Yannick Nézet-Séguin : Madame Butterfly
Musique

Yannick Nézet-Séguin : Madame Butterfly

Ces jours-ci, Yannick Nézet-Séguin dirige pour la première fois l’opéra Madame Butterfly de Puccini.

Il y a toujours une première fois, même pour un chef d’orchestre dont on serait porté à croire qu’il a déjà placé derrière lui, malgré son jeune âge (32 ans!), les gros morceaux du répertoire. "J’ai découvert ce qu’était un chef en chantant dans un choeur à 9 ans, se souvient-il entre deux répétitions. J’avais 22 ans lorsque j’ai été nommé assistant-chef à l’Opéra de Montréal, alors ça remonte à loin, et ça me fait toujours beaucoup de bien d’y revenir."

Avec le parcours exceptionnel qu’on lui connait (il prendra en septembre la direction artistique de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam et sera aussi le principal chef invité au London Philharmonic Orchestra), on s’étonne presque qu’il en soit à son premier Madame Butterfly. "C’est drôle, dit-il, parce qu’en y pensant, il y a d’autres opéras que je me souviens d’avoir dirigés, et ça me surprend moi-même! De Puccini, j’ai déjà fait La Bohème, Turandot et un extrait de Tosca. Ce qui est drôle aussi, c’est qu’on m’a beaucoup dit que c’était le plus difficile à diriger, et, enfin jusqu’à maintenant, je ne trouve pas ça du tout!"

L’histoire de la pauvre Cio-Cio-San, amoureuse, et épouse, de l’officier américain Pinkerton, qui traite cet engagement comme une amusette, est profondément tragique, et son traitement musical l’est tout autant. "C’est la vision stéréotypée d’un compositeur italien qui n’avait jamais mis les pieds au Japon, explique Nézet-Séguin, mais ça vise tellement juste au niveau de la pureté du personnage et des sentiments. Ça donne une musique qui est très italienne, mais aussi presque impressionniste, se rapprochant des couleurs d’un Ravel. C’est très andante, sostenuto…"

Dans cette production d’Opera Australia, mise en scène par Moffat Oxenbould en 1999, le chef a-t-il l’impression d’être prisonnier d’un cadre préétabli? "Même dans le cas d’une création, explique-t-il, le chef a rarement son mot à dire sur les décors… Je suis content, parce que c’est Matthew Barclay, l’assistant du metteur en scène de la création, qui est avec nous, et il a beaucoup travaillé cette oeuvre-là. Il connait le texte et les intentions qui sont derrière, mais mon apport se situe précisément sur des détails relatifs à ces intentions; le débit du texte, pourquoi le personnage répète deux fois la même chose, tout cela est musical, et la mise en scène doit alors faire confiance à la musique."

Le chef a devant lui, outre son Orchestre Métropolitain, des chanteurs et chanteuses qui ont une connaissance intime des rôles: "Richard Troxell jouait Pinkerton dans le film de Frédéric Mitterrand en 1995; c’est le rôle de sa vie! Il l’a fait des dizaines de fois. Quant à Hiromi Omura (Cio-Cio-San), c’est imprudent de ma part de le dire, mais à mon avis, elle ne peut que faire un hit extraordinaire! Elle est l’interprète dont Puccini n’osait même pas rêver… Jeune, jolie, japonaise, très crédible dans le rôle d’un personnage qui a 15 ans, mais avec la voix de Tebaldi… Un miracle!"

Après cette incursion fictionnelle en territoire japonais, Yannick Nézet-Séguin vivra sa première tournée orientale avec son orchestre de Rotterdam (en juin: Japon, Chine, Corée du Sud et Taiwan). Cette Butterfly est donc une excellente occasion d’aller le saluer avant son départ!

Du 24 mai au 7 juin
À la Salle Wilfrid-Pelletier de la PdA
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