Jorane : Faire face à la musique
Musique

Jorane : Faire face à la musique

À quelques jours de son concert au Centre culturel de l’Université de Sherbrooke, Jorane nous présente son plan de match.

Jorane n’a guère le temps de souffler ces jours-ci. Une grande virée québécoise est en branle. On se sent presque mal de réquisitionner une heure de son temps. "Non, non, ça va", insiste-t-elle. De fait, la jeune femme qui se pointe à notre rendez-vous semble reposée. Un peu pressée, peut-être, mais point stressée. Fébrile, plutôt. Les spectacles lui fournissent une source de motivation particulièrement vive.

LA THÉORIE DE L’ÉVOLUTION

Elle pourrait jouer safe, comme nombre de fonctionnaires du showbiz. Mais non, vous pensez bien. Le spectacle construit autour de Vers à soi, créé à l’automne, a déjà commencé à évoluer. "Il y a des trucs que je veux enlever, d’autres que je veux ajouter, d’autres encore que je veux changer de place, confie Jorane. Au début, ça marchait très, très bien. Étrangement, le pacing était parfait, il y avait un bel élan. Mais on dirait qu’une fois que tout est assis, j’ai envie de faire bouger les choses."

On ne parle pas ici de bouleversements majeurs, mais de bonifications indissociables du processus créatif. Soigner les petites choses, comme on dit. "C’est de l’ordre du fignolage, confirme Jorane. C’est de travailler encore, parce que tout n’est pas rendu à point. Je suis toujours en construction. C’est difficile de parler de quelque chose encore en devenir, mais ce qui est déjà établi, c’est l’aspect mouvement. Le mouvement est intégré au spectacle. C’est très fluide. Pierre-Philippe (Côté: chant, claviers, guitare et contrebasse), Myles (Perkin: chant et contrebasse) et Stefan (Schneider: batterie) touchent plusieurs instruments, parfois pendant une même chanson. Ça bouge beaucoup. C’est comme un Transformer [rires]!"

FAIRE LA LUMIÈRE

D’après ce qu’on en comprend, le dispositif scénique de la tournée Vers à soi s’avère relativement épuré. Pas de projections en 3D ni de décors alambiqués. De toute façon, les planches étant pleinement garnies par le parc à instruments, Jorane avoue qu’elle se serait mal vue "d’ajouter quelque chose juste pour faire beau. J’aimais mieux prendre l’espace libre pour créer une station de plus pour le batteur. J’aime quand les instruments font partie de la mise en scène. C’est sûr qu’une belle toile, un beau décor, ça fait toujours plaisir, mais je pense qu’en ce moment, c’est le travail de l’éclairagiste, Mathieu Roy…" Sans même finir sa phrase, Jorane nous fait comprendre l’importance de ce garçon dans le tableau d’ensemble. "On avait fait des shows d’essai avec Mathieu. Les chansons l’inspiraient. J’ai beaucoup aimé son aspect créatif, ses idées, ses couleurs. Il est sombre. Et moi, j’aime mieux quand ce n’est pas trop clair. J’apprécie les gens qui n’ont pas peur d’utiliser du bleu. Mathieu travaille beaucoup en nuance, en subtilité. Ça correspond à ce que j’aime." Voilà, c’est dit. Lumières, s’il vous plaît.

COMME ON SE RETROUVE

Si l’on se fie aux échos, les premières prestations de la tournée Vers à soi ont bien marché. Les retrouvailles avec le public se sont bien déroulées? "Oui, confirme Jorane. Pour les premiers shows, le disque n’était pas encore sorti, alors les gens avaient les oreilles complètement vierges de toutes les nouvelles chansons, de toutes les nouvelles musiques. J’ai été étonnée de leur réponse. C’était spécial. Ça n’arrive vraiment pas souvent de jouer des chansons devant un public qui ne les a pas encore entendues. La tension était palpable. On voyait beaucoup les réactions, même pendant les chansons. C’était le fun." Si le matériel extrait du dernier album figure avantageusement au menu, quelques "succès anciens", comme Monsieur Piment, tiré de Vent fou, sont parvenus à se faire une niche. Jorane dit prendre plaisir à revisiter le passé "avec le souffle qu’on a maintenant". Il est aussi question de faire "un petit coucou à l’album Canvas or Canvass, paru sur Internet seulement", ajoute-t-elle. Beau et vaste programme.

DONNER AU SUIVANT

Pas de doute, l’artiste prend son pied dans le contact privilégié avec la foule, même si la tournure du rendez-vous n’est jamais connue. "Monter sur scène, par moments, c’est un peu se mettre dans le trouble parce qu’on ne sait pas quelle corde ça va aller chercher, explique Jorane. C’est ça que j’aime, quand il y a cette ouverture." De toute façon, risque ou pas, le spectacle vivant est pour elle une obligation. Les chansons doivent vivre et vivront, portées par un souffle qui la dépasse parfois. "En show, on est plus ou moins responsable du chemin que la musique va faire. Une énergie est là même si on est fatigué. Il y a quelque chose d’inébranlable quand on met les pieds sur une scène. Peu importe ce qui s’est passé ou ce qu’on a entendu avant. J’ai envie que les gens sortent de la salle avec le goût de vivre, conclut Jorane. Je veux leur permettre de recharger leurs batteries, leur donner un élan. Qu’en sortant, ils se disent: "Ça vaut la peine, faut faire de quoi, on y va!"" Certains créateurs maîtrisent bien l’art du don. Le public se rend-il seulement compte du cadeau qu’il reçoit?

Le 27 février à 20h
Au Centre culturel de l’Université de Sherbrooke
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À écouter si vous aimez /
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