Dengue Fever : Complètement dengue
Dengue Fever fait revivre les belles années du Khmer rock.
Khmer rock? Encore une autre de ces nombreuses appellations trendy pour cataloguer un genre de rock bien spécifique, pensez-vous? "Pas tout à fait", explique Ethan Holtzman, claviériste de la formation californienne Dengue Fever. "Khmer signifie tout simplement "Cambodgien". Le Khmer rock est donc le terme utilisé pour décrire la musique rock qui existait au Cambodge durant les années 60, avant l’arrivée au pouvoir de Pol Pot. Ça n’a rien à voir avec les Khmers rouges, bien au contraire! À cette époque, les jeunes Cambodgiens étaient, comme plein d’autres jeunes à travers le monde, influencés par la musique populaire occidentale, soit le rock, le psychédélique, la pop, le R&B, le funk, etc. Et comme plein de jeunes à travers le monde, les Cambodgiens mêlaient à ces nouvelles sonorités des voix, des sons et des instruments typiques de leur pays."
C’est en voyageant en Asie qu’Ethan Holtzman a découvert le Khmer rock. À son retour, il partagea sa nouvelle passion avec son frère Zac qui, à son tour, flasha sur cette musique hors du commun. L’idée leur est donc venue de former un groupe capable de recréer ce style de pop hybride. Nous sommes à Los Angeles en 2001.
Le défi fut ensuite de trouver quelqu’un qui puisse chanter des textes en cambodgien. "Nous avions entendu parler de Chhom Nimol, une chanteuse qui avait connu un certain succès dans son pays et qui vivait maintenant à quelques kilomètres de L.A. Nous nous sommes donc rendus dans un petit club de karaoké de Long Beach où elle chantait, et dès que nous l’avons entendue, nous avons su que c’était elle. Nous avons dû nous rendre là plusieurs fois avant qu’elle ait confiance et accepte de se joindre à nous."
The rest is history, comme disent nos voisins du sud. À partir du moment où Chhom Nimol a rejoint les frères Holtzman et les trois autres musiciens du groupe (le saxo David Ralicke, le batteur Paul Smith et le bassiste Senon Williams), Dengue Fever a vraiment décollé. Cela dit, ce n’est qu’après la parution du second album, Escape From Dragon House, en 2005 (le premier, éponyme, reprenait majoritairement des chansons populaires du répertoire Khmer rock), que le monde prit connaissance de son existence. Cette fois-ci, le groupe osait créer ses propres pièces.
En mélangeant le rock psychédélique West Coast et le son surf à la chanson pop cambodgienne et à des éléments de style Bollywood indien, la bande a trouvé sa place dans un créneau unique et totalement original. Avec la récente sortie de son troisième album, l’excellent Venus On Earth, les choses devraient aller en s’accélérant. Le groupe a d’ailleurs récemment fait l’objet d’un documentaire, Sleepwalking Through the Mekong, qui relate le retour au pays de Chhom Nimol accompagnée de Dengue Fever. "C’était vraiment incroyable, s’exclame le claviériste. Il y avait plein de monde à nos concerts, des jeunes comme des vieux, des locaux comme des étrangers. Habituellement, tous ces gens ne se mélangent pas trop, mais là c’était magique. Nous avons fait plein de télés et de radios et nous avons aussi enregistré avec les quelques rares musiciens survivants de l’époque du Khmer rock. La grande majorité a été tuée sous le régime de Pol Pot qui interdisait ce genre de musique."
Aujourd’hui, grâce à Dengue Fever, le Khmer rock retrouve enfin ses lettres de noblesse.
Le 7 mars avec Jerusalem In My Heart
À la Sala Rossa
À écouter si vous aimez /
Le Khmer rock, la série Éthiopiques, Tinariwen
KHMER ROCK 101
Curieux d’en savoir un peu plus sur le Khmer rock? Nous avons demandé à Ethan Holtzman, qui s’y connaît en la matière, de nous donner le nom des deux plus importants musiciens du rock cambodgien.
Sinn Sisamouth. "Très prolifique, il a écrit plus de mille chansons et c’est sans doute le musicien qui a le plus inspiré Dengue Fever. Hélas, il est mort sous le régime des Khmers rouges."
Ros Sereysothea. "Si Sinn Sisamouth est LE chanteur Khmer rock, Ros est LA chanteuse. Ils ont d’ailleurs collaboré plusieurs fois ensemble. Il semble qu’elle soit décédée dans un camp de travaux forcés."
Pour plus d’information et pas mal de musique, il faut aller faire un tour sur khmerrocks.com, sans doute le site le plus complet sur le sujet.