Corneille : Soul Survivor
Avec classe, Corneille a chanté ses Rêves de star si fort, si bien que ceux-ci le ramènent au Casino de Montréal pour une série de concerts qui s’annonce triomphale. Seul au monde? Plus maintenant…
"Le poids de la neige ne saurait briser le soul", pourrait-on dire, en pastichant un proverbe nippon, pour résumer l’enviable trajectoire de Corneille, Québécois né en Allemagne de parents rwandais, qui faisait paraître l’été dernier un troisième album studio, le premier en anglais, déjà promis à une carrière internationale. En effet, après avoir cartonné au pays du Soleil levant, The Birth of Cornelius reparaîtra cette année en édition américaine, sous la prestigieuse étiquette Motown, associée à la gloire des Marvin Gaye, Smokey Robinson, Stevie Wonder et autres figures de proue de la soul classique.
Au fait, avec ce troisième opus qui renoue avec l’esprit soul du premier (après la parenthèse plus franchement pop des Marchands de rêves), Corneille se réclame-t-il de ces légendes? "Je n’ai pas la prétention ni l’ambition de faire revivre ces fantômes. Et même si j’ai beaucoup d’admiration pour cette école, je ne m’identifie pas corps et âme à elle. Ce qui m’influence, ce qui m’intéresse chez les artistes que j’admire, ce n’est pas simplement leur répertoire, mais la manière dont ils ont mené et continuent de mener leur carrière à long terme. Il y a des gens qui le font tellement bien, comme Sting ou James Taylor, des gens qui ont déjà légué un héritage tout en conservant leur pertinence aujourd’hui."
Certes, à notre époque de mélange des genres, les étiquettes aujourd’hui valent ce qu’elles valent, mais à quel rayon l’artiste classerait-il plus volontiers sa musique: soul ou pop? "Les deux, comme dans le temps de Motown justement. En fondant son label, le but de Berry Gordy était de faire entrer la soul des années 50 dans la pop, d’amener la musique afro-américaine au mainstream. Depuis longtemps, la pop est capable d’absorber toutes les influences, au-delà des différences culturelles, ethniques, sociales. Il est possible de faire de la pop intelligente et personnelle, comme Sting, et je pense que ma musique est un reflet de cette conviction et une fusion de mes influences."
Ces paroles, l’auteur-compositeur-interprète les profère avec une sérénité manifeste, celle du survivant qui a enfin trouvé à la fois paix intérieure et bonheur conjugal (auprès de sa compagne Sofia de Medeiros, qui prépare elle aussi un album, avec la collaboration de Corneille), même s’il portera toujours en lui les traumatismes du passé, ainsi qu’en témoigne sa chanson I’ll Never Call Home Again, liée aux lendemains du génocide qui lui a ravi toute sa famille. On le sent toutefois fébrile à la veille de cette rentrée montréalaise où il présentera pour la première fois l’intégralité des chansons de son album anglais à un public qui l’a connu essentiellement comme un artiste francophone. Nerveux, notre Corneille? "Un petit peu, admet-il. À cause de la délicate question de la langue ici. J’étais beaucoup moins nerveux au Japon, par exemple, parce que le public et la presse n’avaient pas d’attentes à mon égard. En même temps, je vois ça comme un beau défi, une occasion de retrouver le sentiment d’amorcer quelque chose, un nouveau chapitre de ma carrière."
Du 13 au 16 février
Au Cabaret du Casino de Montréal
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À écouter si vous aimez /
Marvin Gaye, Smokey Robinson, Stevie Wonder