RRIICCEE : Expéri-mental

Difficile de décrire ce qu’est RRIICCEE, le nouveau projet musical du cinéaste-comédien Vincent Gallo et de l’ex-guitariste de Hole, Eric Erlandson. Difficile parce que la bande, accompagnée de Rebecca Casabian et de Nikolas Haas, n’a jamais rien enregistré et n’a pas l’intention de le faire; difficile aussi parce que RRIICCEE improvise toute sa musique en concert. Rien n’est conçu au préalable, tout se concrétise une fois le groupe sur scène. Ainsi, pas une performance ne ressemble à l’autre. Alors, qu’est-ce que RRIICCEE? Un groupe de rock/électro expérimental? Un combo de musique actuelle? Un quartet de free jazz? Une grosse joke? "Nous sommes guidés par la réaction de la foule. Elle nous permet de savoir rapidement si on est sur une bonne piste ou non. À partir de là, on développe davantage l’idée. J’espère que nous arriverons à nous ouvrir complètement face au public durant cette tournée. Il faudra éviter les malaises", s’inquiète Vincent Gallo qui, malgré tout, affirme n’avoir jamais été aussi excité de toute sa vie.

ANTI-CABARET

"Jouer de la musique "préparée" est certainement intéressant pour bien des gens, sauf que ce ne l’est plus pour moi. Mais la principale raison pour laquelle nous avons créé ce groupe est d’essayer de faire de la musique qui est plus intéressante que ceux qui la font. Et une des façons d’y parvenir est de se rendre disponible, ouvert à l’inconnu, à ce qui sort de ta "zone de confort". Si tu limites ta création à ce que tu connais et comprends, c’est vraiment un geste qui manque d’intelligence, ce n’est pas très dynamique. Nous créons la musique en écoutant les autres, en étant ouverts comme tout le monde, mais aussi, et voilà la différence, en restant extrêmement conscients et réfléchis et non en mimant, en répétant la même formule propre au cabaret. Il y a une façon de jouer de la musique préparée et d’être dans le bon état d’esprit. Mais la grande majorité des musiciens tombent vite dans les clichés propres à la musique préparée et n’évoluent pas", théorise celui qui a réalisé les films Buffalo 66 et The Brown Bunny. "Tu sais, les Red Hot Chili Peppers, des types vraiment très sympas, répètent la formule cabaret depuis des années. Donc, en 20 ans, ils ont fait du chemin, mais on ne peut pas dire qu’ils aient vraiment évolué. Même des groupes comme Sonic Youth, qui prétendent évoluer, sont coincés dans une sorte de moule et n’arrivent pas à s’en extraire. Si je prends 10 albums de Sonic Youth et que je change les dates de parution dessus, tu ne pourrais même pas deviner les époques où ils ont été faits. La limite de leur musique correspond à leurs propres limites en tant qu’êtres humains. Je crois qu’une bonne oeuvre est plus intéressante que moi, que ma vision et mes raisons pour faire cette oeuvre. Si tu crois vraiment que tu es en complet contrôle et que tu peux travailler, répéter, intellectualiser et te consacrer complètement à ta musique, dans un sens, tu investis de l’énergie à croire que tu es en contrôle, mais moi, je ne crois pas que tu le sois."

La question qu’on se pose, et à laquelle ni Vincent ni les autres membres du groupe ne pourraient répondre puisque, au moment où a été réalisée cette entrevue, ils n’avaient pas encore donné de concerts tous les quatre ensemble, concerne la réaction du public. Qui est prêt pour ce genre de performance sachant qu’il ne s’agit pas de free jazz ou de musique actuelle et que les musiciens ne sont pas réputés pour être des as? "Si je ne te disais pas qu’il s’agit de musique improvisée, tu ne t’en douterais probablement pas! Ça semble être de la musique préparée, mais ce n’en est pas. Nous arrivons à créer des musiques que nous n’avons jamais entendues et qui ne peuvent être rattachées à aucun autre style musical. Nos concerts ne dureront guère plus d’une heure. Je ne peux pas te dire combien de temps pourrait durer un morceau ni s’il sera énergique ou doux. Tu sais, lorsque j’étais dans le groupe Gray avec Jean-Michel Basquiat, nous avons fait un concert de 11 minutes, et c’était un des shows les plus extraordinaires que j’ai jamais faits", ajoute l’artiste multidisciplinaire.

Donc, RRIICCEE est-il une sorte de statement? Est-ce que le groupe veut montrer que l’art est quelque chose de spontané et qu’une oeuvre doit être gardée à sa forme la plus brute, la plus approximative? "Non, non! Pas du tout, insiste Vincent Gallo. Mais en ce moment, ça me semble idiot de lancer un album, de m’embarquer dans tout le processus de création d’un album. Je ne crois qu’aux performances live. On n’enregistre rien!"

Le 12 décembre
Au Club Lambi
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À écouter si vous aimez /
Le rock expérimental, le free jazz, la musique actuelle