Chris Botti : À l’italienne
Donnez à Chris Botti une Martin Committee, un bouquet de mélodies romantiques, une section rythmique du tonnerre… et il sera gai comme un Italien quand il sait qu’il aura de l’amour et du vin.
Né dans l’Oregon d’une mère d’origine irlandaise et d’un père italo-américain, Chris Botti a vécu deux ans dans la région de Florence durant son enfance. Faut-il alors entendre son récent album Italia comme la conséquence de l’héritage paternel? "Je ne crois pas qu’il faille être italien pour apprécier le romantisme à l’italienne, qu’il s’exprime via la mode, la cuisine, la musique, le cinéma ou même les automobiles. On n’a qu’à prononcer le mot Italie pour qu’un lien immédiat s’établisse avec le romantisme, qu’on y soit allé ou pas."
Ce romantisme se déploie à grand renfort de violonnades sur son troisième album consécutif gravé par le combo de Botti augmenté d’un orchestre à cordes – et d’invités de marque dont le ténor Andrea Bocelli. Bien des puristes, au rang desquels je ne me range pas, s’expliquent mal qu’on puisse apprécier le blond play-boy à la trompette dorée, chez qui pourtant on retrouve une qualité d’émotion que ne renierait pas son idole, Miles Davis. Certes, ses détracteurs classeraient plus volontiers sa musique au rayon de la pop instrumentale qu’à celui du jazz. Et il est vrai qu’au contraire de ses concerts, où il s’autorise un jeu parfois plus funky, ses disques témoignent d’une volonté délibérée de séduire l’oreille plutôt que de révolutionner la musique. "Sur disque, je cherche à distiller un climat de détente (chill-out), dans l’esprit de Kind of Blue, vous comprenez." On comprend l’exemple, même si l’ex-sideman de Sting précise avec humilité qu’aucun de ses albums n’est à placer sur un pied d’égalité avec ce chef-d’oeuvre qu’il considère lui aussi comme l’équivalent jazzistique de la chapelle Sixtine.
"En fait, c’est le succès de A Thousand Kisses Deep qui a convaincu la Columbia de me laisser enregistrer les CD qui ont suivi, avec grande formation, dans la lignée de Clifford Brown With Strings ou Hot House Flowers de Wynton Marsalis." Mais ce qui distingue le plus récent opus de Botti des précédents, c’est la présence de jazzmen de tout premier plan, tels que Billy Childs au piano, Bob Hurst à la contrebasse, Mark Whitfield à la guitare et Billy Kilson à la batterie, qui ont remplacé les musiciens de studio et les synthétiseurs auparavant omniprésents. "Toute la différence est là", me concède le musicien qui s’enorgueillit de souffler désormais dans une Martin Committee des années 40, achetée au prix fort à un collectionneur, une trompette du même modèle que celle de Miles. "À écouter les disques de Miles, j’ai compris que c’est lorsqu’il jouait dans un contexte organique, entouré d’instruments naturels, sur ses disques avec Red Garland, Bill Evans ou Herbie Hancock, que sa trompette sonnait le mieux. C’est ce son-là que je recherche."
Le 22 février
Au Théâtre Maisonneuve
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À écouter si vous aimez /
Miles Davis, Chet Baker, Clifford Brown