Raúl Midon : Bienvenue dans son monde
Deux mois après sa précédente visite à Montréal, Raúl Midon revient avec ses guitares, son humour, sa candeur et les chansons de ses deux excellents CD, State of Mind et A World Within a World.
Sur la route depuis août, le chanteur et guitariste ne s’est accordé de répit que pour célébrer les Fêtes de fin d’année… avant de reprendre cette tournée en solo qui l’a conduit des États-Unis vers l’Europe, avec deux brèves incursions au Canada. "J’ai eu la chance de me produire devant des publics formidables et très différents. Le public montréalais rappelle beaucoup celui de Paris: participatif et bruyant. Rien à voir avec le public britannique, beaucoup plus réservé dans son accueil."
Certes, Midon n’a pas à se plaindre de la réception chaleureuse réservée par la critique et le public à ses mélodies accrocheuses et sophistiquées, qui intègrent soul, folk, blues, jazz et différentes traditions musicales latinos. Il déplore toutefois que certains détracteurs s’entêtent à n’entendre que le côté léger et festif de ces chansons, pourtant pas toutes aussi frivoles qu’elles pourraient en avoir l’air. "Dans des chansons comme All the Answers, le deuxième niveau de lecture semble échapper à bien des gens. Song for Sandra illustre des aspects de l’ambivalence des émotions humaines qu’on n’aborde pas toujours forcément et surtout pas dans une chanson pop." En effet, adressée à sa mère décédée, la chanson met en musique le ressentiment de l’enfant qui s’est senti abandonné trop tôt.
Bébés prématurés nés d’un père argentin et d’une mère afro-américaine, Raúl Midon et son jumeau Marco sont ressortis aveugles de leur long séjour dans un incubateur, sans protection adéquate pour leurs yeux. Il n’en fallait pas plus pour que la presse le rapproche de Stevie Wonder; mais même en faisant abstraction de cette cécité qu’ils ont en commun, Midon admet une certaine parenté stylistique entre l’auteur d’Innervision et lui. "Stevie Wonder est fantastique", ajoute-t-il cependant, comme pour nuancer. "Il est l’un des rares à avoir atteint simultanément un succès commercial et un triomphe sur le plan artistique. Et ça, c’est un idéal."
Féru de littérature, admirateur inconditionnel de Randy Newman ("Je voyage avec toutes les chansons du coffret Guilty: 30 Years of Randy Newman dans mon iPod, c’est merveilleux!"), Midon n’est pas loin de penser, comme Serge Gainsbourg, que la chanson populaire est un art mineur dont seuls quelques génies ("des gens comme Cole Porter, Randy Newman, Stevie Wonder") savent transcender les limites. Encouragé par ses collaborations avec Herbie Hancock ("un géant!"), le guitariste virtuose n’exclut pas de s’aventurer de plain-pied dans le jazz. Et même s’il s’est remis à l’écriture de nouvelles chansons, il n’a pas l’intention de les intégrer au programme de ses concerts. "Ce n’est plus comme à l’époque où j’étais un jeune chanteur folk qui se produisait dans les bars; je veux offrir au public le meilleur de moi-même et non pas expérimenter avec du matériel inachevé."
Le 19 janvier à 20 h
Au Cabaret
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À écouter si vous aimez /
Stevie Wonder, Randy Newman, Bill Withers