Tricot Machine : 2X2 Rassemblés
Musique

Tricot Machine : 2X2 Rassemblés

Tricot Machine vit le plus beau success story 2007 de la scène musicale indépendante. Sans tomber dans une mode passagère, le couple réactualise la chanson québécoise.

Sur la pochette de son premier disque éponyme, sur les unes des magazines comme sur scène et en musique, Tricot Machine transpire la romance. Dans les grands yeux bleus de Catherine Leduc se lit une tendresse infinie pour Matthieu Beaumont, jeune homme calme, mais aussi passionné lorsque vient le temps de commenter les prouesses scéniques de sa dulcinée. Si les couples en musique sont chose commune les Dears en comptent deux; Régine Chassagne et Win Butler pilotent Arcade Fire et nous savons tous que Patrick Norman sort avec sa guitare, les artistes refusent souvent d’afficher leur proximité. Cachez cet amour que je ne saurais voir.

Or chez le duo originaire de Trois-Rivières, amour et musique semblent indissociables. Une image authentique qui n’a rien de calculé. "Nos tounes parlent d’amour, et je me fous pas mal de perdre des admirateurs masculins parce que je ne suis pas célibataire", rigole Catherine assise dans un bar aux côtés de son amoureux tout aussi impliqué: "On est un couple avant de faire de la musique. Lorsqu’on se retrouve sur scène ensemble, on ne fait qu’un", clame le biologiste de formation.

UNE HISTOIRE D’HAMEÇON

L’embryon Tricot Machine naît en 2002, lorsque l’hameçon décorant le sac à dos de Matthieu s’accroche accidentellement au chandail d’un ami de Catherine dans un bar trifluvien. "Le temps qu’il retire le crochet, nous avions fait connaissance, se rappelle Catherine. Mais je l’avais d’abord spotté au cégep quatre ans avant. Il portait alors des lunettes en corne noire à la Hanson Brothers et une veste verte. J’allais voir sa face sur la photo de l’équipe de soccer de l’école pour laquelle il jouait." À l’époque, l’athlète transpire sur les terrains gazonnés, mais aussi lors des répétitions de Brain Pukers, groupe punk avec lequel il part en tournée les fins de semaine pour notamment jouer Le Trou, une composition qui, après une dose massive de Valium et un tout nouveau texte, se retrouve sur l’album de Tricot Machine écoulé à quelques milliers d’exemplaires depuis son lancement en mars dernier.

Au même titre que Les Peaux de lièvres ou Un monstre sous mon lit, la pièce compte parmi les chefs-d’oeuvre du compact qui a valu au couple deux Félix au gala de l’ADISQ (Révélation de l’année et Pochette de disque de l’année) et deux récompenses au Gala GAMIQ (Meilleur album chanson et Révélation de l’année). Jouée au piano, elle vous remue le coeur comme le fait Richard Desjardins sur Tu m’aimes-tu? Comparaison flatteuse, elle dénote toute la profondeur du combo. Son réel talent de composition, son authenticité désarmante et sa richesse textuelle en font bien plus qu’un groupe à la Passe-Partout, comme le prétendent certains de ses détracteurs. Car la naïveté et l’enthousiasme enfantins font aussi partie du tableau. L’Ours, Pas fait en chocolat, Les Oreillons et Histoire de Mitaine dégagent, malgré le sérieux de leurs propos, une bonne humeur accessible autant aux bambins de cinq ans qu’aux quinquagénaires.

Tricot Machine se met en branle à l’automne 2004. "Au début, je voulais jouer de la musique cool et moderne. Matthieu et moi avions d’abord formé un groupe électro-pop dans la mouvance de Stereo Total, mais nous étions trop éparpillés. Puis, parce que c’était plus facile de jouer à deux dans notre salon, notre projet s’est inscrit dans une lignée plus près de la chanson traditionnelle québécoise. Le résultat m’a longtemps laissée perplexe. Je n’étais pas certaine de vraiment aimer ça. Dès que David Brunet est embarqué dans le projet, j’ai toutefois pris ma place et appris à bien vivre avec nos compositions."

DUO À QUATRE TÊTES

Tout comme Daniel Beaumont, frère de Matthieu qui écrit la majorité des textes de l’album, David Brunet fait partie intégrante du duo à quatre têtes. Entre juillet 2006 et janvier 2007, l’ex-Doc et les Chirurgiens et collaborateur de Yann Perreau a réalisé l’album en plus d’en composer de nombreux arrangements juste assez osés pour sortir la formation du passéisme de ses références. La poignante fanfare à la fin d’Un monstre sous mon lit, c’est son idée. "Il a donné une autre dimension aux pièces piano/voix que nous composions, précise Matthieu. Rencontrer quelqu’un qui aimait notre travail en plus de le renforcer nous a donné confiance. C’est ce qui me fallait pour assumer le côté très concret de Tricot Machine, renchérit Catherine. Mes textes et ceux de Daniel sont très personnels et n’ont rien d’abstrait. Les sens n’y sont pas cryptés. Ce sont de vraies histoires, chantées par de vrais humains."

Aujourd’hui, celle qui tricote réellement pour gagner sa vie tient un discours qu’elle croyait impossible il y a trois ans. "Pour la première fois de ma vie, je suis bien dans ce que je fais. Dans tous les autres emplois que j’ai eus, je me sentais dysfonctionnelle et complètement débile. Je ne suis tout simplement pas rentable comme employée. J’ai travaillé longtemps dans un magasin de disques, mais j’avais du mal à me concentrer. J’étais bien trop lunatique. Pourtant, je ne suis pas folle, mais j’avais l’impression que le monde ne me comprenait pas. Là, je me sens à ma place."

Le 1er décembre à 20h
Salle Anaïs-Allard-Rousseau
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