Elizabeth Sheppard : Libérée par le jazz
Elizabeth Sheppard donnera libre cours à ses nouvelles inspirations sur la scène du Cercle. Un préambule à son deuxième disque qu’elle enregistrera sous peu.
Avec son premier album intitulé Start to Move, elle s’est illustrée au dernier gala des prix Juno et a même pu se faire remarquer sur la scène londonienne après son passage aux Live Sessions de Gilles Peterson sur les ondes de la BBC. Les opportunités se bousculent depuis trois ans pour celle qui a choisi le jazz après avoir étudié à McGill en musique classique. Un champ d’études auquel se conjuguait un intérêt marqué pour l’improvisation, ce qui fut à l’origine de ce virage professionnel.
Par la force des choses, elle a poussé plus loin cette passion tout en cultivant un appétit pour la liberté et l’expérimentation. Pas question pour elle de se confiner dans un créneau esthétique hermétique et contraignant. "C’est un peu ironique, remarque-t-elle. Je n’étais pas capable de visualiser une carrière dans la musique classique comme interprète. Premièrement, c’est trop exigeant, et c’est un milieu qui est très austère lorsqu’on y pense. Le décorum des salles de concert et le grand répertoire… Il faut admettre que ce n’est pas un genre de musique qui est ouvert à tous. Je dirais même, et c’est malheureux, que c’est porté à disparaître. Et pourtant, en jouant de plus en plus sur les scènes jazz, je me suis rendu compte qu’il y a aussi une dynamique très élitiste, alors que c’était l’une des raisons qui m’éloignaient du monde classique. Il y a encore certains cercles fermés qui sont très réfractaires au métissage. J’ai encore un peu de difficulté à me considérer comme une artiste jazz à part entière. J’aime décloisonner les genres et cultiver cette liberté."
Les circonstances en ont voulu ainsi pour celle qui ne tient pas en place et qui se décrit comme une nomade incorrigible. Un petit démo en poche et un contact lui ont suffi pour lui ouvrir les portes de la compagnie de disques Do Right Music à Toronto, plus connue dans la sphère hip-hop et électro que dans celle du jazz. "J’étais fiancée avec Andy Bernstein (Abdominal), un excellent MC qui est encore avec cette étiquette de disques. Il m’a présentée à John Kong, qui en est le propriétaire, et le courant est passé. Et puis maintenant, avec Andy, nous faisons une garde partagée pour notre chien", constate-t-elle en riant.
Avec ce premier disque concluant, on se retrouve devant une soul jazzée à laquelle se greffe une voix limpide sur des thèmes empruntés à Lionel Hampton, Chick Corea ou encore Clifford Brown, revisités avec soin en compagnie du contrebassiste Scott Kemp et de Colin Kingsmore à la batterie. La suite est déjà en cours et le trio se concentre sur son nouveau répertoire. "J’assume l’ensemble des arrangements et je leur expose, explique-t-elle. Je n’ai jamais une seule idée en tête pour un album. Certaines pièces se doivent d’avoir un élément funk ou une rythmique un peu plus dub, c’est comme on le sent. Je reste toujours très ouverte à leurs opinions et j’apprends encore beaucoup. Pour l’instant, nous prenons la peine de jouer le nouveau matériel sur scène le plus possible avant d’entrer en studio. Au contraire du premier album, cette fois-ci, nous voulons assimiler l’ensemble des compositions pour qu’elles nous collent à la peau avant de nous enfermer pour trois jours en studio cet hiver."
Le 29 novembre à 21h
Au Cercle
À écouter si vous aimez /
Clifford Brown, Astrud Gilberto, Chet Baker