Tomas Jensen : Voyage en solitaire
Musique

Tomas Jensen : Voyage en solitaire

Tomas Jensen s’émancipe et sort Quelqu’un d’autre, un premier album sans ses Faux-Monnayeurs.

Ainsi donc le cosmopolite Tomas Jensen se libère. Fini le temps de la musique festive, endiablée, d’avec ses acolytes des Faux-Monnayeurs. Dans son sang coulent toujours l’Argentine, la France et le Québec (où il habite depuis neuf ans), mais ses chansons résonnent désormais d’une autre manière, plus personnelle: "La pochette et le titre font référence à la fin des Faux-Monnayeurs. Je suis composé de différents personnages. J’aime cette idée du morcellement. Je deviens quelqu’un d’autre, je suis avec quelqu’un d’autre."

De cette fracture – visuelle et sonore – demeure tout de même une grande cohésion, bizarre et cocasse. Ses nouvelles chansons explorent différentes avenues (rock, électro, latin, etc.) mais qui toutes se rejoignent en une signature singulière, celle de Jensen. La réalisation et les arrangements ont été confiés à François Lalonde (Leloup, Lhasa) qui a fait un excellent boulot pour canaliser les divers courants: "François m’a apporté son expérience extraordinaire, sa sensibilité. On a bien discuté avant de commencer le projet, et il a vraiment compris ce que je voulais. On était sur la même longueur d’ondes. Il est capable de retranscrire la texture du son. Je voulais aussi travailler avec lui parce que c’est un batteur-percussionniste, et je souhaitais que les percussions soient très arrangées."

Le cd hypnotise, porté en force par les percus et la voix scandée de Jensen. Il ne donne pas envie d’entrer dans la danse mais dans la transe, comme une pulsation. Il y a même, de-ci de-là, quelques couleurs arabes qui ajoutent à l’envoûtement: "Le côté arabisant, ce n’est pas nouveau dans ma musique, mais ça ressort peut-être un peu plus à cause de l’orchestre à cordes, à qui on avait demandé des arrangements contemporains."

C’est un disque libre et éclatant. Désormais, Jensen voyage en solitaire. Son groupe, après six ans ensemble, avait fini par le gêner: "Je me sentais prisonnier du concept, de ses limites. On avait essayé plusieurs fois de s’en aller dans d’autres directions, sans jamais vraiment réussir. À la fin, ça commençait un peu à me peser, pour l’écriture, avec un peu des thèmes imposés. Avec les Faux-Monnayeurs, j’avais du mal à écrire des choses plus personnelles."

Jensen se permet maintenant une promenade en solitaire bien entouré. Il invite Olivier Langevin à jouer de la guitare, Jean Derome du saxophone et Guido del Fabbro des cordes. Son ancien public en sera médusé, et son nouveau, enchanté, tant il y a une large marge entre le chanteur d’hier et celui d’aujourd’hui. Une métamorphose.

Tomas Jensen
Quelqu’un d’autre
(GSI)

À écouter si vous aimez /
Caetano Veloso, Marc Déry, Antoine Gratton