Érick D'Orion : Le son au tapis
Musique

Érick D’Orion : Le son au tapis

Érick D’Orion endosse le rôle de commissaire et réunit dans son cabaret audio des artistes qui cultivent le son à sa source.

C’est dans les studios d’Avatar, au complexe Méduse, que la rencontre se fait autour d’un jeu d’échecs. Un jeu d’échecs trafiqué et lié à un ordinateur portable qui lit des fréquences électriques provenant du damier. Une forme de traduction de la position des pièces sur l’échiquier… Vous suivez? Ce logiciel est en contact avec des tables tournantes sur lesquelles se trouvent des vinyles. La rotation des tables tournantes est modifiée en fonction de la disposition des pièces sur le jeu. Cette installation qui est en train de s’échafauder, Érick D’Orion l’explique sans fausse modestie, le sourire aux lèvres, visualisant déjà le résultat dans une salle d’exposition. Un jeu qui pourrait traduire en musique (ou en sons) une partie d’échecs entre Che Guevara et Fidel Castro, par exemple. Le déroulement d’une partie historique (on dit que le Che a gagné) deviendrait une partition.

Chez le compositeur-concepteur, les thématiques sont fréquentes. Que ce soit l’auteur Kurt Vonnegut ou encore le roman L’Évangile du bourreau des frères Vaïner, chaque inspiration est un flash supplémentaire qui contribue à motiver une conception ouverte au questionnement. "Tu vois le jeu d’échecs? Ça va s’appeler Autour de Duchamp, explique-t-il. Je m’inspire beaucoup des courants de l’histoire de l’art. Autant le futurisme que la musique concrète et le dadaïsme… Dernièrement, j’ai reçu quelques disques de poèmes dada qu’un ami a trouvés à Paris, des poèmes sonores. Pour le cabaret, j’ai décidé d’orienter ça vers le dadaïsme poétique et de retourner à la source. À partir de certains poèmes, dont ceux de Tristan Tzara, je ferai de l’improvisation avec une basse et des walkies-talkies, qui eux seront en interférence."

L’artiste sera le microcommissaire d’un cabaret audio dans le cadre du Mois Multi. Le duo Kathleen Kelly ainsi que Nicolas Bernier et Simon Trottier se joindront à lui pour une séance de performances dans un contexte décontracté. Ces artistes travaillent à partir de sons analogues, une condition sine qua non pour Érick D’Orion. "Je pense qu’une personne qui n’est pas au fait de mon travail audio et qui se présente pour la première fois à l’un de mes shows va trouver ça relativement intéressant. Il y a du rythme dans ce que je fais, et même, je te dirais qu’il y a du mouvement! C’est très gestuel! Ce n’est pas une musique statique. Elle passe d’un point A au point Z. Dans ces circonstances, une personne qui s’initie pourra y trouver son compte. Mais si quelqu’un s’imagine que j’ai un ordinateur portable parce que je suis un DJ qui fait de la musique techno… il va prendre une méchante débarque!" constate-t-il en riant.

Point d’élitisme dans le travail du concepteur et point de compromis non plus. L’intention artistique est dans la recherche et la mise en scène sonore. Une finalité qui trouve sa raison d’être. "Il faut faire attention avec les points de repère. Si quelqu’un se met en face d’une toile de Paul-Émile Borduas pour y voir un cheval… je pense que cette personne est mal partie, elle risque d’être déçue. Mais une personne qui accepte l’abstraction et qui d’une certaine manière se dirait à elle-même: "Donne-moi-z-en D’Orion, je vais me débrouiller!", c’est sûr qu’elle va y trouver son compte."

À lire également, notre article sur le Mois Multi.

Cabaret audio, du 14 au 16 février à 23h
Au café L’Abraham-Martin

À écouter si vous aimez /
Sun Ra – Pierre Schaeffer – Pierre Henry