La seule constante, c’est les deux gars: la voix de Michel, enjôleuse, et le violon de Jean-Philippe, déchaîné. Le résultat est un album résolument pop, avec des emprunts au hip-hop, au rock et, bien sûr, un violon omniprésent.

VEILLÉES À VENIR

Les prochaines semaines défileront à une vitesse folle pour Swing. La promo qui fait rage pour l’album sera suivie du tournage d’un clip pour Encore une fois. Ensuite, les gars feront le tour pour rencontrer leurs fans: "L’album est sorti le 6 novembre en magasin partout, on a fait le pré-lancement le 5 à Ottawa et le 6 à Montréal, puis on embarque dans le train pour Toronto et on termine avec un gros party à Moncton qui tombe en plein dans la Francofête. On est occupés, mais super contents", lance le chanteur hyperactif entre deux bouchées de burger.

C’est avec appétit que Swing reprend du service: "On a d’autres projets, mais on a la chance que notre bébé soit notre principal gagne-pain. Je ne ferais que ça pour le reste de ma vie!" s’exclame Bénac. À constater l’énergie dégagée par le duo, on ne peut que conclure qu’il a finalement trouvé, debout entre deux chaises, sa place.

Swing
Tradarnac
(La Fabrik, DEP)

À écouter si vous aimez / Yelo Molo, Paul Demers, Mes Aïeux

C.V.

Le groupe Swing naît à la fin du dernier siècle des rencontres de Michel Bénac et Bobby Lalonde, et du trad avec les musiques urbaines. En 1999, l’album La Chanson s@crée met Swing sur la carte. Les succès Un bon matin et Ça va brasser font de Swing la révélation des Prix Trille-Or 2001. Le groupe multiplie les apparitions et se forge une verdoyante base de fans. 2003, sortie de La Vie comme ça et changement de garde: Jean-Philippe Goulet ravit l’archet de Lalonde et réaligne le son de Swing vers un amalgame aux limites du rock. Les années suivantes sont parsemées de réussites et de voyages: le groupe visite l’Europe de l’Est, l’Amérique du Sud, remporte nombre de prix Trille-Or et revient en 2007 avec Tradarnac. www.legroupeswing.com