Hawksley Workman : Faire le beau
Musique

Hawksley Workman : Faire le beau

Avec Between the Beautifuls, oeuvre élégante et racée, Hawksley Workman consolide sa réputation d’esthète patenté.

Il est de retour. Sur Between the Beautifuls, disque luxuriant, Hawksley Workman donne de nouveau libre cours à un talent qui s’exprime le mieux dans la bravade, l’artifice et la profusion. Chez d’autres, un tel cocktail condamnerait à l’auto-congratulation, à la prétention la plus insupportable. Workman, conscient de la qualité extrême de son art, y puise pourtant une essence féconde.

Beaucoup d’oreilles avaient été déçues par la parenthèse austère et automnale ayant donné naissance à Treeful of Starling, il y a deux ans. En fait, ce disque dépouillé, voire inabouti, contenait le ferment de Between the Beautifuls. Le musicien confirme que les deux disques explorent le même jardin, mais sous un jour différent.

La palette de Between the Beautifuls, développée au printemps, distille une sève pure, une lumière perçante, des couleurs vives. Plus que jamais, la démarche de Workman paraît tributaire d’une certaine conception de la beauté, au sens romantique du terme. "La beauté est une obsession chez moi, avoue le musicien. Quelqu’un me faisait remarquer que j’emploie le mot beautiful dans presque chaque chanson. Je pense que c’est lié au fait que, à l’école, j’étais le petit gros de la classe et que les autres élèves se moquaient de moi. On devient obsédé par une idée très abstraite de la beauté, qui devient un idéal à atteindre. C’est pourquoi les gens très beaux sont pour moi des êtres étranges, et les belles choses créées par la nature acquièrent une qualité mystique et élusive."

EN AVANT COMME AVANT

Sa quête du beau continue de faire avancer Hawksley Workman. Après dix ans dans le métier, l’artiste ontarien est toujours mû par l’irrépressible élan des débuts. "C’est le sentiment de n’être pas encore parvenu à destination, dit-il. Les réponses que je trouve suscitent davantage de questions. Le monde nous incite à penser que, arrivé à un certain stade de notre vie, on est censé s’être trouvé. Ce n’est pas le cas en ce qui me concerne. J’ai 32 ans, mais je découvre constamment de quoi me remettre en question. Ça peut paraître un peu lourd, se réveiller chaque matin avec le doute en tête, mais ça demeure pour moi stimulant."

Musicien accompli et appliqué, Workman touche à peu près à tous les instruments sur Between the Beautifuls – il est particulièrement fier de son jeu de batterie sur What Would Say To Me, Lord?, hybride gospel western très réussi. Ses critères d’excellence s’appliquent également à l’écriture des textes, un exercice abordé avec une sensibilité littéraire appartenant à une autre époque. "Je sens que le langage que j’emploie n’est pas tout à fait dans le coup, avoue Workman. Je ne crois pas que ça soit vraiment cool de placer le mot rhubarbe dans une chanson. Mais je trouve une grande beauté à certains mots vieillots et j’aime les confronter à la modernité. Ma grand-mère était une grande conteuse d’histoires. Je dirais que j’ai repris sa façon de manier la langue." Il y a une mamie, quelque part, qui doit être fière de son petit-fils…

Le 28 février à 19h
Au Centre Bronson

À écouter si vous aimez / Ron Sexsmith, Jeff Buckley, The Jayhawks